Parmi tous les genres littéraires, le roman est sans doute le seul à donner une dimension aussi profonde et aussi complète aux personnages qu'il présente en général. Là où la nouvelle va à l'essentiel et où le personnage est au service de l'intrigue, le roman donne à l'écrivain l'occasion d'un véritable épanchement du personnage, de sa vie, de sa psychologie, du sens profond de ses agissements. Nous pouvons nous interroger sur la raison d'être d'un tel épanchement. La vie humaine étant une absurde et "inéluctable défaite" puisqu'elle aboutit à la mort, sa reproduction dans le roman sert-elle à une meilleure compréhension de celle-ci, comme l'affirme Milan Kundera dans
[...] Conclusion En conclusion, nous pouvons dire que l'inévitable fin de la vie qui fait de celle-ci une défaite peut être considérée comme telle dans le roman: le personnage est alors "vaincu" et n'invite plus à l'admiration d'une grandeur quelconque, mais à sa compréhension. Cela dit, il serait réducteur de résumer à cette fonction la "raison d'être" de l'art du roman face à la vie. Les personnages romanesques sont au contraire des portes ouvertes à une redéfinition de la vie, par leur grandeur et l'admiration qu'ils peuvent susciter. [...]
[...] Premier pas pour essayer de la comprendre, ou la "prendre dans sa globalité", il s'agit pour le romancier d'en montrer les tristes limites, et par là son absurdité même. C'est ainsi que Kafka travaille dans son œuvre à refléter le nihilisme de la vie. Les personnages de Grégor Samsa (La Métamorphose) et de Joseph K (Le Procès) nous montrent que "tout est clair" sur ce point: la vie n'a d'autre sens que celui de la mort. Le personnage romanesque, ici en mourant sans raison, suggère une réflexion sur la compréhension d'une vie sans issue. En quoi consiste alors cette compréhension d'une chose a priori absurde ? [...]
[...] LE ROMAN ET LA VIE SELON KUNDERA Sujet "Les personnages romanesques ne demandent pas qu'on les admire pour leurs vertus. Ils demandent qu'on les comprenne et c'est quelque chose de tout à fait différent. Les héros d'épopée vainquent ou, s'ils sont vaincus, gardent jusqu'à leur dernier souffle leur grandeur. Don Quichotte est vaincu. Et sans aucune grandeur. Car d'emblée, tout est clair: la vie humaine en tant que telle est une défaite. La seule chose qui nous reste face à cette inéluctable défaite qu'on appelle la vie est d'essayer de la comprendre. [...]
[...] C'est de cette manière que Madame Bovary (Flaubert) ne demande pas "qu'on [l']admire pour vertu", mais qu'on comprenne", c'est-à-dire qu'on mette un sens, à l'aide de tous les éléments qui la composent sur une vie délimitée par la durée. Enfin et par conséquent, le roman agit comme un laboratoire d'étude de la vie. La représentation de vies fictives permet de comprendre les mécanismes qui régissent le monde et l'individu. Loin de nier la mort, elle la comprend dans sa présentation d'un personnage et inscrit cette "défaite" dans la compréhension du sens même de la vie. [...]
[...] C'est là la raison d'être de l'art du roman." Commentez cette réflexion de Milan Kundera (Le Rideau, 2005). Introduction Parmi tous les genres littéraires, le roman est sans doute le seul à donner une dimension aussi profonde et aussi complète aux personnages qu'il présente en général. Là où la nouvelle va à l'essentiel et où le personnage est au service de l'intrigue, le roman donne à l'écrivain l'occasion d'un véritable épanchement du personnage, de sa vie, de sa psychologie, du sens profond de ses agissements. [...]
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