C'est après une jeunesse parsemée d'intrigues vouées à l'échec que le duc de La Rochefoucauld se consacre à l'écriture. Il est rapidement reconnu comme grand philosophe et moraliste grâce à ses Réflexions diverses publiées en 1665 avec les Maximes. Fruits d'une expérience difficile, ses observations sur l'être humain, la société et le pouvoir, sont empreintes de « pessimisme moral » ainsi que l'indique le jugement : « Les exemples sont des guides qui nous égarent souvent et nous sommes si remplis de fausseté que nous ne nous en servons pas moins pour nous éloigner du chemin de la vertu que pour le suivre. »
Il s'agit ici de condamner les figures héroïques données comme modèles. Pour La Rochefoucauld, l'apparente vertu de leurs actes qu'il appelle « faussetés déguisées » serait due au hasard et non au mérite, ce qui nous induirait en erreur. De plus, selon une vision augustinienne, la nature corrompue de l'homme depuis le péché d'Adam l'aurait détourné de la charité, seul chemin de la vertu au profit de l'amour propre, cause de l'orgueil et la concupiscence. Aussi le moraliste nie-t-il notre volonté d'utiliser l'exemple à des fins morales. Mais l'exemple, dans notre corpus, est-il toujours un modèle conçu selon ces critères ? Sa mise en forme n'a-t-elle pas pour but premier d'éviter les pièges de l'interprétation ? D'autre part, la vertu se résume-t-elle à cette unique conception ?
[...] Tel est d'ailleurs le cas du récit, notamment à cause de la mise en intrigue qui sert le divertissement en respectant la règle de la vraisemblance. Si l'abbé de Saint Réal a pour but d'expliquer avec Dom Carlos, l'Histoire comme conséquence des passions, il doit selon cette règle, opposer ses représentations du mal à un idéal du bien. Aussi les personnages de Dom Carlos et Elisabeth sont-ils consacrés par l'auteur comme un prince magnanime et la plus belle et plus vertueuse princesse qui fut jamais Mais ce procédé engage définitivement le lecteur à ne pas douter de ces exemples présentés comme des figures héroïques alors même que leur mérite repose sur la doxa d'une grandeur donnée par la beauté ou la gloire. [...]
[...] Sa mise en forme n'a-t- elle pas pour but premier d'éviter les pièges de l'interprétation ? D'autre part, la vertu se résume-t-elle à cette unique conception ? On peut alors se demander comment l'exemple parvient à perdre ou acquérir une valeur édifiante et quelle en est sa nature. Il sera donc intéressant, après avoir établi les limites de l'éloquence et de la poésie à guider vers la vertu, de démontrer la subordination de ces poétiques à un but moral, puis d'analyser comment la diversité de ces enseignements en relativise l'efficacité. [...]
[...] Sa culture et sa maturité, comme Rousseau le fera remarquer en 1762 dans Emile ou de l'éducation sont encore insuffisantes pour comprendre la vertu de l'exemple à travers les subtilités du langage poétique. En effet, dans son analyse de la fable le corbeau et le renard le philosophe met en lumière la complexité du vocabulaire tels que le mot phénix et des tournures de phrases : vit au dépend de celui qui l'écoute Il faudrait pour entendre la morale que les enfants aient développé des connaissances mythologiques et sociales, et un sens de l'ironie comprise dans le syntagme belle voix qui désigne celle du corbeau. [...]
[...] "Les exemples sont des guides qui nous égarent souvent et nous sommes si remplis de fausseté que nous ne nous en servons pas moins pour nous éloigner du chemin de la vertu que pour le suivre", duc de La Rochefoucauld C'est après une jeunesse parsemée d'intrigues vouées à l'échec que le duc de La Rochefoucauld se consacre à l'écriture. Il est rapidement reconnu comme grand philosophe et moraliste grâce à ses Réflexions diverses publiées en 1665 avec les Maximes. Fruits d'une expérience difficile, ses observations sur l'être humain, la société et le pouvoir sont empreintes de pessimisme moral ainsi que l'indique le jugement : Les exemples sont des guides qui nous égarent souvent et nous sommes si remplis de fausseté que nous ne nous en servons pas moins pour nous éloigner du chemin de la vertu que pour le suivre. [...]
[...] C'est ainsi dans le cadre des Contes que la conception de la vertu va prendre une nouvelle signification, celle des vertus cardinales ou païennes qui sont la prudence, la justice, la force et la tempérance. Dans Le calendrier des vieillards La Fontaine dénonce le cocuage comme conséquence inévitable du mariage arrangé entre un vieillard sénile de corps et sa jeune femme faite de désirs naturels. Sa morale, loin de condamner Bartholomée pour avoir cédé à la chair, indique la réussite de son mariage avec Pagamin, arguant qu'ils se sont choisis à l'épreuve La vertu ici prônée n'a donc aucun rapport à la spiritualité, il s'agit plutôt de montrer que c'est de la justice d'une action que dépend sa réussite. [...]
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