La citation que nous devons étudier est celle de Jean-Claude Aubailly, critique littéraire, passionné par les écrits du Moyen Âge, qui nous donne ici son point de vue sur la farce. Ainsi, dans Le théâtre profane et comique, il tente d'attribuer à ce genre une définition. C'est pourquoi Jean-Claude Aubailly, commence sa phrase par « [La] farce est ». Il s'interroge sur une question, sur laquelle il est, semble-t-il primordial de s'arrêter : qu'est-ce qu'une farce ? Cependant, en enfermant le genre farcesque dans cette définition, n'est-ce-pas trop simpliste pour un genre qui a connu une telle expansion au Moyen Âge ? En lisant cette citation nous retrouvons encore cette idée de « simple divertissement », il insiste sur ce groupe de mots par l'adjectif « simple » qui renforce cette idée de bassesse, de comique vulgaire, destiné au peuple peu cultivé. Cet adjectif pourrait être presque méprisant pour le genre. Selon lui, c'est un genre dépourvu de tout intérêt et d'intrigue, de finesse et d'observation...
Il emploie pour décrire cette forme de comique l'expression de « comique immédiat » Ainsi, l'idée de « comique immédiat » résonne avec l'utilisation de l'adjectif « franc » qui montre que pour Aubailly, la farce ne cache rien, qu'elle est claire, sans arrière-pensée. Cependant, même si le genre farcesque n'est pas équivoque, est-il pour autant dénué de toute finesse et de désir d'enseignement ? Mais, après ces constats négatifs, nous pourrions peut être voir une sorte de 'faille' dans le propos d'Aubailly, tout d'abord parce qu'il utilise le verbe « viser », cela sous-entendrait alors, que la farce possède un « objectif », comme un but qu'elle désire atteindre. Elle ne serait plus un genre si « simple » qu'il y paraissait lors de la première lecture de cette citation. Elle renfermerait peut être une essence plus raffinée qu'un vulgaire « comique immédiat ». De plus, Aubailly nous expose son propos en disant que la farce « vise surtout le comique immédiat, franc et bonhomme ». Arrêtons-nous quelques instants sur l'adverbe « surtout » employé ici... Celui-ci est important car il apporte une nuance à son jugement : l'auteur n'a pas été catégorique en mettant « entièrement » ou une tournure restrictive comme « ne vise que... ». En insérant l'adverbe « surtout », il laisse ouverte la porte des opinions et des interprétations des farces. Existe-t-il d'autres objectifs que la farce souhaiterait atteindre ? Ceux-ci seraient-ils plus culturels et raisonnés ?
En observant cette nuance, nous comprenons pourquoi il existe autant de divergences d'opinions concernant ce genre (...)
[...] Ainsi, dans un deuxième temps, il apparait une sorte de brèche dans le propos de Jean-Claude Aubailly dans laquelle nous allons essayer de nous frayer pour défendre ce genre farcesque. Il nous est difficile d'apprécier ce genre de théâtre actuellement puisqu'il ne nous est pas représenté. C'est pourquoi, Aubailly essaye ici d'établir un lien logique entre la farce et ce qui plaît au spectateur de l'époque. Selon lui, elle s'adresse aux sens : Nous pouvons donc voir ici, que l'auteur ne parle ni de raison, ni de conscience mais de sens Il nous est possible de les énumérer en expliquant succinctement leur rôle au sein d'une farce : Il y a tout d'abord, la vue qui joue un rôle dominant puisque la farce est souvent caractérisée par un comique gestuel et de situation. [...]
[...] Certains critiques parlaient même de la farce en ces termes la machine à rire (référence à Bernadette Rey-Flaud). Si nous analysons en quelques mots cette expression, nous découvrons (une fois encore) une critique négative puisque le rire ne serait plus naturel mais comme mécanisé par ceux qui le provoquent. Ensuite, comme le sous-entend Jean-Claude Aubailly, ce genre n'avait pas un but réellement culturel parce que les hommes du Moyen Âge qui allaient regarder ces spectacles ne possédaient pas des attentes réfléchies mais plutôt une attente commune superficielle : rire. [...]
[...] Nous retrouvons beaucoup de scènes où les acteurs s'enduisaient d'excréments ou se retrouvaient dans un lieu réservés à ce besoin naturel pour l'homme les «cabinets Enfin, l'autre versant du vulgaire était aussi contenu dans les jeux du bas corporel. Certains acteurs baissaient leurs pantalons pour exprimer très clairement et crument une pensée, d'autres avaient recours aux mimes grivois pour montrer une situation sans utiliser la parole Tout ce vulgaire nous souligne le décalage qu'il existe entre le comique dit médiéval et le comique moderne. Cependant, la farce ne peut être vue que par ses aspects négatifs et doit être perçue aussi par son caractère de nouveauté et de fantaisie théâtrale. [...]
[...] Il existe une vulgarité dans le genre farcesque tout d'abord parce que celui-ci est profane, c'est-à-dire qu'il ne possède aucune connotation religieuse et peut se permettre ainsi d'invoquer (par exemple) des saints ou saintes : dans la farce du Cuvier : LA MERE : Non ? Pourquoy ? [Par] saincte Marie, Pensez-vous, se elle vous chastie Et corrige en temps et en lieu, Que ce soit par mal ? [ ] Il s'agit donc d'un vocable grossier vis-à-vis de la religion mais, cela peut être remarqué aussi lors des dialogues entre les personnages eux- mêmes. Par exemple, dans la farce du Chaudronnier, le mari et la femme se traitent mutuellement de Not' truie ! (qui est traduit par Truie ! [...]
[...] Selon Jean Dufournet, le propre de la farce est de mettre en évidence les ressources et la force d'un langage qui crée et anime un monde fictif (sur la farce de Maître Pathelin, collection Unichamp, 1986.) Le langage y est employé comme source première de comique en faisant jaillir une richesse verbale incroyable qui donnera la base à bien des dramaturges ! Il est tout d'abord utilisé pour attirer l'attention du spectateur. Evidemment il se caractérise au début d'une farce par sa grossièreté ou nous pourrions dire par sa vulgarité, par exemple, la farce Le pourpoint rétréci (farce appartenant au recueil de Florence) commence par : RICHARD : Sang bieu, es-tu déjà levé ? [...]
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