La définition de la littérature exposée par Italo Calvino se fonde sur deux idées principales. Selon lui, d'une part la littérature se doit de « se donner des objectifs démesurés »: « Il faut que poètes et écrivains se lancent dans des entreprises que nul autre ne saurait imaginer, si l'on veut que la littérature continue de remplir une fonction », d'autre part elle doit «apprendre à nouer ensemble les divers savoirs, les divers codes pour élaborer une vision du monde plurielle et complexe".
[...] », s'écrie Hugo dans son poème « La Fonction du poète » (Les Rayons et les ombres). C'est, écrit-il encore, que le poète « vient préparer des jours meilleurs », car il est « l'homme des utopies ». Le titre-même du poème « Fonction du poète », annonce la définition d'un rôle qui se révèle éminent, exceptionnel. Le poète a pour mission d'éclairer l'humanité, de la guider vers la liberté. C'est donc bien une entreprise démesurée, impartie à un homme unique parmi les mortels. [...]
[...] Avec Hugo, on pourrait dire que la notion « d'oeuvre-monde » est décuplée. Car non seulement l'ampleur et la diversité de ses créations constituent un monde en soi, mais il fait corps avec elle, on pourrait presque dire qu'il est lui-même une oeuvre-monde. Sa longévité d'abord (il est né en 1802 et mort en 1885) et la durée de son travail d'écrivain (de 1816 à 1883, sans compter les oeuvres posthumes), en font l'acteur et le commentateur de la presque totalité du XIXème siècle. [...]
[...] Chateaubriand qualifie Les Mémoires d'outre-tombe de « monument » : « Grâce à l'exorbitance de mes années, mon monument est achevé. » (dernière page des Mémoires); Victor Hugo, qui traverse le siècle, donne des chefs d'oeuvre dans tous les genres possibles: théâtre (pas moins de quinze pièces, dont Hernani, Ruy Blas), roman (neuf livres, parmi lesquels Notre-Dame de Paris, Les Misérables), poésie épique et lyrique (vingt-trois recueils, dont Odes et Ballades, Les Rayons et les Ombres, Les Châtiments, Les Contemplations, La Légende des siècles . [...]
[...] Sa réflexion sur la poésie amène Baudelaire à formuler une idée proche de la notion de micro-monde. Dans sa Préface au Spleen de Paris (1868), adressée à son ami Arsène Houssaye et où il définit la forme nouvelle du poème en prose, il écrit: « Vous-même, mon cher ami, n'avez-vous pas tenté de traduire en une chanson le cri strident du Vitrier, et d'exprimer dans une prose lyrique toutes les désolantes suggestions que ce cri envoie jusqu'aux mansardes, à travers les plus hautes brumes de la rue? [...]
[...] Avec ces fictions romanesques, la littérature joue pleinement le rôle que lui impartit Italo Calvino. Mais , à côté de ces monuments littéraires totalisants que constituent les oeuvres de Hugo, Balzac, Zola, que l'on pourrait appeler des « macro-mondes », le XIXème siècle est riche en oeuvres d'une ampleur plus limitée, en somme des « micro-mondes » qui nouent bien eux aussi « ensemble les divers savoirs, les divers codes pour élaborer une vision du monde plurielle et complexe ». [...]
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