Écriture autobiographique, reflet authentique du moi, moi de l'auteur, écriture du soi, subjectivité de l'auteur, exploration du passé, compréhension du présent, autofiction, Henri Bergson, Jean Genet, Nathalie Sarraute, Montaigne, Philippe Gasparini, Jean-Jacques Rousseau, Gisèle-Matthieu Castellani
Dans L'Évolution créatrice d'Henri Bergson, le philosophe affirme que "la conscience est un trait d'union entre ce qui a été et ce qui sera, un pont jeté entre le passé et l'avenir". Il est alors possible d'envisager que l'écrivain, par l'exploration de sa conscience, cherche lui aussi à éclairer son présent à la lumière de son passé, d'où le recours à l'écriture autobiographique. C'est en tout cas ce qu'affirme Jean Genet dans sa propre autobiographie intitulée le Journal du voleur et publiée en 1949. Pour lui, l'écriture autobiographique est incapable de retranscrire fidèlement l'identité antérieure de l'auteur : "avec des mots si j'essaie de recomposer mon attitude d'alors, le lecteur ne sera pas dupe plus que moi".
Tenter de reconstruire son moi passé à travers l'écriture, c'est à la fois tromper le lecteur, mais aussi soi-même, car cela relève de l'impossible. Jean Genet soulève l'impuissance du langage dans le projet d'une écriture autobiographique destinée à restaurer le moi passé : "nous savons que notre langage est incapable de rappeler même le reflet de ces états défunts, étrangers".
Jean Genet sous-entend que l'identité humaine est fragmentaire, obscure et complexe, et que les mots, par leur caractère rudimentaire, ne sauraient rendre compte d'une identité appartenant au passé, tant en précision qu'en intensité, car même "le reflet de ces états" est imperceptible aux yeux du langage.
[...] En effet, pendant son enfance, Rousseau commet un vol et accuse une autre personne de son délit, une jeune fille du nom de Marion. C'est la parole calomniatrice que Rousseau regrette, il dit d'ailleurs que ce souvenir cruel trouble quelquefois, et bouleverse au point de voir dans [ses] insomnies cette pauvre fille venir [lui] reprocher [son] crime comme s'il n'était commis que d'hier . Jusque-là, Jean-Jacques Rousseau se conforme au projet qu'il a établi, mais suite à ce récit, il décide de commenter son acte. [...]
[...] Mais il est aussi possible d'envisager l'existence que nous avons menée sous un angle plus universel qu'intime. Les événements de notre passé peuvent avoir, si la situation s'y prête, une portée universelle sur l'être humain ou sur le monde en général. Pour Montaigne dans ses Essais, et plus particulièrement dans la section intitulée Du Repentir , l'auteur s'interroge sur l'éventualité d'une dimension universelle de son existence. Tout comme Jean Genet, qui affirme qu'il n'est plus la personne qu'il était autrefois, Montaigne admet les identités multiples que l'être humain revêt au cours de sa vie ; pour lui, le monde n'est qu'une branloire pérenne , c'est-à-dire que le monde est sujet à une instabilité permanente, et il applique cette conception du monde au sujet : je ne peins pas l'être, je peins le passage . [...]
[...] L'écriture autobiographique peut-elle être le reflet authentique du moi de l'auteur malgré sa subjectivité ? Dans L'Évolution créatrice d'Henri Bergson, le philosophe affirme que la conscience est un trait d'union entre ce qui a été et ce qui sera, un pont jeté entre le passé et l'avenir . Il est alors possible d'envisager que l'écrivain, par l'exploration de sa conscience, cherche-lui aussi à éclairer son présent à la lumière de son passé, d'où le recours à l'écriture autobiographique. C'est en tout cas ce qu'affirme Jean Genet dans sa propre autobiographie intitulée le Journal du voleur et publiée en 1949. [...]
[...] L'autobiographie est donc capable de rendre compte d'un moi authentique, mais encore faut-il que l'auteur sache qu'il ne s'agit que d'un moi parmi d'autres, et non pas son identité pleine et entière. C'est à la lecture de l'ensemble de ses œuvres que le lecteur pourra établir son identité comprenant la totalité des moi qu'il s'est construit. [...]
[...] C'est grâce aux connaissances du langage que Nathalie Sarraute a accumulées au cours de sa vie qu'elle a pu mettre un nom sur cette attitude, qu'elle a pu expliquer la raison de cette obsession. Il y a donc une intervention du présent dans la compréhension du passé. Selon Jean Genet, il existe plusieurs moi au cours de la vie d'un individu, et il est donc difficile d'établir son identité, puisqu'elle est en permanence en train de se construire et de se déconstruire. [...]
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