Au Moyen Age, nombreux sont les livres qui mettent en scène des topoï, c'est-à-dire des passages obligés, conduisant souvent à des morceaux de bravoure où l'auteur cherche à montrer sa virtuosité. Ainsi en est-il de la figure de Fortune, divinité païenne qui incarnait la précarité de la vie humaine. Le christianisme recycle ce personnage en lui donnant, contrairement à l'antiquité, une apparence exclusivement mauvaise. « Floire et Blanchefleur », conte du 12°s qui met en scène deux jeunes amants séparés par le destin, n'échappe pas à cette règle. En effet, dans cet extrait Fortune apparaît bien comme une folle « pour qui tous les hommes se valent » (Pacuvius, 2° av J.C). Alors que les amants se sont enfin retrouvés, et qu'ils nagent dans un âge d'or, elle entreprend de les séparer. Mais cette figure conventionnelle est aussi l'occasion pour l'auteur de dénoncer une société marquée par le féodalisme bref, un monde où la hiérarchie sociale interdit toute promotion.
[...] Floire et Blanchefleur conte du 12°s qui met en scène deux jeunes amants séparés par le destin, n'échappe pas à cette règle. En effet, dans cet extrait Fortune apparaît bien comme une folle pour qui tous les hommes se valent (Pacuvius, av J.C). Alors que les amants se sont enfin retrouvés, et qu'ils nagent dans un âge d'or, elle entreprend de les séparer. Mais cette figure conventionnelle est aussi l'occasion pour l'auteur de dénoncer une société marquée par le féodalisme bref, un monde où la hiérarchie sociale interdit toute promotion. [...]
[...] L'évocation de cette déesse n'est donc pas arbitraire : elle est motivée par le récit et s'inscrit dans une tension dont le centre névralgique n'est rien d'autre que la prochaine séparation des amants. L'originalité de l'auteur apparaît en fait dès le v 2527. Il ne faut pas oublier que le conte est dédié à Marie de champagne, une noble. Or, l'auteur écrit : au fol prové/done roiame u grant conté Comment ne pas y voir une subversion ? Sous le couvert d'une pause lyrique qui nierait tout cadre spatio-temporel, le conteur se réfère finalement à une époque, la sienne, marquée par le féodalisme. Floire lui-même ne deviendra-t-il pas roi ? [...]
[...] Très vite pourtant, cette image fait place à une autre, et Fortune est l'occasion de fustiger, dans un cadre en apparence sans espace ni temps, une société hiérarchisée et injuste. Il ne faudrait cependant pas aller jusqu'à y voir un message politique, comme l'on se plaît trop souvent à le noter, à propos de textes littéraires. Car nous lisons un conte, et c'est le plaisir de l'auditeur qui prévaut. Ce dernier, justement, fait l'objet d'une attention importante : des effets sont ménagés tout au long de l'extrait, tantôt pour l'amener à espérer, tant pour qu'il doute. [...]
[...] Répétons- le : il ne s'agit pas d'un simple morceau de bravoure. Ce passage joue un rôle important dans l'économie du texte parce qu'il est bien intégré. Ainsi assez rapidement les amants sont évoqués : ceus A la généralisation précédente : or fait plourer, et or fait rire s'associe alors un exemple, celui des enfants. Ce passage conduit à une meilleure compréhension, pour l'auditeur, du désarroi de ces derniers, et donc à une plus grande écoute. De même, fist primes joieus et liès fait écho aux premiers vers de l'extrait dont le but était de rendre difficile l'apparition de fortune. [...]
[...] La reprise de la conjonction et en tête de vers permet de les lier pour mieux les opposer. Ceci dans le but de rappeler l'excellence de Floire : il connaîtra un sort presque similaire à la bonne clergie. L'auteur se distingue ici d'une représentation antique de Fortune, sa jumelle, ou deuxième versant : Némésis-Adriasta (juste vengeance). Cette dernière distribue ses faveurs à ceux qui méprisent les biens. Bref, elle récompense celui qui se désintéresse d'elle. Or, c'est ici les truans qui triomphent. [...]
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