Les Fleurs bleues de Raymond Queneau articulent les histoires de deux personnages principaux, le duc d'Auge et Cidrolin. A l'inverse du premier, le second est caractérisé par son immobilité, et son inactivité : ses contacts sociaux se limitent à des passants et des voyageurs, et les dialogues avec sa fille sont restreints, si bien qu'il se parle parfois à lui même. D'autre part, au chapitre IV a été introduit, par une digression hors du schéma duc d'Auge – Cidrolin, le personnage de l'ératépiste, dont Lamélie est vraisemblablement amoureuse ; cette scène était l'occasion d'une parodie de baiser. Au chapitre VI, l'ératépiste refait son apparition et rencontre Cidrolin pour la première fois, afin de demander Lamélie en mariage. Comment cette scène clé dans la progression du récit, et faisant office d'action dans la vie de Cidrolin, est-elle détournée par un traitement comique, porteur néanmoins d'une réflexion sur les rapports humains ? Le dialogue entre l'ératépiste et Cidrolin est en effet l'occasion d'une parodie de demande en mariage portée successivement par l'ératépiste, Cidrolin, et Lamélie, qui compense une réflexion pessimiste sur la situation économique, les rapports humains, et les moyens pour les penser ; le paradoxe de cet enchevêtrement des propos est rendu visible à l'échelle de la langue, qui juxtapose les registres et les inventions quenaliennes, pour créer en outre à la fois du comique et de la poésie.
[...] La réflexion se complète par les sciences dites objectives que sont les mathématiques, mais une mauvaise connaissance et lecture source d'erreur ; ces sciences ne rendent pas compte en elles-mêmes de certains paradoxes : un événement qui a peu de chances de se produire peut se produire quand même. Queneau, qui maîtrisait les mathématiques, attire la lecture sur la faillibilité majeure du système de pensée conventionnel / populaire. Le paradoxe entre le comique et le pessimisme est contenu formellement dans la langue qui, en contribuant elle aussi au comique, insuffle de la légèreté dans le propos. Le dialogue entre Cidrolin et l'ératépiste se fait principalement sur un mode familier, voire populaire, qu'éclairent quelques néologismes ou vocabulaire soutenu. [...]
[...] "Les Fleurs Bleues", R. Queneau : commentaire composé d'un extrait du chapitre VI Les Fleurs bleues de Raymond Queneau articulent les histoires de deux personnages principaux, le duc d'Auge et Cidrolin. A l'inverse du premier, le second est caractérisé par son immobilité, et son inactivité : ses contacts sociaux se limitent à des passants et des voyageurs, et les dialogues avec sa fille sont restreints, si bien qu'il se parle parfois à lui-même. D'autre part, au chapitre IV a été introduit, par une digression hors du schéma duc d'Auge Cidrolin, le personnage de l'ératépiste, dont Lamélie est vraisemblablement amoureuse ; cette scène était l'occasion d'une parodie de baiser. [...]
[...] Le dialogue entre Cidrolin et l'ératépiste, par le biais de la parodie du schéma consacré de la demande en mariage, fait intervenir le comique de situation. Toutes les raisons classiques d'une demande en mariage sont éclipsées au profit de raisons subalternes qui déconstruisent le romantisme possible de la démarche : pourquoi pas après tout semble dénoter l'absence de motivation tout d'abord, mais le jeune homme expose ensuite d'autres arguments, la possibilité que Lamélie soit enceinte et le fait qu'il veuille bien l'assumer. [...]
[...] Autre exemple de collision des registres : manque de se flanquer dans la fange où fange est du registre soutenu voire scientifique (très précis) et la tournure syntaxique et lexicale est populaire. Toutes ces collisions et ces entrecroisements sont au service de la peinture du caractère de l'ératépiste, mais bousculent également la lecture et produisent la poésie du texte qui dissimule la gravité de la réflexion pessimiste de Queneau, tout en portant le caractère comique du texte. Ce passage est un tournant de l'histoire car le mariage de Lamélie permet l'arrivée de Lalix. [...]
[...] Le problème de la connaissance et de la reconnaissance de l'autre semble traverser le texte : l'ératépiste et son air soupçonneux du début, lorsqu'il ne maîtrise pas l'identité de Cidrolin, témoigne de la défiance innée envers ceux que l'on ne connaît pas, vision fort pessimiste des rencontres, mais, puisque l'identité est incertaine, comme le soulignent les extraits suivants : Ton futur à ce qu'il paraît puis Je le connais pas (Lamélie), et enfin je mdemande si . je mdemande . Enfin quoi, elle s'appelle bien Lamélie ? (Ératépiste), cette défiance pourrait être amenée à n'être pas dépassée. [...]
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