Introduction à la métaphysique p. 14-16, Henri Bergson 1903, sciences psychologiques, philosophie, vice de procédure, propriété légitime, vie intérieure, conception du passé, conception du présent, commentaire de texte
Le flot de conscience qui anime l'homme et qui, différant toujours d'un individu à l'autre, le définit dans sa dimension particulière a fait et fait encore aujourd'hui l'objet de bon nombre d'études auxquelles il ne cesse de se dérober. Les soupçons portés sur cette étendue mouvante, fugitive, poussent la science à tenter de la disséquer selon les méthodes qui sont les siennes. Bergson, dans ce passage de son "Introduction à la métaphysique", dénonce non pas seulement cette méthode dont les sciences psychologiques font usage dans leurs travaux et qui, bien que nécessaire au progrès de cette branche de la philosophie, engendre l'illusion dont celles-ci sont victimes.
[...] L'incomplétude n'est pas ici à entendre au sens d'une lacune numérique, mais au sens d'amputation de la dimension originale, authentique de la chose. « C'est qu'on n'a pas affaire ici à des parties du tout, mais à des notes prises sur l'ensemble » : ainsi, il est vain de tenter, pour ressaisir « l'intuition originelle du tout », de regrouper des éléments dont ce n'est pas le nombre qui pêche, mais la nature. Bergson va plus loin en exposant un deuxième exemple : « supposons qu'on me présente, mêlées au hasard, les lettres qui entrent dans la composition d'un poème que j'ignore ». [...]
[...] Extraire l'un de ces maillons, l'isoler des autres desquels il procède nécessiterait de le briser, et d'en altérer ainsi la nature tout en rompant la cohérence de l'ensemble. On a chez Bergson une conception du passé et du présent non pas comme deux entités distinctes, mais comme se créant de façon simultanée, en parallèle, de fait inséparable l'un de l'autre. Tout état psychologique se présente alors comme investi en puissance de l'évolution passée et actuelle du sujet, c'est en cela que le séparer de cette continuité à laquelle il prend part relève nécessairement d'un « effort d'abstraction ou d'analyse ». [...]
[...] Ces « expressions partielles » sont des symboles qui valent pour d'autres et ne sont plus en mesure, une fois détachée de l'ensemble, de caractériser un être dans son unicité. D'autre part, si l'on peut descendre de l'intuition aux éléments, on ne peut remonter des éléments à l'intuition. Celle-ci est forcément antérieure : dans le cadre du poème inconnu, pour faire sens il est nécessaire de « se donner une intuition » dans l'assemblage des lettres. L'inverse serait comme tenter de se faire un collier de perles sans fil pour les tenir ensemble. [...]
[...] 14-16 - Henri Bergson (1903) P. 14-16, « Il est incontestable que . » - « à des fragments de symbole. » Le flot de conscience qui anime l'homme et qui, différant toujours d'un individu à l'autre, le définit dans sa dimension particulière a fait et fait encore aujourd'hui l'objet de bon nombre d'étude auxquelles il ne cesse de se dérober. Les soupçons portés sur cette étendue mouvante, fugitive, poussent la science à tenter de la disséquer selon les méthodes qui sont les siennes. [...]
[...] En quoi l'intuition se présente-t-elle comme la seule manière de se saisir de la continuité intérieure unique qui distingue les individus entre eux, et se présente comme l'essence même de ce qu'ils sont ? Et en vertu de quoi peut-on dire que le « spectre de couleurs » propre à tout un chacun s'avère être absolument indécomposable sous peine de se trouver dénaturé ? I. Le vice de procédure inhérent à la science psychologique Bergson s'apprête à nous faire une démonstration visant à dénoncer et mettre en lumière le vice de procédure inhérent à la science psychologique et qui rend impossible la saisie du « moi » en lui-même. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture