Pour Quentin Bell, le neveu de Virginia Woolf, rejeton de sa soeur Vanessa Bell et du grand critique d'art Clive Bell, le Journal de Virginia Woolf est bien le livre majeur du grand écrivain moderniste. Dans l'introduction à la biographie qu'il consacre à sa tante Virginia à partir de 1977, à la demande du veuf Léonard Woolf, le Journal, celui des années 1915 à 1941, il l'affirme en effet : le Journal permet au lecteur des grands romans de Virginia, des Vagues à La Promenade au phare, de Mrs. Dalloway à Une Chambre à soi, objectif encore inatteignable de tant de femmes dans le monde, de découvrir de l'intérieur les méandres de la pensée d'un être complexe, complet, torturé, joyeux, drôle, incisif, tendre, vachard. Virginia souffrait pour le moins de dépression chronique, son état d'âme dominant n'était pas la tranquillité de l'esprit, elle savait reconnaître ses émotions les moins nobles, comme la jalousie, quand elle remontait de la petite enfance, elle ne faisait pas de cadeaux à ses contemporains et formulait immédiatement et à l'emporte-pièce des jugements souvent frappants de lucidité, quitte à admettre très vite ses erreurs quand elle avait conscience d'en avoir commises, elle ne pardonnait pas aux faibles leurs faiblesses, ne supportant sans doute guère les siennes propres, et pouvait les tuer d'une phrase, d'un mot. Mais ce n'était jamais gratuit.
[...] ) Esprit positif.» Virginia Woolf a quinze ans quand elle commence son Journal, en 1897. Elle a perdu sa mère deux ans plus tôt, à la suite de quoi elle a eu sa première crise de démence. Elle sombrera de nouveau à la mort de son père, en 1904. Le Journal de 1897 est une vrai journal d'adolescente qui se remet lentement de la mort de sa mère. Dès 1899, il est question de son désir de consacrer sa vie à l'écriture. [...]
[...] Elle feuillette ses anciens cahiers pour redécouvrir que le même malaise l'avait bien saisie après un précédent roman. Bien sûr, tout se répète. Après Le Phare, elle s'était approchée aussi près que possible du suicide. Après Les Vagues, elle avait mis des jours à s'en remettre. Mais le pire avait été indéniablement ce jour de 1913, après son premier roman, La Traversée des apparences, où elle avait fait une véritable tentative de suicide. En 1937, elle reçoit la traductrice française de Les Vagues. Elle n'a pas tout à fait retenu son nom. [...]
[...] Virginia souffrait pour le moins de dépression chronique, son état d'âme dominant n'était pas la tranquillité de l'esprit, elle savait reconnaître ses émotions les moins nobles, comme la jalousie, quand elle remontait de la petite enfance, elle ne faisait pas de cadeaux à ses contemporains et formulait immédiatement et à l'emporte-pièce des jugements souvent frappants de lucidité, quitte à admettre très vite ses erreurs quand elle avait conscience d'en avoir commises, elle ne pardonnait pas aux faibles leurs faiblesses, ne supportant sans doute guère les siennes propres, et pouvait les tuer d'une phrase, d'un mot. Mais ce n'était jamais gratuit. La pensée et la plume de Virginia Woolf étaient aussi fluides que l'eau qui la fascinait tant, et à laquelle elle devait décider, un beau jour de 1941, de donner sa vie. Son Journal est à picorer au fil des jours, à lire par intermittence, pas forcément à lire d'une traite. La tâche serait rude. Et de lecture en lecture, le fil se renoue spontanément. [...]
[...] À ce moment-là, il me stupéfie. Jamais je n'avais aussi bien compris son étonnante envergure, son agilité ( . J'irai jusqu'à dire que Shakespeare est au- delà de toute littérature, si seulement je savais ce qu'on entend par là.»[1] Bien sûr, Virginia Woolf peut se tromper, prise dans l'étau de sentiments complexes et contradictoires. Si elle manque parfois singulièrement de confiance en elle, elle n'en a pas moins une haute idée de son oeuvre et de son rôle dans la littérature. [...]
[...] Il lui arrive même de se dédoubler : elle s'imagine alors en vieille Virginia qui relit ces pages et choisit d'en supprimer quelques passages dont le relief se serait émoussé avec le temps. Elle n'aura pas le loisir de le faire. C'est elle qui, libre jusqu'au bout, en choisira autrement. Écrire, lire, voilà l'essentiel, le sel de la vie. Puisque le temps s'écoule, puisque l'éternité de chaque instant est fuyante, voilà qu'il faut l'attraper comme un papillon en plein vol. [...]
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