E.T.A Hoffmann, le romancier, le dessinateur, et le compositeur, alors auteur de plusieurs opéras : il est surprenant de constater combien cet artiste complet, alors encore méconnu par ses compatriotes en 1822, année où celui-ci décède dans une misère totale et dans une parfaite indifférence, connut un immense succès en France une décennie plus tard grâce aux traductions d'un journaliste ambitieux qui rendra ses titres de noblesse à ce conteur exalté qu'était le poète allemand. Le succès des nombreuses versions françaises, qui vont succéder à celles de Loève-Veimars, du reste, résulteront sur une immense notoriété de Hoffmann, alors devenu une figure de la modernité, voire le précurseur du romantisme français à venir. A travers notre étude, nous verrons comment la réception de celui que nomme Pierre-George Castex dans son ouvrage, Le conte fantastique en France de Nodier à Maupassant, « l'initiateur allemand », en France, a débouché sur l'élaboration du mythe romantique d'Hoffmann, ou plutôt sur une mythification du génie incompris, du visionnaire, suivant une légende biographique qui servait d'explication à l'excentricité de ses textes présentés par de nombreux traducteurs. Cette mythification du poète était d'autant plus conséquente puisqu'elle a ainsi résulté sur la création d'un personnage à la fois romanesque et scénique.
[...] Il venait de reconnaître le médecin de l'Opéra ( ) ah ! c'est bien vous, jeune homme, dit-il, c'est bien d'avoir racheté ce corps afin qu'il ne pourrisse pas dans une fosse commune Très bien ! jeune homme, très bien ! -Ce corps murmura Hoffmann, racheté la fosse commune Que dites-vous là ? Mon Dieu ! [...]
[...] Cette abstraction de la connaissance réelle de l'écrivain qu'était E.T.A Hoffmann n'a rien d'étonnant : après la parution des Histoires Extraordinaires en 1855, alors traduites par Charles Baudelaire, une autre figure du récit fantastique, Allan Edgar Poe, connaîtra un sort similaire. Celui-ci devra son génie à l'opium autant que le premier à l'alcool et à la folie. À vrai dire, il n'est pas étonnant, si l'on observe les divers scénarios auctoriaux conçus durant l'ère romantique, de constater que la promotion d'un écrivain singulier, d'une figure du mythe ou du fantasme, fut souvent à la base d'un jeu d'influences dans l'écriture journalistique, dans la critique littéraire, et d'effluences à travers la littérature en cours. [...]
[...] La découverte de l'initiateur allemand du genre fantastique Vie et œuvre de Ernst Théodore Amadeus Hoffmann Si notre étude ne porte nullement sur l'œuvre ou de la vie de l'écrivain elle-même, la carrière de celui-ci étant très riche et ses biographies nombreuses, nous nous efforcerons néanmoins en ce qui concerne les représentations de la mélancolie à travers la mythification du poète, de donner au lecteur les grandes lignes de la carrière de celui-ci, en évoquant au même titre que l'auteur, l'homme et sa vie. [...]
[...] À la façon de Coppélius avec un Nathanaël , le médecin de l'opéra va totalement bouleverser la vie d'Hoffmann ; c'est tout d'abord par lui que le jeune poète fait la connaissance d'Arsène, beauté aussi insaisissable que muette avec laquelle le fantastique docteur est étrangement lié ( c'est en effet, avant ou après chaque rencontre entre les deux amants, que ce personnage apparaît), c'est aussi par lui que Hoffmann s'éloigne peu à peu de la réalité en cultivant son désir ardent pour la danseuse ( notons par exemple cet épisode du chapitre 10, où Hoffmann retourne à l'opéra et découvre, effaré, un décor, un lieu totalement différend de ce qu'il avait vu l'avant- veille). L'intrusion du surnaturel atteint son paroxysme, lorsqu'au chapitre 16, le médecin intervient soudainement à l'hôtel où Hoffmann s'est réfugié avec Arsène, pour lui apprendre que celui-ci a en fait passé la nuit avec un cadavre : Un petit homme noir montait justement à la même minute l'escalier que descendait Hoffmann. Il leva la tête : Hoffmann jeta un cri. [...]
[...] p.33 La cantatrice Antonia est un emprunt direct au Conseiller Crespel de E.T.A Hoffmann ; comme son modèle, le personnage de Dumas possède une voix céleste et est voué à une fin prématurée. Ibid. p.122-123 Le livret de Barbier et de Carré laisse entrevoir tout de même certains liens intertextuels avec d'autres textes d'Hoffmann : notons, par exemple, la référence au Petit Zacharie dans le prologue avec le chant Kleinzach l'insertion du nain Pitichinaccio dans l'acte IV, personnage directement sorti du conte Salvator Rosa, ainsi que l'allusion à l'opéra de Mozart, Don Juan, chef-d'œuvre auquel E.T.A Hoffmann consacrera un conte. [...]
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