Marivaux a souvent recours dans ses comédies à l'échange des conditions entre les maîtres et les valets pour mettre à jour les mécanismes de l'âme humaine, notamment dans la complexité des rapports amoureux. C'est ce qui se passe dans Le Jeu de l'amour et du hasard, où Silvia et Dorante décident de prendre la place de leurs valets à l'insu l'un de l'autre avant de décider de se marier. On peut se demander si cet échange mène véritablement chacun à la découverte de soi et de sa vérité, comme on nous le suggère. Nous verrons que l'intrigue repose avant tout sur le mensonge et dissimule, au moins en partie, la vérité; néanmoins, chaque personnage travesti, d'abord animé de la simple intention de découvrir l'autre, parvient surtout à se découvrir lui-même. Mais cette découverte de la vérité reste provisoire et partielle pour les personnages; Marivaux semble finalement plutôt viser et atteindre la vérité théâtrale.
[...] Le mensonge et le jeu redoublés. II. L'échange des conditions comme instrument révélateur de sa vérité: amour et amour-propre. a. La volonté de découvrir l'autre: des maîtres dignes de leur condition. b. Le regard des autres en dehors des apparences habituelles: des valets enfin reconnus pour leur mérite. c. [...]
[...] Le point de départ de la pièce puise donc sa raison d'être dans le mensonge de l'amourpropre. La proposition de Silvia à son père d'échanger les rôles avec Lisette, sa servante, redoublée par la décision identique de Dorante, qui vient pour se présenter à elle et décider s'il veut l'épouser, est aussi un déguisement de la vérité, même si celle-ci ne repose que sur des apparences. Tout d'abord, les noms sont échangés, et Silvia se fait appeler Lisette; Dorante s'invente même un nom, comme si celui d'Arlequin était trop usurpé pour lui; il s'invente un nom typique de valet, souvent désigné à l'époque par leur origine géographique, comme les esclaves de la Rome antique: Bourguignon D'autre part, chacun des protagonistes de ce double mensonge a pris soin de se revêtir des habits de sa fonction. [...]
[...] moi, je vous querelle pour lui ! j'ai bonne opinion de lui ! Vous me manquez de respect jusque-là! Bonne opinion, juste ciel ! bonne opinion ! Que faut-il que je réponde à cela? Qu'est-ce que cela veut dire, à qui parlez-vous ? Qui est-ce qui est à l'abri de ce qui m'arrive, où en sommes-nous? [...]
[...] De même, Orgon donne l'ordre à Lisette au début de l'acte II de jouer la comédie jusqu'au bout, même si elle réussit à se faire aimer de celui qui la courtise et qu'elle croit être le jeune et riche noble promis à sa maîtresse; il joue cruellement avec ses espoirs en ne la détrompant pas sur l'origine sociale de son amoureux; car elle déclare: Sur ce pied là je compte ma fortune faite.» En fait les personnages de Mario et d'Orgon sont des substituts du dramaturge et du spectateur: comme eux, ils connaissent ce que les autres ignorent, et, comme l'écrivain, ils tirent les ficelles de cette représentation qu'on leur donne. À cet égard, la fin de la scène 5 de l'acte I est particulièrement significative: Monsieur Orgon. Nous verrons un peu comment elle se tirera d'intrigue. Mario. [...]
[...] Dissertation Un des ressorts dramatiques récurrents de la comédie du XVIIIe° siècle, dont les représentants majeurs sont Marivaux et Beaumarchais, est le travestissement qui recouvre en général un échange de conditions entre maîtres et valets À partir de la pièce de Marivaux Le Jeu de l'amour et du hasard, vous vous demanderez si l'échange des conditions entre maîtres et valets conduit chacun à la découverte de soi et de sa vérité. Plan I. L'échange des conditions comme moyen de se cacher aux autres. a. Le mensonge des noms, des vêtements et des fonctions. b. Les maîtres et les valets dupes. c. [...]
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