Néanmoins, déjà Ésope dans l'Antiquité, puis des auteurs français des XVII et XVIII siècles comme Jean de La Fontaine et Voltaire avaient saisi et su utiliser la force argumentative de la narration fictive. Ainsi, pour La Fontaine (...)
[...] Enfin, à terme, cette sollicitation du lecteur est hédoniste puisqu'il peut éprouver une réelle satisfaction à décrypter le message de l'auteur en transposant l'histoire dans le monde qui l'entoure (but recherché). Cet éveil de la réflexion du lecteur par un tel support doit cependant éviter un écueil majeur nécessitant de la part du concepteur plusieurs précautions. Le danger principal est d'occulter le message censé être délivré ou la réflexion recherchée chez le destinataire par une simplification excessive, une fiction grotesque (comme dans Candide où tour à tour Cunégonde, Pangloss et le fils du baron ressuscitent quand Voltaire en a besoin : cet exemple illustre le grotesque mais dans ce cas il n'a pas nui à la réflexion) ou plus simplement une histoire excessivement séduisante, aboutissant à la banalisation, la vulgarisation de l'idée à laquelle elle veut sensibiliser. [...]
[...] Après les fables, les contes philosophiques, dont Voltaire au XVIII siècle est l'auteur emblématique, sont des récits fictifs, plaisants et enlevés qui, à travers une narration anodine, représentent de véritables leçons de philosophie. Cette mission du conte philosophique est parfaitement illustrée par Candide de Voltaire (1759) où un jeune homme, Candide, à travers ses voyages, évolue, mûrit tandis qu'il perd progressivement ses illusions sur le monde. Le lecteur est gagné aux idées proposées par le texte à cause de la bonne humeur de l'ouvrage. [...]
[...] Tout d'abord, une œuvre de fiction, qu'elle soit littéraire ou cinématographique, est avant tout ludique, c'est-à-dire assimilée à un plaisir, celui que procure ce divertissement. Meilleur est l'écrivain, meilleure en sera la fiction et plus le lecteur ‘entrera' dans l'histoire, ‘participera' et ‘vivra' l'action ou s'identifiera aux personnages. C'est ainsi que La Fontaine écrivait dans Le Pouvoir des Fables Livre VIII, Fable 4 : Au moment où je fais cette moralité, Si Peau d'Âne m'était conté, J'y prendrais un plaisir extrême. [...]
[...] Les événements et les cadres narratifs étant fictifs, l'auteur peut à volonté les exagérer pour émouvoir le lecteur ou le faire rire. De même, il peut, selon la réflexion qu'il veut inciter, choisir ses personnages et les faire sympathiques (Candide dans Candide ou dangereux (Herr Schultze dans Les Cinq Cents Millions de la bégum De plus, l'auteur a la possibilité de faciliter son message en majorant une de ses caractéristiques pour rendre la démonstration plus claire, plus évidente. Les personnages sont ainsi plus caricaturaux comme Pangloss dans Candide Dans certains cas, la qualité et le style de l'écrivain, en accumulant les détails plausibles (apparence physique, profession, situation sociale), décrivent un ‘monde' presque réel qui permet au lecteur de mieux croire à l'histoire et à l'auteur d'élargir le champ socio- économique de sa dénonciation (‘généralisation') alors qu'il s'agit bien d'une œuvre fictive. [...]
[...] Ensuite, il ne faut pas que la fiction soit excessive car alors le spectateur risque de mal percevoir l'œuvre, ce qui est surtout le cas pour les drames humains vécus en temps de guerre. Enfin, il est des phénomènes de mode ou de société qui prédisposent à une réception favorable des messages délivrés et des incitations à la réflexion ; il paraît évident que si Candide avait été écrit et publié de nos jours, il n'aurait pas reçu l'accueil qui a été le sien au XVIII siècle tout comme la censure de l'époque n'aurait plus lieu d'être maintenant. [...]
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