Dissertation sur l'oeuvre médiévale de Guillaume de Lorris Le roman de la Rose. Oeuvre allégorique analysée à partir de cette citation de Daniel Poirion : « Dans le secret de la fine amor, dans cet espace fermé au monde vulgaire de la laideur, mais encore exclu de la jouissance suprême, la poésie allégorique mêle à l'exemplarité de l'ordre, des commandements, la singularité d'une vie, d'un rêve de jouissance, d'un désir angoissé : finesse du fin amant qui fait varier la géométrie du maître d'oeuvre. ».
[...] Ce n'est qu'à l'issue de cette étape de purification que le Héros pourra devenir, enfin, un parfait fin amant, capable de renoncer à l'objet même de sa quête pour que celle-ci se poursuive inlassablement. En outre, ce roman d'apprentissage sert de matière à un traité didactique. L'aventure du Héros constitue un bréviaire de l'art d'aimer. Elle donne ainsi à l'œuvre sa dimension d'« exemplarité C'est pourquoi Guillaume nous dit dans son prologue que la matière du Roman de la Rose est bone et noive (v.39), qu'elle est novelle (v.2065). [...]
[...] Cependant, l'œuvre de Guillaume diffère parfois de la notion de courtoisie traditionnelle. Le précepte de discrétion absolue, par exemple, n'est pas respecté par l'Amant, qui prend Ami pour confident. De plus, contrairement à Chrétien de Troyes, qui, dans ses premiers romans, tente d'accorder l'idéal courtois avec les règles de la religion et de la société en mettant en scène des héros unis par les liens du mariage, la quête du Héros du Roman de la Rose se poursuit indéfiniment. Surtout, celui- ci se soumet entièrement à l'Amour, et non pas, comme Yvain dans Le Chevalier au lion, à la femme aimée. [...]
[...] Pour transformer ce jeune homme sauvage en fin amant, deux enseignements vont être nécessaires. Le premier sera celui, magistral, du dieu d'Amour, véritable maître de courtoisie pour le Héros. Le second, plus difficile encore, sera celui de l'expérience, que le Héros acquerra peu à peu. C'est pourquoi, sans doute, Daniel Poirion nous parle du secret de la fine amor car la conduite du fin amant idéal n'est révélée qu'étape après étape. Au départ, le Héros affirmait : Il n'est nus graindre parevis / D'avoir amie a son devis (v. [...]
[...] Il se développe ensuite dans un milieu aristocratique soucieux de se différencier tant des vilains et des clercs que de la riche bourgeoisie montante. En tant qu'art de vivre, la courtoisie prône les bonnes manières en société, la maîtrise du langage et de la culture, autant de valeurs qui s'apparentent à celles qui sont enseignées au Héros par le dieu d'Amour. L'idéal courtois est aussi une éthique, qui s'organise autour de la générosité et du respect d'autrui, et c'est ce que notre Héros va être amené à découvrir. [...]
[...] Toutefois, on remarque que ce thème connaît, sous la plume de Guillaume de Lorris, une promotion littéraire importante. En effet, au-delà du sens littéral de l'œuvre se déploie toute la richesse symbolique de l'allégorie. Or, celle- ci constitue l'une des formes littéraires les plus nobles et n'était jusque là présente que dans des ouvrages fortement ambitieux (la Psychomachie du poète chrétien Prudence, par exemple), dédiés le plus souvent à l'enseignement des sciences et de la religion. Aussi, on peut se demander dans quel but Guillaume a introduit dans son œuvre une dimension allégorique. [...]
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