La Condition humaine, roman à titre évocateur, retrace la vie de quelques insurgés et hommes d'affaires durant ce qu'on appelle aujourd'hui "le massacre de Shanghaï" qui a eu lieu en mille neuf cent vingt-sept. La manière dont cette guérilla urbaine opposant le Kuomintang au Parti Communiste chinois est dépeinte par André Malraux, homme politique et romancier du vingtième siècle, a souvent été source de discussions et d'oppositions. Ainsi, à la parution du livre en mille neuf cent trente-trois, Robert Brasillach, dans un article sur les romans de Malraux affirme : "ses livres apparaitront en définitive comme des manuels de cruauté". Le critique, en utilisant le futur, n'applique pas cette affirmation à l'époque dans laquelle il vit, mais aux générations qui succèderont la sienne, de la même façon que l' expression "en définitive", qui marque l'aspect lointain et final de cette déclaration. Le terme "manuel", quant à lui, fait référence à un livre à visée didactique, qui, de sa définition, expose les notions essentielles d'un sujet (...)
[...] Les héros du roman se retrouvent donc face à des situations avilissantes ou cruelles, qui n'ont de cesse de mettre en avant leurs vices respectifs, qu'ils soient liés à la drogue, à l'obsession, ou encore au pouvoir. Ces tares, qui viennent s'ajouter à l'ambiance déjà éprouvante du roman vont contribuer à l'affirmation de Robert Brasillach à l'égard des oeuvres de Malraux. D'ailleurs, ce dernier, en comparant La Condition humaine à un manuel de cruauté sous-entend la présence d'une didactique de la violence au sein de l'oeuvre; pourtant, aucun détail technique sur le meurtre, la torture ou encore le maniement des armes n'est présent dans l'ouvrage pour attester cette affirmation. [...]
[...] Ainsi, La Condition humaine crée un espace dans lequel se mêle violence et fraternité, autant de sentiments antithétiques qui donnent une vision globale de la vie humaine. L'humanité: entre horreur et splendeur En effet, dans le titre de cette œuvre, les résonances pascaliennes sont indéniables et les thèmes qu'on y retrouve sont eux aussi éminemment liés à la pensée du philosophe. Ce dernier disait d'ailleurs à propos de la condition de l'homme: Qu'on s'imagine un grand nombre d'hommes dans les chaines, et tous condamnés à mort, dont les uns étant chaque jour égorgés à la vue des autres, ceux qui restent voient leurs propre condition dans celle de leurs semblables . [...]
[...] Plus suggestif que ces arguments, le titre de l'œuvre nous fait comprendre son essence première: La Condition humaine est avant tout un roman de l'Humanité dans tout ce qu'elle a de plus réel. La cruauté à laquelle fait référence Robert Brasillach n'est donc qu'une des nombreuses facettes de l'œuvre, rapidement supplantée par l'entraide des héros malruciens. Il semble alors que La Condition humaine soit bel et bien un manuel destiné à l'apprentissage de la vie dans ce qu'elle a d'obscur et de lumineux plus qu'une simple initiation à la cruauté. [...]
[...] Le jeune homme affirme même avant de mourir: il est facile de mourir quand on ne meurt pas seul Comme Katow lorsqu'il offre son cyanure à ses deux camarades, Kyo parvient à surmonter sa condition, non pas en donnant un bien tangible, mais en donnant à May et à ses compagnons une formidable leçon d'amour. Aider celui qui est en détresse est une réaction récurrente des personnages de La Condition humaine, mais le faible n'est pas toujours un allié. Effectivement, dans la seconde partie du roman, Tchen, durant un combat, se retrouve face à un ennemi qui a perdu une jambe et qui est ficelé. Au lieu de se réjouir de cette situation, le jeune homme est compatissant et décide de l'aider, quitte à perdre la vie, sans savoir vraiment pourquoi. [...]
[...] En effet, bien que la structure tragique de l'oeuvre soit plus large que celle d'une tragédie, La Condition humaine revêt plusieurs caractéristiques du drame. Le destin y tient une place prépondérante et les personnages ne peuvent éviter l'échec de leurs entreprises respectives, ainsi, l'issue de La Condition humaine ne peut être autre que le trépas des héros. L'aspect tragique d'une œuvre est souvent visible à travers les procédés utilisés par l'auteur qui peuvent être des champs lexicaux liés à la mort, à la culpabilité ou encore à la souffrance. [...]
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