La Fortune des Rougon, Emile Zola, roman historique, Auguste Dezalay, David Baguley, Rougon-Macquart, Henri Guillemin,
La valeur historique de La Fortune des Rougon a été, selon les commentateurs, diversement appréciée.
Tandis que certains d'entre eux la minimisent, Auguste Dezalay, dans une édition du roman, qualifie ce dernier de « document d'histoire contemporaine sur la conquête de la France par les bonapartistes ambitieux » et un article de David Baguley conclut, lui aussi, à la réelle valeur historique de ce roman ainsi que des autres Rougon-Macquart, affirmant que l'œuvre de Zola n'a pas «profané les mânes de Clio. Loin de là !» De même Henri Guillemin considère que La Fortune des Rougon constitue «un témoignage que doit recueillir tout historien du coup d'État.»
[...] Aspect documentaire Une trace des lectures que Zola accomplit prouve que le romancier engrange en même temps de la documentation, ce qui expliquerait qu'on puisse parler de la Fortune des Rougon comme d'un témoignage que doit recueillir tout historien Zola transpose avec exactitude des événements survenus à Lorgues, dans le Var, quoiqu'il s'inspire pour décrire Plassans de ses souvenirs d'Aix-en-Provence. Il dispose d'une information abondante, puisée en particulier chez les opposants de l'Empire qui travaillaient comme lui, plus tard, à La Tribune ou au Siècle. L'insurrection du Var était récemment revenue dans l'actualité, car on pouvait lire dans La Tribune plusieurs faits liés à la répression qui émergeaient ou ressurgissaient, et en particulier l'exécution de quatre prisonniers par un gendarme éborgné. [...]
[...] C'est dans la période révolutionnaire que s'origine la famille Rougon- Macquart. Même si les mentions de durée sont discrètes, le contexte historique est encore assez proche au moment de la publication du roman pour permettre au lecteur d'identifier les repères essentiels. Et la date de naissance d'Adélaïde Fouque (1768) est suffisante pour décrypter ces mentions de durée floues et reconstituer la chronologie du roman ; ainsi, les débuts de sa liaison adultère et la naissance des deux bâtards transposent ce qui se passe à ce moment-là dans le pays, la Révolution. [...]
[...] Il y a donc une sorte de malédiction qui plane depuis des temps immémoriaux sur le lignage qu'elle fonde, voué à dégénérer. C'est ce qui permet aussi de comprendre que le romancier, à partir du coup d'État, plonge le lecteur dans une sorte de hors-temps : le Second Empire qu'il nous raconte est immobile, fixe, ce qui justifie une écriture de l'histoire où les figures de la répétition et de l'analogie dominent. Par exemple, montrer la mort des jeunes personnages qui allégorisent la République et la Liberté n'a pas seulement une signification historique et politique, mais apporte un supplément de sens, car cela réactive le traumatisme de Dide causé par la mort du braconnier. [...]
[...] De même, dans son Histoire de l'insurrection du Var en décembre 1851, le portrait que Noël Blache trace de Camille Duteil, qui a mené la bataille d'Aups, et à travers lequel il montre son hostilité envers cet homme au sabre pendu au côté, les pistolets passés à la ceinture qui lui donnaient un air belliqueux, rappelle chez Zola l'homme au sabre qui commande la troupe des insurgés. Enfin, le romancier connaît aussi bien les ouvrages de Delord et de Ténot. Il n'y a nul doute d'ailleurs à reconnaître le personnage de Miette, chez ce dernier, derrière les traits d'un personnage réel, celui de Mme Ferrier, qui inspirera à Zola la représentation de Miette portant le drapeau, pour en faire un emblème républicain et révolutionnaire. [...]
[...] Par conséquent, même si la fiction semble l'emporter sur l'histoire, ne peut-on pas envisager d'autres sens de l'histoire, dans la Fortune des Rougon, qui ne l'enchaîneraient plus à un statut documentaire ou à un rôle de témoignage essentiellement explicatif ? * * * * * * * * III) D'autres finalités du roman historique Zola n'écrit pas, certes, son roman pour raconter un moment de l'histoire de France. La Fortune des Rougon se souvient donc du genre historique, mais en modifie radicalement la finalité. Dimension anthropologique et philosophique C'est d'abord par le choix du romancier de recourir à la métaphore et à l'analogie que les faits historiques dans le roman prennent une dimension anthropologique ou philosophique. [...]
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