La représentation que nous pouvons avoir des poètes aujourd'hui relève beaucoup du cliché : depuis que Platon a voulu les chasser de la Cité, ils apparaissent comme des êtres en marge, et l'image du poète maudit, tourmenté, s'est rajoutée à cette représentation. On imagine parfois aussi le poète comme un être de pure fantaisie, vivant dans le rêve, un insoumis qui passe outre les règles, détaché du matériel et perdu dans ses pensées.
Mais c'est ignorer le témoignage des poètes eux-mêmes sur la difficulté de leur travail, car il s'agit bien d'un labeur, et c'est mal connaître l'écriture poétique, une des plus difficiles qui soient, des plus exigeantes et des plus codifiées. On peut d'ailleurs s'étonner que ce soient les poètes, les plus souvent soumis aux contraintes poétiques, qui aient réclamé plus de liberté dans la vie comme dans la création. Peut-on alors dire que la liberté est un principe fondamental dans la pratique poétique, alors qu'on sait bien que, pendant des siècles au moins, la part de liberté a été considérablement réduite, tant la poésie a connu, et dès longtemps, de règles et d'interdits ?
[...] 1) La théorie très ancienne de l'inspiration montre que le poète n'est pas libre
- Vision extrême, mais originelle, où le poète n'a pas la liberté de créer puisqu'il n'est qu'un « secrétaire » de la Muse : dans l'Antiquité, mais aussi au XVIème siècle, qui reprend la notion d'enthousiasme (possession par un dieu), chez Ronsard par exemple. Le poète est un inspiré : quelque chose de supérieur le domine et lui inspire sa poésie. Les Muses de la poésie chez les Grecs sont les suivantes du dieu Apollon. (...)
[...] Nous pouvons donc conclure que la liberté est bien un principe fondamental dans la pratique de la poésie, mais liberté ne signifie pas que les poètes aient toute latitude : ce sont eux plutôt qui nous apprennent le vrai sens du mot, car il y a dans la liberté une part de contrainte. Même si la poésie a toujours célébré la liberté, elle ne s'est pas dispensée soit d'un ensemble de règles, soit d'une conduite à tenir. Tous les poètes contemporains ressemblent à des ascètes modernes, dont l'expérience spirituelle est d'autant plus exigeante que le monde se détourne de leur quête. [...]
[...] La liberté peut être un idéal esthétique - Hugo a théorisé l'importance de la liberté, idéal au cœur du Romantisme, dans la préface de Cromwell. - Verlaine par son Art poétique répond à d'autres, comme celui de Boileau au XVIIème siècle qui liste les règles édictées par le Classicisme. Le Romantisme et une réaction contre le Classicisme ; mais le Symbolisme est lui-même une réaction contre le Réalisme et le Naturalisme, qui s'obligent à l'objectivité, à la démarche scientifique, etc. [...]
[...] Ils ont renouvelé les formes, soucieux de se délivrer des carcans - Renouvellement des formes poétiques : Transformations du sonnet : considéré comme un modèle, voire l'emblème de la poésie de forme fixe, le sonnet fait l'objet de l'attention de bien des poètes qui le modifient, le déconstruisent, s'en libèrent. Au XIXème, Baudelaire joue sur le schéma rimé, ne respectant plus celui des tercets, et osant même les rimes croisées dans les quatrains. Corbière, avec Le Crapaud écrit un sonnet à l'envers, qui est aussi une critique du beau lyrisme Apollinaire, avec Les colchiques (Alcools, 1913) dissout le sonnet de départ, casse un alexandrin et fond les strophes en septain, quintil et tercet. [...]
[...] - Le culte du travail est l'un des éléments fondamentaux du Parnasse. Il est souvent comparé au sculpteur ou au laboureur qui doit transformer une matière difficile, le langage, en beau par et grâce à un patient travail avec la volonté d'atteindre la perfection, en remettant vingt fois sur le métier son ouvrage, atteindre la perfection grâce à un patient et long travail. Ce qui prime, ce n'est pas l'inspiration comme c'était le cas pour les Romantiques, mais le travail en lui-même pour redonner ses lettres de noblesse à la poésie. [...]
[...] Le mot jour par ses sonorités paraît moins lumineux que celui de nuit par exemple. Dans le vers C'était pendant l'horreur d'une profonde nuit le poète a senti la nécessité de colorer le mot nuit par un adjectif aux sonorités plus sombres ; ainsi les assombrissent le[i] qui survient. La poésie est une expérience spirituelle - Rimbaud et la Lettre du Voyant : le poète cherche à inventer une langue, trouver une poésie nouvelle, et pense le pouvoir grâce à un dérèglement de tous les sens pour libérer ce qui reste enfoui sous le vernis des choses apprises et des réactions, émotions, sentiments fabriquées par l'habitude et la société. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture