"La littérature est le lieu d'exploration de son propre rapport à la liberté."
Lyonel Trouillot a fait cette affirmation en désirant exprimer sa propre définition de la littérature. Il est intéressant de constater que l'exploration dont il est question est avant tout une forme de liberté, que la littérature permet d'exprimer. Or, si au contraire, nous renversons cette définition et que nous tentons de trouver le sens de l'exploration à travers la littérature, pourrions-nous parvenir à la création d'un nouveau genre littéraire ? La littérature d'exploration existe-t-elle ? Peut-on parler d'un genre lorsqu'il est question des textes d'explorateurs ? Si c'est le cas, comment pourrait-on définir ce genre ? Quels thèmes communs sont abordés et de quelles façons ?
[...] Encore d'un point de vue stylistique, il est intéressant de noter que l'auteur ne cache absolument rien dans les descriptions, et notamment lorsqu'il est probable que l'événement raconté choque le lecteur. Il y a par exemple l'épisode de torture que des indiens infligent à un de leurs ennemies capturés que Champlain décrit méticuleusement. Ainsi, nous trouvons à la page 99 "ils firent brûler ce malheureux à petit feu (...) lui arrachaient les ongles et lui mettaient du feu sur le bout des doigts et du membre...". Au contraire du théâtre, il n'existe pas de règle de bienséances dans un texte d'explorateur ; tout y est relaté de manière stoïque. Aussi, il n'est fait référence à aucun sentiment lorsque Champlain se voit offert une tête coupée par un chef indien à remettre au roi de France, où lorsqu'à chaque fête organisée pour son arrivée dans le pays, des femmes indiennes se déshabillent en son honneur (...)
[...] A la page 66, alors qu'il veut faire une description objective, avec une conclusion anthropologique, il dit paradoxalement : "Ils aident mais sont malgré tout enfantin et ne peuvent être de confiance". Enfin, le dernier sujet important abordé dans ces œuvres - et non des moindres - est le lien des explorateurs avec la mère-patrie. En ce qui concerne La Condamine, il est plus intéressant de parler de ses relations avec l'Académie des sciences. Ce dernier fait l'éloge de cette assemblée. L'auteur ne fait à aucun moment référence au fait qu'il manque de quelque chose, contrairement à Champlain, dont la relation avec la France évolue au cours du livre. [...]
[...] Concentrons nous maintenant sur les relations que nous explorateurs entretiennent avec les natifs. Avec Champlain, nous avons un très bon aperçu de l'attitude des français vis-à-vis des indigènes. Tout comme La Condamine, il utilise le mot "sauvage" lorsqu'il fait référence à eux. Cela-dit, ce mot là n'avait pas la connotation purement négative qu'elle a aujourd'hui. "Sauvage" suggère plus l'idée de la personne proche de la nature sauvage et s'oppose ainsi à la notion de "civilisé" des européens. D'ailleurs, grâce aux Essais de Montaigne[5], et au Contrat social[6] de Rousseau, on peut dégager l'idée commune du "bon sauvage" ; c'est un concept des philosophes qui explique comment les gens hors de la civilisation européenne peuvent enseigner au peuple français une meilleure façon de vivre, plus naturelle. [...]
[...] Tout d'abord, avec Samuel de Champlain, on remarque que l'auteur raconte les événements de manière descriptive. Le genre diffère alors du roman car il ne s'agit pas de fiction. Ce qui est relaté est réel, où se doit de l'être. La tonalité peut varier et peut se teinter de romanesque, comme à la page 89 et suivantes de Voyages, où l'auteur abandonne pour un temps les descriptions et se concentre sur les tactiques de guerres et le combat contre les Iroquois en général. [...]
[...] Cela-dit, il ressort parfois des descriptions assez négatives de la part de nos deux explorateurs. Dans Voyages, lorsque Champlain parle du caractère des indiens, on relève un portrait méfiant aux pages 10 et 11 : "importance de la vengeance, grands menteurs, aimables mais pas fiables". La Condamine lui, se plaint plus du comportement des indigènes lorsque ceux-ci sont un obstacle à son avancée et à ses recherches. Les deux auteurs accentuent souvent un côté positif qui est le physique des natifs-américains : ils sont forts, agiles, doués pour les activités physiques. [...]
[...] Quelles cartes reste-t-il à faire ? Il existe une réelle nostalgie vis-à-vis des voyages du passé, et l'on en vient presque à se demander si Google Earth ne met pas en fait un frein à l'exploration personnelle. [...]
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