Pierre Bergounioux est né à Brive le 25 mai 1949. En 1966 il quitte sa Corrèze natale et passe son bac à Limoges. Il prépare l'Ecole normale supérieure à Bordeaux et y entre à Saint-Cloud. Il passe l'agrégation et un doctorat de lettres. Il lit énormément, surtout Faulkner, Kafka, Proust, Homère, Shakespeare, qui sont ses principales influences. En parallèle il enseigne le français dans des lycées à Massy et à Bures-sur-Yvette. C'est en 1983 au sortir d'une maladie, qu'il commence à écrire et envoie son premier manuscrit à Gallimard. En janvier 1984 sort Catherine, son premier livre. Rédigé en douze jours, cet ouvrage est un retour à ses origines.
Miette est son quatorzième roman, au fil des pages on comprend qu'il nous livre l'histoire des ancêtres de son épouse, Catherine, il s'agit en quelque sorte d'un hommage à sa belle famille et à son épouse. Pierre Bergounioux le confesse lui-même au cours d'un entretien : «J'écris pour les morts, pour mes morts.» Le titre de ce roman renvoie au surnom donné à la grand-mère de son épouse, qui s'appelait Marie, on apprend cela à la page 28 où il dit :
« On m'a dit son nom, Miette, qui est un diminutif de Marie».
Le récit concerne plus les quatre enfants de Miette qu'elle-même, mais le narrateur nous confie tout de même quelques souvenirs liés à la vie de cette dernière, dans ses rôles d'épouse ou de mère, qui sont finalement les seuls fragments qu'il a pu recueillir par le biais de discussions, confidences ou encore de photographies. Par exemple il nous informe des circonstances du mariage entre Pierre et Marie, il nous livre la souffrance de cette jeune femme qui aimait un autre homme et qui avait dit « non », alors que son entourage criait oui pour elle. Miette est donc le point de départ de l'arbre généalogique retracé dans ce récit. On peut souligner le fait qu'elle ne devient quelqu'un, une femme, un visage qu'à partir du moment où elle devient mère, on peut se référer à la photographie de la première de couverture dans l'édition folio, où elle se tien entourée de ses quatre enfants (citation page 34). Son époux, Pierre sera très peu présent tout au long du récit, il incarne une figure paternelle maladroite, critiquée, archaïque et finalement quasi absente. Le thème de la paternité étant récurrent dans l'ensemble de l'œuvre de l'auteur.
On note que le roman se compose de cinq parties, qui chacune à leurs manières reprennent les éléments contenus dans la partie qui précède. En effet à la lecture de ce roman, on est livré au choix du narrateur qui écrit l'histoire de cette famille sous le coup de la mémoire plutôt que de la logique, comme l'Histoire qui est écrite par ordre chronologique. Pierre Bergounioux se sert en filigrane de l'Histoire de France, du contexte temporel afin de raconter l'histoire d'une famille de paysans au vingtième siècle.
L'écriture du temps implique plusieurs éléments, tout d'abord la confrontation entre la grande et la petite histoire, celle de la famille, des personnages, le rapport à la durée, et également la relation du temps et de l'espace.
[...] L'utilisation en alternance des trois autres mouvements narratifs permet de mettre en valeur les passages de vie importants des personnages. Pierre Bergounioux raconte sur les trois modes les mêmes histoires, tout en apportant quelques précisions supplémentaires. L'emploi croisé de ces vitesses narratives plonge le lecteur dans une sorte de flou temporel, qu'il ne peut élucider qu'avec la fin de l'oeuvre. Le lecteur en lisant, prend un peu la place du narrateur, qui en arrivant dans cette famille, avait tenté de comprendre, de savoir. Il est en proie aux mêmes spéculations, doutes, interrogations que le narrateur se posait avant lui. [...]
[...] Il opère des va-et-vient entre le passé et le futur de cette même histoire qu'il connaît. Il utilise parfois des présents, lorsqu'il est dans une phase de réflexion, d'interrogation, ces phases s'accompagnent en général du pronom on Page 12-13, page Les mouvements narratifs Les vitesses narratives L'écriture du temps est étonnante dans ce roman, car elle est ambiguë, et ne correspond pas vraiment à ce que l'on entend lorsqu'on évoque le terme de récit. L'absence de chronologie s'inscrit plutôt dans la continuation du nouveau roman. [...]
[...] Le roman/temps conçu de manière cyclique -Le temps se raconte de manière cyclique, l'histoire elle-même est conçue comme une boucle. Le personnage de Miette est l'incarnation même de cette construction cyclique, à la page 138 : Le compte y était, le temps accompli. Elle avait fermé la boucle, voulu ce qu'elle avait refusé, vécu au mépris d'elle-même, subi dans sa chair puis incarné l'immémoriale loi des choses L'idée que Miette ait cherché à boucler la boucle, à construire un cycle, nous permet de comprendre pourquoi le roman porte son nom alors que le narrateur fait d'elle un personnage secondaire. [...]
[...] Ces changements de rythme que Pierre Bergounioux nous impose doivent être mis en relation les uns avec les autres. Gérard Genette en recense quatre : Théoriquement, en effet, il existe une gradation continue depuis cette vitesse infinie qui est celle de l'ellipse, où un segment nul de récit correspond à une durée quelconque d'histoire, jusqu'à cette lenteur absolue qui est celle de la pause descriptive, où un segment quelconque du discours narratif correspond à une durée diététique nulle ( . [...]
[...] On remarque encore le temps de la langue, le temps d'avant caractérisé par le patois, et quelques expressions présentes dans l'œuvre : -page 9 Adrien et le narrateur se parlent quelques fois en patois. -page11 l'extirpatour -page15 per moun âme Ah bougre ! Ah bougresse ! -page 37 tornerei pas En patois il n'y a pas de mot pour expliquer l'Amérique. Le temps d'avant est aussi caractérisé par les vieux outils, et le vieux mobilier décrits dans le premier chapitre. Ce sont ces choses qui entourent les personnages et qui représentent du temps à l'état pur. [...]
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