Pour Grimal, le passage de l'épopée au roman témoigne d'une transition de société closes, quasi stables, organiquement liées à des sociétés plus ouvertes, évolutives soumises à l'effet désagrégeant mais aussi stimulant de l'individualisme grandissant, il décrit ainsi l'émergence du roman antique : « A l'homme dans la cité, homme parmi les hommes, [le roman] substitue l'homme en son destin individuel, qui est d'aimer et d'assurer, par l'amour, sa propre survie (...)
[...] Avec ces exemples tirés de l'œuvre de Sartre et de Camus, on a donc représentée l'idée d'un personnage en rupture avec le monde, rupture psychologique voire métaphysique. Le roman est donc historiquement le genre de l'individualité par opposition avec l'épopée ou le conte. Le personnage de roman est un personnage qui n'hésite pas à se révolter contre l'institution en place où à en contester les valeurs. Enfin, le XXème siècle nous a présenté le héros de roman comme connaissant une véritable rupture psychologique sinon métaphysique avec le monde. [...]
[...] Ainsi certains héros de romans semblent pleinement adhérer aux valeurs collectives et à l'Histoire en marche également. Le héros de roman peut encore se montrer comme fédérateur d'une collectivité. Plus encore, le drame du héros kafkaïen semble être justement celui de ne pouvoir sortir de son statut de fonctionnaire qui est comme l'essence de son être. Il ne peut se défaire de l'anonymat de la grande machine bureaucratique. On a alors l'idée plutôt d'une impossible rupture. En fait, le héros de roman n'est pas forcement monolithique. [...]
[...] Le drame est alors celui en quelque sorte d'une impossible rupture contrairement à ce que propose Lucien Goldmann. Ainsi pour Milan Kundera, le drame du personnage du Château, le roman de Kafka, est selon lui de ne pouvoir jamais être seul. Les deux aides envoyés par le château le suivent sans cesse. Ils assistent à son premier acte d'amour avec Frieda, assis au-dessus des amants sur le comptoir du café, et, dès ce moment-là, ils ne quittent plus leur lit De même que le personnage de La Métamorphose est un fonctionnaire et, pour l'auteur de L'Art du roman, dans le monde bureaucratique du fonctionnaire, primo, il n'y a pas d'initiative, d'invention, de liberté d'action ; il y a seulement des ordres et des règles : c'est le monde de l'obéissance. [...]
[...] Le héros de roman n'est pas toujours en conflit avec le monde. Il peut parfois au contraire se montrer comme le témoin des valeurs qui sont celle d'un milieu, d'une époque donnés. Robinson Crusoë par exemple nous présente un personnage qui reconstitue les premiers rudiments de la civilisation humaine ainsi que Rousseau, le premier, nous l'a démontré. Il prône des valeurs bourgeoises avec lesquelles il était pourtant en conflit au début du roman lorsqu'il témoigne d'abord d'un dévorant désir d'aventures et qu'il s'enfuit de chez lui malgré les conseils paternels. [...]
[...] Doit-on considérer, comme ce critique, le héros comme en rupture radicale avec le monde ou au contraire penser que le héros de roman est pleinement intégré au monde ? Dans un premier temps, il serait intéressant d'examiner les romans ou les réflexions sur le roman qui semblent abonder dans le sens du sociologue Lucien Goldmann, la façon dont le héros semble alors se présenter comme en rupture insurmontable avec le monde. Dans un deuxième temps, nous porterons notre attention sur la manière dont des œuvres ou des approches critiques nous éclairent sur l'idée d'un personnage comme d'une certaine manière intégré à la communauté, au monde. [...]
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