L'œuvre de Proust marque un tournant dans l'histoire du genre romanesque, en traitant de façon novatrice la subjectivité. Cela ouvre la voie à la pratique d'une écriture de l'introspection. Du côté de chez Swann nous invite à considérer celle-ci sous l'angle particulier de la jalousie, thème qui prédomine plus particulièrement dans Un Amour de Swann, à travers le personnage éponyme et son amour pour Odette. Cependant, les rapports entre jalousie et introspection sont complexes. En effet, l'introspection, regard en soi, nécessite une distance par rapport à soi-même, tandis que la jalousie, passion obsédante, plonge sa victime dans l'immédiateté. Dans Du côté de chez Swann, jalousie et introspection sont-elles vraiment incompatibles ou, au contraire, la jalousie mène-t-elle à l'introspection par la recherche de la vérité à laquelle elle aboutit ? Nous verrons tout d'abord la conception de l'amour chez Proust, mécanisme qui se manifeste essentiellement par la jalousie, conçue comme maladie. Ce processus même entraîne une difficile connaissance de soi pour Swann, faite d'une alternance entre lucidité et mensonge à soi. Cependant, la jalousie provoque une transfiguration du réel qui est le fruit d'une descente en soi-même ; finalement, cette introspection liée à la jalousie est certes celle de Swann, mais n'est-elle pas aussi celle du narrateur de la Recherche, double de Swann ?
[...] A plus forte raison quand le sentiment dominant du personnage est la jalousie, dont l'objet est extérieur (Odette), mais dont les conséquences sont intérieures car liées à la psychologie de Swann. Finalement, si tout est mêlé, alors c'est la confrontation au réel qui permet la connaissance de soir et vice-versa. La jalousie de Swann, qui est ce rapport conflictuel et problématique à Odette et à lui-même, serait alors à la fois origine et conséquence de son introspection comme descente en soi-même. Jalousie et transfiguration du réel : une descente en soi D. Les sentiments de Swann vis-à-vis d'Odette naissent de la transfiguration de celle-ci. [...]
[...] Faut-il pour autant conclure que les moments de jalousie en eux- mêmes empêchent l'introspection ? On peut, pour tenter d'y répondre, s'appuyer sur l'ouvrage d'Alain De Lattre, Le personnage proustien qui pose la question de la connaissance de soi. Il part de la base du problème, en se demandant en effet si l'introspection est justifiée et possible ; il faudrait pour cela que nous soyons notre propre mesure. L'introspection en tant que science a été théorisée par Jouffroy ; celui-ci pose un idéal d'objectivité, sur le modèle de la science positiviste, et l'existence de faits objectifs, qu'on peut constater, observer, analyser. [...]
[...] De même, on retrouve à plusieurs reprises la comparaison de Swann avec un fiévreux, ce qui tend à assimiler l'état du jaloux avec le délire et l'inconscience qui caractérisent la fièvre (p.312). Swann étant placé dans cette situation maladive à cause même de sa jalousie, son introspection en tant que connaissance de lui peut paraître compromise. En effet, tout au long d' Un amour de Swann on relève des scènes où il se ment à lui-même, et en cela se méconnaît. Le narrateur stigmatise l'insincérité du discours de Swann, aussi bien vis-à-vis d'Odette que de lui-même. (p.285). [...]
[...] ; Et Swann à un grave malade : p.311 : névropathe p.302 : comme un morphinomane ou un tuberculeux Souffrant d'une maladie incurable : p.303 : l'amour de Swann en était arrivé à ce degré où le médecin et, dans certaines affections, le chirurgien le plus audacieux, se demandent si priver un malade de son vice ou lui ôter son mal, est encore raisonnable ou même possible [ . ] comme on dit en chirurgie, son amour n'était plus opérable. C. La jalousie serait donc une sorte de virus tenace contre lequel le malade doit lutter, et de fait Proust la dépeint souvent comme un organisme vivant et autonome, et cette personnification apparaissant à plusieurs reprises dans Un amour de Swann pourrait tout aussi bien s'écrire à l'égal de la Volonté de Schopenhauer avec une majuscule : la Jalousie. [...]
[...] Cependant, les rapports entre jalousie et introspection sont complexes. En effet, l'introspection, regard en soi, nécessite une distance par rapport à soi-même, tandis que la jalousie, passion obsédante, plonge sa victime dans l'immédiateté. Dans Du côté de chez Swann, jalousie et introspection sont-elles vraiment incompatibles ou, au contraire, la jalousie mène-t-elle à l'introspection par la recherche de la vérité à laquelle elle aboutit ? Nous verrons tout d'abord la conception de l'amour chez Proust, mécanisme qui se manifeste essentiellement par la jalousie, conçue comme maladie. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture