Dissertation à partir de la citation de Michel Zink : "Ce récit dont Robert de Clari est pratiquement absent, portant sur des évènements qui à tous égards le dépassent, a pour raison d'être le retentissement subjectif qu'ils ont eu sur sa propre affectivité." Cette citation n'est-elle pas trop réductrice ?
[...] L'auteur ne peut s'empêcher de s'exclamer : Che fu molt grans deus et molt grans damages. et d'insinuer que il leur vendi puis molt kier. Notre chevalier a donc un bon jugement sur les choses. Il sait que ce refus de s'allier avec Johannitza, chef des Coumans va coûter cher aux croisés. Il annonce d'ailleurs leur défaite puisque, à défaut d'être leurs alliés, les Coumans serons leurs adversaires et ils seront responsables de leur perte. Ainsi, Clari justifie la perte des croisés par la vengeance de dieu pour leur orguel et pour le male foi qu'il avoient portee a le povre gent de l'ost, et les oribles pekiés qu'il avoient fais en le chité, après chou qu'i l'eurent prise. [...]
[...] Cependant, nous verrons que l'auteur est loin de se laisser dépasser intellectuellement par ces évènements et que son récit répond à un objectif précis. Certes, ce récit de Robert de Clari met en relief la modestie de sa classe sociale et nous montre un "petit chevalier" dépassé par les évènements qui lui incombent. En effet, l'auteur n'est qu'un pion dans la masse de la "petite chevalerie" qui parti sur la route de la quatrième croisade au XIIIème siècle. Son fief, en Amiénois, était tout juste suffisant à lui valoir le titre de chevalier, et certainement insuffisant, avec ses six hectares à le nourrir (P. [...]
[...] Ces hésitations sur la temporalité sont accompagnées d'imprécisions dans la logique des évènements. Par exemple, la mort du prêtre nous est racontée avant l'assemblée des croisés à Soissons alors que dans la réalité elle intervient seulement un an après ce rassemblement. De plus, on a l'impression que la décision d'envoyer des messagers à Venise intervient après l'élection du marquis de Montferrat à la tête des croisés alors que celui-ci n'est élu qu'un an après cette décision. Ce manque de précision sévit également lorsqu'il s'agit de raconter les causes d'un évènement. [...]
[...] Mais finalement, au bout de la quatrième demande des Français l'empereur leur respondi qu'il ne les pooit paier en nule fin. Plutôt que de l'en blâmer immédiatement les barons se retirent pour réfléchir et finissent par lui demander leur dû une cinquième fois et ce n'est qu'après ce cinquième refus qu'ils comprennent la traîtrise d'Alexis. Ces multiples refus de l'empereur et les acquiescements à répétition des barons montrent bien la naïveté de ceux-ci. De plus, Clari souligne également le malvais consel que font les hauts personnages quand ils refusent de s'allier avec les Coumans au paragraphe soixante- cinq. (p.144). [...]
[...] Cependant, l'auteur est loin d'être stupide et il n'est pas dépassé intellectuellement par les évènements. Il se montre lucide vis- à-vis du déroulement de la conquête et des décisions des grands hommes et surtout il n'a pas pour but d'écrire son récit pour partager les sentiments qu'il a eus mais pour en raconter l'exacte vérité. Vérité que Clari refuse de laisser aux "Grands" pour servir leurs intérêts personnels. Il se veut porte-parole des petits chevaliers déçus et écrit ce récit pour ne pas être une nouvelle fois oublié. [...]
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