L'eau et les rêves, Gaston Bachelard, personnage de La Lorelei, rapport avec la mort, relation à l'eau
Cet essai traite du rapport entre l'élément liquide, les rivières surtout, et l'imagination. Entre la psychanalyse et la philosophie, Bachelard médite sur la notion de beauté de la matière et des éléments. Après avoir traité du feu dans un précédent ouvrage, l'auteur essaye de montrer que l'eau, elle, n'a que peu été traitée en littérature par le biais du rêve. De plus, lorsque les écrivains ont utilisé le motif de l'eau, c'est presque tout le temps pour le lier à la féminité. L'eau est une figure maternelle, on y naît, on en jaillit. Pourtant, l'eau est aussi évidemment liée à la violence, à la mort. Bachelard considère d'ailleurs que : « [Quand] l'eau prend une rancune, elle change de sexe. En devenant méchante, elle devient masculine. » Ainsi, si elle est à la fois homme et femme, douceur et violence, le caractère ambivalent de l'eau ne fait plus de doute et il parait évident qu'il faille étudier la figure de la Loreley à la lumière de l'étude de Bachelard. En effet, la Loreley, figure féminine a un rapport on ne peut plus complexe à la fois à la masculinité (qu'elle aime, séduit, repousse et qui la condamne), et à l'élément aquatique (qu'elle désire et qu'elle choisit en se donnant la mort).
[...] Bachelard commence son chapitre III en rappelant que Le héros de la mer est un héros de la mort[5] En effet, la mer, l'eau, terrifie. Partir sur les flots, c'est évidemment prendre des risques. Or la seule raison pour laquelle un marin peut choisir de prendre ces risques, c'est s'il rêve de ce qu'il y a au-delà. L'eau acquiert le statut d'une sorte de fantasme. Le premier matelot est le premier homme vivant qui fut aussi courageux qu'un mort. conclue ainsi Bachelard l'introduction de son chapitre. Mourir en mer, c'est mourir en héros, mourir d'une fin nimbée de mystères et de fantasmes. [...]
[...] Entre la psychanalyse et la philosophie, Bachelard médite sur la notion de beauté de la matière et des éléments. Après avoir traité du feu dans un précédent ouvrage[1], l'auteur essaye de montrer que l'eau, elle, n'a que peu été traitée en littérature par le biais du rêve. De plus, lorsque les écrivains ont utilisé le motif de l'eau, c'est presque tout le temps pour le lier à la féminité. L'eau est une figure maternelle, on y naît, on en jaillit. [...]
[...] On peut le voir aussi dans les représentations picturales qui sont faites d'elle. Par exemple, le tableau de Millais, Ophélia, étaye notre idée : Ophélie est morte. Sir John Everett Millais, Ophelia, Huile sur toile x 111,8 cm (Tate Britain, Londres, UK) Au contraire, la Loreley est toujours représentée comme une séductrice. L'art la peint et la décrit vivante, sur son rocher. Ophélie s'est peignée, la Loreley se peigne. Notre figure n'est pas morte, elle reste pour la littérature une femme séductrice qui s'est noyée mais qui vit tout de même. [...]
[...] Or là est bien le centre de notre problème : si ces morts sont artistiques et esthétiques, c'est parce qu'elles ont lieu dans l'eau. L'eau fascine mais fait peur. On pourrait ici ajouter une troisième figure féminine qui a un rapport mortuaire à la mort : Odile des Affinités électives de Goethe. Elle ne meurt pas noyée, mais elle provoque la mort du nouveau-né, Otton, de Charlotte. L'alliance femme / eau est dans nos trois exemples dominée par la mort. L'eau, profonde, sombre, est mystérieuse. Elle englobe les morts et les rend dissolus. [...]
[...] BACHELARD Gaston, La Psychanalyse du Feu, Ed. Idées NRF p. BAUDELAIRE Charles, La Mort in Les Fleurs du Mal in Œuvres complètes, tome Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade p. CLAUDEL Philippe, Les Ames grises, Le Livre de poche, Paris p. LAMARTINE Alphonse de, Confidences, A. Lemerre, Paris p. PICHON Michèle, L'eau et les rêves, quelques clés de lecture, document PDF http://www.gastonbachelard.org/fr/ressources/presentationcorpus/L-Eau-et- les-reves_M.PICHON.pdf RIMBAUD Arthur, Ophélie in Oeuvres completes, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade p. SHAKESPEARE William, Hamlet in Tragédies Oeuvres completes tome Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, Paris p. [...]
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