Que le poète ait foi en une inspiration divine, comme cela fut le cas pour Rosnard, ou qu'il pense sa création comme le fruit d'un long travail à la manière de Valery, celui-ci sert les mots sous un certain jour. La laideur a-t-elle dans ce sens, sa place dans la création poétique ? Si une part importante des oeuvres poétiques est dictée par la contemplation du Beau, une autre, non moins négligeable, tire son essence de la laideur au point de remettre en perspective la nature même de la poésie.
Le beau est à l'origine de la Poésie et demeure important dans l'inspiration du poète. Apollon, Orphée, Dyonisos, ces figures mythologiques du poète ont comme sources d'inspiration première, l'amour, la guerre et la nature ; des thèmes qui, au cours de l'histoire de la poésie, n'ont de cesse de resurgir.
[...] Engagement plus nuancé, celui de rendre justice aux choses et de faire même "de la boue de l'or " d'après les termes de Baudelaire. Car même si le monde n'est parfait et que tout n'est pas beau, certaines choses sont méjugées et méritent qu'on voie en elles le Beau qu'elles recèlent "pour peu qu'on y jette un oeil moins superbe" comme le dit si bien Hugo dans J"aime l'araignée. Ponge dans son Pari pris des choses où il évoque des objets aussi prosaïques qu'une cigarette ou un peigne, qu'il anoblit au reste, y vont par la même logique. [...]
[...] Conclusion En définitive, il y et du Beau et de la laideur dans l'inspiration poétique. Cette dernière a donc sa place dans l'acte créateur. Et, quand le summum du laid et atteint, celui de l'innommable, celui des Guerres mondiales idéologiques, le poète doit aller au-delà de la sentence d'Adorno "il ne peut y avoir de poésie après Auswisch". Par exemple, se réfugier dans l'abstrait de l'inconscient avec le surréalisme de Breton s'il ne peut s'accorder à la lourde tâche de montrer des vérités aussi crues partant du principe que "la poésie ne doit être poétisée" (Eluard). [...]
[...] Enfin, le poète peut s'inspirer de la nature : écho du divin selon Swedenborg. Ce philosophe suédois inspirera à Baudelaire la théorie des correspondances, illustrée dans un poème du même nom. Et, si le divin est parfait, si la poésie, aux si grands pouvoirs, lui doit tout, il est alors heureux que la nature, fruit du pouvoir démiurgique de Dieu, soit source d'inspiration pour le poète. Postulat des Romantiques qui fuient un climat instable en s'y réfugiant. On retrouve aussi cette nature chez le génie précoce de dix-sept ans : Rimbaud. [...]
[...] Aussi Rimbaud dans Sensation va-t-il "dans la montagne, fouler l'herbe menue" accompagnée de ce sentiment onirique qu'il sait rendre si savamment. Transition. Le Beau n'a eu de cesse d'inspirer les poètes de Virgile à Saint John Perse, cependant, il est loin d'être la muse toute puissante de ces derniers. Bien souvent le laid amorce chez le poète, volonté de révolte ou souhait de rendre justice aux mots et thématiques délaissées, condamnées. II . mais n'est pas tout puissant. On peut évoquer cette "autre muse" du poéte qu'est la laideur D'abord la poésie engagée. Celle-ci part d'un constat amer. [...]
[...] La poésie est avant tout l'art du vrai Ces deux termes antithétiques ont donc en poésie la même valeur. Il n'y a pas et il ne faut pas : ou du Beau ou de la laideur. En poésie, il faut du vrai. En effet ce dépassement énoncé par Valery traduit à juste titre la place de l'un ou l'autre dans l'inspiration poétique. Même Baudelaire, pourtant attaché au thème du laid (une Charogne) plante dans "ses fleurs maladives" de la beauté. [...]
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