La phrase complète d'André Gide extraite des Nourritures Terrestres est « Familles, je vous hais ! Foyers clos ; portes refermées ; possessions jalouses du bonheur. » Il exprime là une abomination pour la famille qui permet pourtant la « socialisation primaire » absolument nécessaire au développement de l'enfant. Alors pourquoi ce refus ? En quoi le cri de Gide a-t-il une résonance encore aujourd'hui ? En quoi la famille a-t-elle été remise en cause ? N'y a-t-il pas également une volonté de retourner à cette première instance de socialisation ? Pourquoi la famille ?
A l'origine le terme vient de famulus qui signifie serviteur: c'était donc l'ensemble des serviteurs ou des esclaves vivants sous un toit. Par extension la famille a englobé tous ceux qui vivaient sous un toit et qui étaient soumis au père de famille. Aussi, dès l'origine, la famille était-elle un terme à connotation péjorative. La famille désigne donc un ensemble de personnes unies par des liens de parenté. Aujourd'hui, la famille, qu'elle soit « nucléaire » (c'est-à-dire juste les parents et les enfants) ou « élargie », est soumise à toutes sortes d'évolutions comme la banalisation du divorce (en France un mariage sur trois fini en divorce, en Île de France, un sur deux) qui tendent à la remettre en cause.
Ainsi, à travers la phrase de Gide, on va voir en quoi cette remise en cause est légitime mais aussi pourquoi, finalement, on se retourne très souvent vers cette instance de « socialisation primaire ».
[...] La provocation d'André Gide Familles, je vous hais ! qui eut beaucoup de succès dans les années 1960 est remplacée aujourd'hui par la formule : Familles, vous nous manquez . On ressent un manque notoire de la famille qui prouve que la famille, loin d'être haïe, reste aimée et nécessaire à la société. C'est pourquoi, en cette période de violences urbaines, beaucoup remettent en cause les familles qui n'ont pas su éduquer leurs enfants. Ainsi, bien qu'il soit tentant d'adhérer à la formule de Gide car on est bien conscient que les troubles, les névroses des adultes proviennent souvent de l'enfance, la famille reste néanmoins la seule instance capable de donner aux enfants une socialisation primaire qui sera la base essentielle pour leur vie d'adulte. [...]
[...] Par exemple, si une personne commet un crime et si elle le confie à ses parents, il y a de fortes chances pour que les parents ne le dénoncent pas. La justice est donc bien compromise. La famille cherche à tout prix à protéger ses membres même si cette protection est injuste ou peut aboutir à une situation inégalitaire. C'est bien ce que dit Marguerite Duras à son fils. Elle lui dit que l'amour maternel est ce qu'il y a de pire au monde car, quoique fasse son enfant, elle l'aimera toujours. [...]
[...] Le climat familial est surchargé d'affectivité. Contre le monde extérieur, l'enfant peut se réfugier dans la famille, mais de la famille elle-même il n'y a pas d'échappatoire possible, sauf aux dépens d'un déchirement traumatisant que personne ne peut se permettre dans les premières années. En montrant la famille comme un cocon qui peut être étouffant, Gide montre là aussi en quoi elle est critiquable. C'est l'idée selon laquelle l'éducation que l'on reçoit n'est pas du tout épanouissante. Après avoir été un cocon indispensable, la famille devient un étouffoir, un lieu où s'amplifient toutes sortes de conflits, un lieu dont on serait prisonnier surtout à l'adolescence, parfois toute la vie. [...]
[...] Si la famille ne crée pas la première barrière à repousser, l'enfant n'aura aucune expérience de ces barrières que la société va lui présenter plus tard. Voilà donc pourquoi la famille malgré toutes ses imperfections a encore un rôle à jouer aujourd'hui. Il est nécessaire de la critiquer pour veiller à ce qu'elle se perfectionne mais il ne faut oublier que c'est grâce à elle qu'une société est possible. Platon dit bien dans la République que la base de la Cité est la famille. D'où la nécessité de sa revalorisation et du besoin grandissant de l'instance familiale qui commence à faire sérieusement défaut. [...]
[...] Familles, je vous hais Gide La phrase complète d'André Gide extraite des Nourritures Terrestres est Familles, je vous hais ! Foyers clos ; portes refermées ; possessions jalouses du bonheur. Il exprime là une abomination pour la famille qui permet pourtant la socialisation primaire absolument nécessaire au développement de l'enfant. Alors pourquoi ce refus ? En quoi le cri de Gide a-t-il une résonance encore aujourd'hui ? En quoi la famille a-t-elle été remise en cause ? N'y a-t-il pas également une volonté de retourner à cette première instance de socialisation ? Pourquoi la famille ? [...]
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