Un apologue est un court récit chargé d'illustrer une thèse explicite. Ce qui est exactement la définition d'une fable. Celles de La Fontaine sont donc des apologues. Il le dit lui-même : « Nous voyons que la vérité a parlé aux hommes par paraboles, et la parabole est-elle autre chose que l'apologue, c'est-à-dire un exemple fabuleux, et qui s'insinue avec d'autant plus de facilité et d'effet qu'il est plus commun et plus familier ? L'apologue est composé de deux parties, dont on peut appeler l'une le corps, l'autre l'âme. Le corps est la fable, l'âme, la moralité. » Mais plus c'est beau et moins simple.
La fable est un genre double : elle appartient en même temps au grand genre du récit –conte, fabliau, etc.) et à celui de la littérature d'idées (aphorisme, maxime, proverbe). Or ces deux genres, de même que l'huile et l'eau, éprouvent quelque difficulté à se mélanger. En effet, le récit suppose des personnages bien identifiés, la morale parle pour l'humanité entière, le récit a un début et une fin, la morale est intemporelle. Esope et Phèdre résolvaient cette difficulté en sacrifiant le récit à l'idée : il devenait un simple exemple sans intérêt en soi, sans valeur autre que celle d'illustration de la moralité.
Le projet de La Fontaine est très différent : il s'agit non pas de soumettre le récit à l'idée qu'il est censé illustrer, mais de jouer sur la tension entre les deux genres pour donner une force nouvelle à la fable. Nous étudierons tout d'abord l'art du récit chez La Fontaine (I), ensuite nous verrons quelles morales il y enseigne dans ses fables (II).
[...] La Fontaine est plus un immoraliste qu'un moraliste. De plus, si la morale est intemporelle, c'est loin d'être toujours le cas chez La Fontaine : nombreuses sont les allusions aux faits d'époque. Les deux chèvres qui refusent de se céder le passage rappellent aussi bien un fait divers de l'époque (deux dames nobles restèrent bloquées des heures parce qu'elles ne voulurent pas reculer pour laisser passer l'autre, que les négociations entre le roi d'Espagne et Louis XIV). Ce dernier est souvent bien évoqué sous la figure du lion injuste et cruel, et c'est sûrement à lui (et à Nicolas Fouquet) que pense le fabuliste quand il écrit dans Le Berger et le Roi que leur faveur est glissante Il est donc un témoin de son temps tout autant que de la vérité intemporelle. [...]
[...] Conclusion On pourrait dire que La Fontaine met en boucle récit et morale. Après le récit, on doit relire la morale qui vous fait revoir le récit d'un autre œil, et l'on s'aperçoit alors bien souvent que ce dernier porte une/des morale(s) implicite(s) bien différente(s) et parfois opposée(s) à la moralité affichée. Refusant de résoudre la contradiction entre les deux, La Fontaine démultiplie l'une par l'autre et invente un genre nouveau. Bibliographie indicative L'essai, le dialogue et l'apologue. D'Aude Lemeunier, aux éditions Hatier Apologue : recueil de textes : livret pédagogique. [...]
[...] Les fables de La Fontaine sont-elles des apologues ? Un apologue est un court récit chargé d'illustrer une thèse explicite. Ce qui est exactement la définition d'une fable. Celles de La Fontaine sont donc des apologues. Il le dit lui-même : Nous voyons que la vérité a parlé aux hommes par paraboles, et la parabole est-elle autre chose que l'apologue, c'est-à-dire un exemple fabuleux, et qui s'insinue avec d'autant plus de facilité et d'effet qu'il est plus commun et plus familier ? [...]
[...] On a pu aller jusqu'à dire que La Fontaine est un dramaturge tout autant qu'un narrateur et qu'il a écrit de véritables comédies comme des tragédies Les animaux malades de la peste VII ; 1). En tout cas, il est un poète, il n'est que de voir la manière dont sa versification soutient charpente le récit : - mise en valeur des mots essentiels par la diérèse ambition - emploi de l'enjambement pour créer un micro-suspense - déséquilibre réalisé par l'emploi d'un vers impair 14) II) les morales enseignées Les morales de La Fontaine sont presque toujours explicites. [...]
[...] Le projet de La Fontaine est très différent : il s'agit non pas de soumettre le récit à l'idée qu'il est censé illustrer, mais de jouer sur la tension entre les deux genres pour donner une force nouvelle à la fable. Il a donc développé l'art du récit, en même temps qu'il lui a donné une valeur souvent plus philosophique que purement morale. En somme chez lui, l'apologue est un mélange instable (Jean-Michel Messiaen), toujours au bord du déséquilibre. Nous étudierons tout d'abord l'art du récit chez La Fontaine ensuite nous verrons quelles morales il y enseigne dans ses fables (II). [...]
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