Dissertation sur le théâtre à partir d'une citation dans Le Théâtre de la cruauté d'Antonin Artaud

Thèmes abordés

théâtre, Le Théâtre de la cruauté, Antonin Artaud, théâtre sur scène, illusion vraie, spectateur

Résumé du document

Dans Le Théâtre de la cruauté (1938), l'écrivain français du XXe siècle Antonin Artaud expose sa vision du théâtre. Selon lui, l'essence même et le but du théâtre réside dans l'illusion qu'il offre au spectateur. Ce n'est pas une illusion simplement destinée à tromper le spectateur en lui présentant comme vraie une intrigue inventée et jouée par des acteurs qui prennent la personnalité et l'apparence de quelqu'un d'autre, donnant ainsi le goût du faux, du mensonge et de l'hypocrisie au spectateur. Au contraire, l'illusion théâtrale, en présentant comme vrai ce qui est faux, permet au spectateur de se mettre à la place des personnages, qui font semblant de faire ce qu'ils ne doivent pas faire dans la réalité. Ainsi, lorsque les personnages sur scène donnent cours à « [leur] goût du crime, [leurs] obsessions érotiques, [leur] sauvagerie, [leurs] chimères, [leur] sens utopique de la vie et des choses », cela provoque la catharsis chez le spectateur : il se purge de ses passions, de ce qui est présent naturellement chez lui. Le théâtre ne représente donc certes qu'un simple aperçu de la réalité mais cet aperçu est universalisable, car tous les Hommes, de tous temps, ont été soumis aux mêmes passions, qui conditionnent leur comportement.

Extraits

[...] Néanmoins, certains courants littéraires visent une vérité qui est autre : en représentant la réalité de manière stricte, on peut placer derrière les personnages des idées universelles et intemporelles ; les personnages deviennent alors les symboles de ces idées. Enfin, il est de certains domaines comme le théâtre où la vérité n'est qu'une question d'« opinion comme le dirait Platon. Le théâtre représente donc une vérité particulière et variable. [...]

[...] A plusieurs reprises pendant la pièce, on retrouve le même échange de répliques identiques ESTRAGON Allons-nous-en. / VLADIMIR On ne peut pas. / ESTRAGON Pourquoi ? / VLADIMIR On attend Godot. ce qui montre que les deux personnages ne connaissent même pas le but de leurs actions, passent leur temps à attendre quelque chose qui ne vient pas, et que leur situation n'évolue pas. Les mêmes événements se reproduisent et les personnages ne semblent pas s'en apercevoir, à l'exception de Vladimir qui apparaît comme fou alors que c'est lui le plus rationnel : VLADIMIR On s'est vus hier. [...]

[...] Le théâtre va dans l'intimité des êtres : l'illusion se transforme en vérité dans le cadre intérieur que vise le théâtre sur un plan non pas supposé illusoire, mais intérieur Nous allons donc nous intéresser à ce type de vérité particulière que représente le théâtre sur scène à partir de l'étude de plusieurs pièces de courants littéraires différents. Nous allons tout d'abord étudier la notion d'« illusion vraie énoncée par Artaud. Puis nous verrons en quoi cette expression pose problème dans la mesure où elle n'est que parcellaire. [...]

[...] Un autre aspect de la phrase d'Artaud peut être aperçu à la manière dont cette même pièce de Shakespeare traite les thèmes centraux que sont le rêve et l'amour. Ils ne sont pas palpables et apparaissent comme de pures créations de l'imagination humaine, voir des caprices : lorsque Démétrius et Lysandre affirment à Héléna avec le plus de sincérité possible leur amour pour elle, elle refuse de les croire [N'avez-vous pas] engagé Démétrius votre autre soupirant qui, encore tout à l'heure me repoussait du pied, à m'appeler déesse, nymphe, divine et rare, précieuse et céleste ? [...]

[...] Le théâtre n'est donc pas univoque : il peut à la fois être un défoulement pour le spectateur, comme le pense Artaud, et une manière de le faire réfléchir et de lui faire découvrir ce qu'il est au fond de lui. L'affirmation d'Antonin Artaud est donc pleine de sens mais ne prend pas en compte tous les aspects de la création théâtrale. La vérité mise en scène et recherchée par le théâtre est certes souvent une vérité intérieure et qui s'inscrit dans le cadre de la scène, qui n'est pas régi par les mêmes règles que le monde extérieur. [...]