De la Bible en passant par le symbolisme littéraire du XIXème, le symbole permet de traiter d'une notion abstraite en utilisant une figure ou une image afin de véhiculer un message implicite. Marguerite Duras recourt souvent aux symboles dans ses écrits. Dans L'Amant, nous allons nous pencher sur la portée symbolique du chapeau de la narratrice, de la traversée du fleuve et enfin des différentes fonctions de l'eau.
Intéressons-nous premièrement au chapeau qui a plusieurs symboliques. Il permet de révéler un aspect de nous, de jouer un rôle ou encore de nous différencier/apparenter à un groupe. Nous allons voir que dans L'Amant, le couvre-chef a une toute autre signification.
Le chapeau est cité pour la première fois à la page 19. C'est « un chapeau d'homme aux bords plats, un feutre souple couleur bois de rose au large ruban noir » qui lui a été offert par sa mère et dont elle ne se sépare plus : « Je prends le chapeau, je ne m'en sépare plus, (...), ce chapeau qui me fait tout entière à lui seul, je ne le quitte plus. » (20).
La description du chapeau précise qu'il est généralement porté par l'homme. Cependant, ce type de couvre-chef n'est pas porté dans les colonies et encore moins par des jeunes filles de quinze ans. De ce fait, la jeune narratrice ne passe pas inaperçue et les gens la remarquent. L'accoutrement vestimentaire de l'enfant la différentie des autres femmes de la région. Le chapeau semble être une source de lumière car tous les regards convergent vers lui : « Le chapeau d'homme colore de rose toute la scène. C'est la seule couleur. » (30).
Cependant dans l'oeuvre que nous étudions, le chapeau n'est pas un simple accoutrement vestimentaire qui attire l'attention mais également un véritable instrument de séduction. Le chapeau peut être perçu comme un objet de désir et d'envoûtement. La petite arbore un habillement de femme et non pas de jeune fille de quinze ans. Cela laisse penser que son avenir sera divergeant de celui des autres femmes. Ces dernières auront des vies ennuyeuses, seront promises au mariage etc. Cette enfant qui se différencie autant des autres semble unique, comme une élue. Son habillement la fera renaître, purifiée et libérée des interdits. (...)
[...] C'est comme un rappel de passé perdu car ici tout le monde est content Tout le monde est pieds nus, la mère aussi. La mère rit. La mère n'a rien à dire contre rien. La mère est très heureuse de ce désordre, la mère peut être très heureuse quelquefois, le temps d'oublier, ce lui de laver la maison peut convenir pour le bonheur de la mère. (77). Il est important de noter que la maison est nettoyée uniquement lorsque le frère est absent. La mère purifie la maison de la présence démoniaque de son fils. [...]
[...] Il y a une tempête qui souffle à l'intérieur des eaux du fleuve. (18). Ce dernier permet à la narratrice de basculer dans un nouvel épisode de sa vie qui sera à proprement parler un enfer. En parlant d'enfer, nous pouvons faire un rapprochement entre le Mékong et le Styx, rivière des Enfers. Dans la mythologie grecque, le voyage entre les deux mondes se fait par le Styx. Il ne peut être traversé qu'en compagnie de Charon le passeur dont on peut noter le parallèle avec le passeur autochtone de la page 30. [...]
[...] Cette rencontre est le point de départ de son processus de libération. Même si le passage semble anodin à la première lecture, le descriptif de la traversée annonce d'emblée la passion destructrice des amants. Bien qu'il soit symbole de vie, le fleuve tiens cette fois un aspect engluant, engloutissant. Les premières descriptions du fleuve sont comme une annonce : il ne mène nulle part, il est la cavité des océans sur laquelle se clôt le roman avec la fin tragique du chinois. [...]
[...] Soudain, voilà qu'on la voulue Elle devient un véritable objet de désir mise à la disposition de tous les regards, mise dans la circulation des villes, des routes, du désir De plus, ce chapeau accompagne une tenue pour le moins aguicheuse à son âge : souliers d'or, le rouge sombre des lèvres, la robe de soie. Plus on avance dans le roman, plus on s'aperçoit que la narratrice est perçue comme une prostituée, déshonorée, et qu'une chienne vaut davantage. (73). La narratrice marchande son corps à l'aide de son couvre- chef : Elle parle (la mère). Elle parle de la prostitution éclatante ( ) de ce chapeau. (113). Cet accessoire permet à Duras de se différencier mais également séduire. Après nous être intéressé aux différentes fonctions du chapeau, penchons nous la traversée du fleuve. [...]
[...] En analysant les symboliques dans L'Amant de Marguerite Duras, nous avons relevé que le chapeau que porte la jeune narratrice est non seulement un accessoire vestimentaire qui lui permet de ne pas passer inaperçue mais surtout un véritable moyen de séduction. Les différentes traversées du fleuve Mékong ne sont en réalité qu'une transition entre deux existences mais aussi le point de départ de leur liaison. Finalement, nous avons pu noter le fait que l'eau est composée de deux forces opposées dans l'œuvre de Duras : un élément générateur mais également destructeur. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture