La ville est un théâtre privilégié pour montrer la tragédie humaine. Marguerite Yourcenar va utiliser ce procédé à l'inverse. En effet dans cet extrait elle rompt avec les règles spatio-temporelles pour entrer dans une sphère nocturne où les hommes n'ont plus besoin de denier pour s'offrir de l'illusion.
Nous allons tenter de comprendre comment Marguerite Yourcenar parvient à nous exposer sa vision de la condition humaine à travers ce passage final de Denier du rêve.
Dans un premier temps il s'agira de comprendre comment Marguerite Yourcenar rompt avec les règles spatio-temporelles et ensuite nous déterminerons comment cela lui permet de montrer la condition tragique de l'homme.
[...] Lina Chiari rêve de Massimo alors qu'il ne rêve pas d'elle, ici aussi la réalité est bien plus dure mais Lina est loin de cette pensée puisqu'elle s'offre du bonheur en rêve. Angiola rêve d'être Angiola Fidès alors qu'Angiola Fidès n'existe que derrière l'écran. L'auteur se place tour à tour dans la peau des personnages pour plonger dans leurs rêves, qui cache de la réalité . Cet espace de rêve est hors du temps, le temps ne semble pas compté à des personnages tels Lina qui va pourtant mourir ou Massimo qui s'apprête à partir. [...]
[...] Marguerite Yourcenar crée une atmosphère particulière dans cet extrait. En effet le temps s'est arrêté pour laisser place à un univers onirique. La tragédie de la vie humaine est que l'homme ne voit pas qu'il va mourir, il vit en dehors de cette tragédie la. En rompant avec le temps, l'auteur permet à l'homme de ne plus avoir à compter le temps, il peut s'adonner paisiblement à son rêve, elle lui permet de sortir de la scène de sa vie. [...]
[...] L'abolition des marques du temps permet à Marguerite Yourcenar d'installer un cadre narratif dans lequel les personnages sont libres d'évoluer. Le rêve d'Oreste marque bien cette rupture avec le temps et l'espace. Tout d'abord lorsqu'il entre dans le bar, celui-ci est décrit ainsi : une petite taverne à côté de la gare où les amis du patron pouvaient se rafraîchir en paix toute la nuit sans qu'il fut question de fermeture. Il s'agit juste de la nuit, il n'y a pas d'heure précisée. [...]
[...] En abolissant ces règles Marguerite Yourcenar permet aux personnages de se retirer de la scène de leur vie pendant une nuit. Nous allons tenter de montrer l'importance de ce masque tragique dans l'extrait et tenter de comprendre les enjeux du rapport entre l'histoire, la religion et l'homme. Le masque tragique du quotidien s'efface pour laisser place à une nouvelle scène où les hommes sont sans masque et où le denier n'a plus de valeur et d'utilité. Alessandro est blême, décomposé par la fatigue, mais très maître de soi Lina Chiari couchait avec son cancer qu'elle avait pourtant voulu camoufler avec du rouge à lèvres, quant à Clément Roux son vieux corps à l'abandon n'est plus qu'une masse de chair grise et de poils gris Angiola a le visage démaquillé, elle n'est plus la copie d'Angiola Fidès. [...]
[...] Ce passage cherche donc à abolir la sphère spatio-temporelle pour nous emmener dans le domaine du rêve, dans le monde de la nuit, où le temps et l'espace sont un instant suspendus. Cette pause dans le temps amène les personnages à sortir des règles de temps dans la tragédie humaine, qui existent dans la tragédie classique d'Aristote. Ce passage se veut représentatif d'une universalité pour montrer le monde dans sa globalité, pour montrer la condition de l'homme qui subit le temps. [...]
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