Les textes du corpus se rapportent tous à l'autobiographie, un genre qui trouve ses sources dans les Confessions de Saint Augustin (IV ème siècle) et est définie par Philippe Lejeune comme " le récit rétrospectif en prose qu'une personne réelle fait de son existence, lorsqu'elle met l'accent sur sa vie individuelle, en particulier sur l'histoire de sa personnalité". De plus, ces textes privilégient le récit d'enfance, l'une des formes les plus classiques du genre. L'autobiographie cherche, tour à tour, à se mesurer au temps, à rectifier l'image fausse que l'on avait de l'auteur ou à se complaire dans ses souvenirs. C'est ce dernier aspect que nous allons étudier et nous tenterons de voir pourquoi ces souvenirs d'enfance sont prépondérants dans les textes autobiographiques. Ces réminiscences ont pour but de faire revivre un paradis perdu depuis longtemps déjà, de relativiser les relations entretenues avec les adultes de son temps ou encore d'évoquer l'enfance comme un moment où la personnalité se construit.
[...] En revanche, Jean Jacques Rousseau est sans doute le plus virulent des trois. Il découvre l'arbitraire, l'injustice, la violence des rapports entre les hommes . autant d'événements qui vont avoir des répercussions sur sa vie et sa pensée. Dans bien des anecdotes le champ lexical de la torture, de l'injustice, contribue à dépeindre les adultes comme des tortionnaires : "Voilà comment en tout état le fort coupable se sauve au dépend du faible innocent". Tout bien considéré, le narrateur peut, en effet, prendre ses distances à l'égard de son passé. [...]
[...] par le biais de photographies prises par son père et qu'elle désigne comme "la base et la raison d'être de ce livre", elle reconstitue une mémoire douloureuse et cherche à retrouver les souvenirs de sa petite enfance, perdus à la suite d'un grave choc émotionnel . Non seulement, elle se livre à la difficile entreprise de remémoration mais en plus de cela, elle rend un hommage vibrant aux membres disparus qui me fascine sur cette photo, m'émeut au larmes, c'est la main de mon père sur ma jambe"). Somme toute, la distanciation prise par l'autobiographe peut se révéler être un moment privilégié pour honorer les adultes. [...]
[...] De la même manière avec La maison de Claudine, Colette a su trouver, pour exprimer le plaisir extatique du souvenir associé à des lieux, de longues descriptions teintées d'un certain onirisme. Cependant, transparaît au travers, une amère nostalgie devant de telles remémorations qu'elle sait vaporeuse monde dont j'ai cessé d'être digne"). Baudelaire affirmait que "le génie n'est que l'enfance retrouvée à volonté" . Dès lors, on comprend que l'amertume de l'auteur est liée au fait qu'elle ne récupéra jamais le monde de son enfance. [...]
[...] On peut citer Black Boy de Richard Wright qui dépeint l'enfance de l'auteur, autour de 1910, et comment il découvre l'existence du racisme. Enfant, il est très étonné d'apprendre "qu'un homme blanc a fouetté un homme noir alors qu'il n'était même pas son père" et alors qu'il tente de gagner quelques sous en vendant des journaux, il réalise que celui-ci est imprimé par le Ku Kux Klan. De nombreuses anecdotes racistes de ce type jalonnent son enfance, notamment un climat de violence exacerbée dont il va faire, plus d'une fois, les frais. [...]
[...] Ce sont ces points d'ancrage de la mémoire dont les écrivains usent pour se complaire à nouveau dans le paradis perdu qu'est l'enfance . une nostalgie aggravée par l'âge, généralement avancé des autobiographes, au moment de coucher sur papier leur existence. Pour faire resurgir des bribes de son enfance, l'auteur peut donc conduire sa mémoire à faire un parcours inversé, par le biais des sens qui, au contraire de la mémoire d'intelligence, retiennent de la vie plus qu'une image sans vie et couleur. L'enfance est ce que l'autobiographe passe son existence à tenter de retrouver. [...]
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