François-Emmanuel Tirtiaux est avant tout un psychothérapeute (comme le narrateur-psychologue de la Question humaine). Se mettant en scène par l'écriture, il se veut de stimuler et d'accompagner la guérison de maladies psychiques. Le narrateur ne s'impose jamais dans la vie des personnages – cela est marqué par ce curieux point de vue narratif d'un « je » qui n'apparaît que comme « témoin » de ce qu'il voit, témoin même de ses propres réactions et sentiments (du genre « je me suis entendu dire »). Il cherche toujours à comprendre, à se placer au niveau de l'autre, et sa « vie » n'a de sens ou d'importance qu'en fonction du personnage principal vers lequel est tourné tout le récit. On a véritablement l'impression que chaque roman reprend le parcours particulier d'Emmanuel avec un de ses patients. La thérapie se fait écriture, le roman guérit concrètement un personnage fictif, prolongation peut être dans la fiction d'une personne réelle.
C'est pour cela que la matière des histoires d'Emmanuel est toujours d'une incommensurable richesse : il partage avec le lecteur son expérience de thérapeute qui nourrit la fiction, et nous fait découvrir les merveilles d'une guérison, du rétablissement. Le récit est entièrement positif et « fait du bien » à la fois au personnage fictif, à son auteur qui en tire les ficelles et au lecteur. Partager la réconciliation d'un être avec son passé, et l'aplanissement du gouffre entre le « je » (narrateur) et le « tu » (la femme) (La leçon de chant, Le vent dans la maison) – préfiguration de ce que nous verrons par après – permet de se décentrer de son propre univers, de ses préoccupations et intérêts.
[...] Emmanuel pouvait-il donner une plus belle touche finale à son roman ? Comme la Leçon de chant, le Vent dans la maison est une sorte de roman initiatique de l'« héroïne progression vers une forme de maturité : se défaire très doucement de l'image oppressante, intériorisée en elle, de la mère qui donne la mort (accouchement à fonction morbide en opposition avec vitale Ce qu'on peut dégager aussi d'après la lecture des 3 romans : l'univers romanesque de François Emmanuel prend souvent comme point de départ la mythologie (cf. [...]
[...] Le symbolique, à nouveau, permet d'avoir prise sur quelque chose qui nous échappe, de se détacher de cette charge affective insupportablement douloureuse qui forme et crée le complexe. La danse d'ailleurs, en général, permet de rejouer à l'infini le phénomène d'incorporation, d'union des corps (comme la fusion mère-foetus), PUIS de séparation (du partenaire = du bébé). Une bonne manière donc de d'« épuiser le fantasme de séparation d'Alice. Evidemment, cette évacuation ne va pas sans un travail physique épuisant (pp. 172-173). [...]
[...] Un fragment de la fin du récit (p. 192) renvoie d'ailleurs à ce tableau de l'arbre-foetus : “grand désir d'arbre, enserrer le tronc de l'arbre pour que son écorce s'imprime sur ta peau, murmure la sève obscure de la terre . Voilà donc le chemin que peut emprunter la guérison : le symbolique de l'art. C'est cette solution (la danse) que tentera d'explorer Sara. Il s'agit aussi, bien évidemment, de la faire reprendre contact avec une activité AVANT le malheur (Alice participait aux cours de danse avec Sara), la tragédie de la naissance. [...]
[...] S'agirait-il d'un rescapé de la 2e Guerre mondiale ? Il dit qu'il n'est pas juif ce qui expliquerait son ressentiment pour les entreprises déshumanisantes Il reste le point obscur du roman. Cette conclusion apparaîtra bien maigre en comparaison avec l'incroyable richesse des romans d'Emmanuel : jamais chez un tel auteur l'écriture n'avait atteint une telle force de (re)vivre les événements de fiction/ de réalité[13] (pour l'auteur) : le je narrateur à la fois est éminemment singulier et a une grande puissance implicative pour le lecteur. [...]
[...] On ne peut les trouver là où on les cherche, et on les trouve là où on ne les cherche pas. L'espace en soi recèle une problématique, est producteur de sens ; c'est l'espace contemporain abstrait et démultiplié, ouverture de tous les possibles. Le Tueur mélancolique met en scène une âme sensible L. Gründ, qui ne parvient pas à s'habituer à la vie et surtout à tuer les gens Il se fait engager par l'agence Stukowski qui comme secrétaire particulier, loin de savoir du genre de besogne qu'on voudra lui faire effectuer. [...]
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