Hérodiade, mère de Salomé, est celle qui commande à sa fille d'« envoûter » le roi pour obtenir la tête de Saint Jean-Baptiste ; ce passage clé de l'Evangile, qui préfigure le sacrifice de Jésus-Christ, sera un thème récurrent dans l'art du XIXème siècle. Si Flaubert en fait une histoire avant tout politique et non plus religieuse, Delaroche, lui, accentue sur la figure d'Hérodiade en femme fatale. Quel est le lien entre le traitement littéraire, d'une part, et pictural, d'autre part, de ce même personnage féminin ? N'est-ce pas la figure de la femme vénale et diabolique, elle aussi impliquée dans le jeu des pouvoirs?
[...] Or c'est peu avant Hérodiade que Delaroche s'est rendu en Italie. Il est donc tout imprégné de motifs potentiellement orientaux pour peindre ce tableau, notamment celui de la lumière méditerranéenne. Le lien de Delaroche à l'orientalisme se fait aussi par un autre biais : à Rome, quelques années plus tôt, il a rencontré Horace Vernet, peintre orientaliste (dont plusieurs toiles sont à Nantes), dont il épouser la fille Louise en 1835. Il est donc de fait lié à un univers pictural orientaliste. [...]
[...] C'est à cause de ce meurtre qu'elle est maudite et condamnée à suivre jusqu'au jugement dernier, comme un spectre errant, la chasse nocturne des esprit. Elle porte toujours dans ses mains le plat où se trouve la tête de Jean- Baptiste et elle la baise ; - oui, elle baise avec ferveur cette tête morte. Car elle aimait jadis le prophète. La Bible ne le dit pas, - mais le peuple a gardé la mémoire des sanglantes amours d'Hérodiade. Autrement, le désir de cette dame serait inexplicable. [...]
[...] D'ailleurs, pourquoi sa guerre contre elle ? Quel intérêt le poussait ? Ses discours, criés à des foules, s'étaient répandus, circulaient ; elle les entendait partout, ils emplissaient l'air. Contre des légions elle aurait eu de la bravoure. Mais cette force plus pernicieuse que les glaives, et qu'on ne pouvait saisir, était stupéfiante ; et elle parcourait la terrasse, blêmie par sa colère, manquant de mots pour exprimer ce qui l'étouffait. Ce qui intéresse en fait Flaubert dans la figure d'Hérodias, c'est justement sa quête du pouvoir et la manière dont la situation va se retourner à son avantage. [...]
[...] Schwob), Plan-de-la-Tour éd. d'Aujourd'hui, Les Introuvables Etudes littéraires ou esthétiques Praz, Mario La chair, la mort et le diable dans la littérature du XIXème s. Le romantisme noir, Denoël Burke, Edmund Recherche philosophique sur l'origine de nos idées du sublime et du beau (1757), Vrin Etudes en histoire de l'art Allemand-Cosneau, Claude (sous la direction de) Paul Delaroche, Un peintre dans l'histoire, édition de la Réunion des Musées Nationaux Dottin-Orsini, Mireille Salomé, éd. Autrement Penel, Christine Les Orientalistes, éd. Hazan Ziff, N. [...]
[...] Ce regard est fascinant parce qu'il est ambiguë, et cette ambiguïté n'est pas un trait isolé dans l'œuvre de Delaroche. La mort est en effet un thème récurrent dans son œuvre (qui se composé d'une part de tableaux historiques, d'autre part de scènes de familiales et de portraits puis enfin de scènes bibliques) : 26 de ses tableaux représentent une mort violente, un assassinat, une exécution, ou l'attente d'une exécution imminente. Lui-même se rend compte de cette attraction morbide pour le sujet dans sa correspondance, en s'exclamant encore une mort ! à un nouveau projet y ayant trait. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture