Publié pour la première fois dans la revue l'Artiste le 1er juillet 1868, avec cinq autres poèmes des futures Fêtes galantes, « Dans la grotte » est le sixième poème dans la version définitive du recueil : pas encore touché par l'assombrissement progressif qui guide la composition du recueil, il s'inscrit dans la lignée des poèmes railleurs qui le précèdent, « Sur l'herbe », « L'Allée » et « A la promenade ». Cependant, bien que la « grotte » mentionnée dans le titre soit un des ornements obligés du jardin à la française, très en vogue à l'époque du XVIIIème siècle galant, Verlaine quitte ici la sensualité libertine de la Régence, célébrée par Watteau, qui servait de modèle aux susdits poèmes, pour évoquer le courant précieux du siècle précédent.
Ce poème hétérométrique combinant octosyllabes et alexandrins, dans lequel un amoureux déçu s'adresse à une « cruelle Clymène » qui repousse ses avances, parodie en effet le style précieux, ses hyperboles, clichés, et tournures surannées… Son énonciation et son caractère parodique le rapprochent des poèmes « A Clymène » et « Lettre », dans lesquels le « vous » auquel s'adresse le locuteur va devenir « tu ». L'éloquence rhétorique de ce poème, qui rappelle certains vers de tragédies classiques, participe à la dénonciation de l'insincérité de cette plainte amoureuse. Elle souligne qu'il est vain de chercher une quelconque trace d'émotion dans ce pur pastiche, et si les rimes sont embrassées, c'est bien sûr pour accentuer l'ironie, de même que l'intimité suggérée par le titre, « Dans la grotte », est immédiatement niée par le vouvoiement.
L'étude de ce poème implique donc de s'intéresser aux références intertextuelles et au travail de la forme (richesse lexicale, recherche des sonorités, rimes soignées…), qui en expriment le caractère parodique.
[...] La cruauté dont est accusée l'allocutaire du poème est donc liée à son insensibilité amoureuse : ~ Une forte rime intérieure permet à la fois d'associer clairement la détresse de l'amant à la cruauté de la tigresse qu'est cette Clymène, et de former une rime dite brisée c'est-à-dire que les deuxième et troisième vers riment non seulement par la fin, mais aussi par la coupe. Ce procédé formel un peu trop recherché souligne le caractère artificiel du poème et invite le lecteur à ne pas trop croire à la sincérité de cette plainte. ~ Sur le plan des sonorités, on relève aussi une assonance en : les deux i que l'on entend dans l'adjectif infinie sont repris par trois i dans le vers suivant. [...]
[...] Stéréotypés par l'emploi de l'article indéfini, ces deux génies militaires et politiques incarnent indirectement l'héroïsme dont se vante avec insistance le locuteur. - Ces deux personnages ont vécu dans des lieux distincts, à des époques éloignées de plusieurs siècles, et leur rapprochement dans ce poème repose uniquement sur leur sonorité (c'est pourquoi Verlaine a finalement préféré Cyrus à Césars biffé dans le manuscrit) : leur syllabe initiale commune permet de renforcer l'effet binaire créé par la coordination, qui les place syntaxiquement sur le même plan. [...]
[...] Commentaire du poeme Dans la grotte extrait des Fêtes Galantes de Paul Verlaine Là ! Je me tue à vos genoux ! Car ma détresse est infinie, Et la tigresse épouvantable d'Hyrcanie Est une agnelle au prix de vous. Oui, céans, cruelle Clymène, Ce glaive qui, dans maints combats, Mit tant de Scipions et de Cyrus à bas, Va finir ma vie et ma peine ! Ai-je même besoin de lui Pour descendre aux Champs-Élysées ? [...]
[...] Cette césure est ironique, dans la mesure où elle fait entendre le mot époux (cf. Je suis l'époux de la Reine proféré par Ménélas dans La Belle Hélène d'Offenbach) alors que Clymène se refuse précisément à lui. ~ En revanche, on peut y appliquer la scansion romantique : ce vers, dans lequel les trois accents sont remarquablement nets, peut se lire comme un trimètre régulier Et la tigres/(se) épouvanta/ble d'Hyrcanie : scansion qui traduit la progression par bonds de la tigresse et qui permet une nouvelle amplification du rythme, passant du schéma binaire 4/4 du vers précédent Car ma détres/(se) est infinie au schéma ternaire 4/4/4. [...]
[...] Ce poème hétérométrique combinant octosyllabes et alexandrins, dans lequel un amoureux déçu s'adresse à une cruelle Clymène qui repousse ses avances, parodie en effet le style précieux, ses hyperboles, clichés, et tournures surannées Son énonciation et son caractère parodique le rapprochent des poèmes A Clymène et Lettre dans lesquels le vous auquel s'adresse le locuteur va devenir tu L'éloquence rhétorique de ce poème, qui rappelle certains vers de tragédies classiques, participe à la dénonciation de l'insincérité de cette plainte amoureuse. Elle souligne qu'il est vain de chercher une quelconque trace d'émotion dans ce pur pastiche, et si les rimes sont embrassées, c'est bien sûr pour accentuer l'ironie, de même que l'intimité suggérée par le titre, Dans la grotte est immédiatement niée par le vouvoiement. L'étude de ce poème implique donc de s'intéresser aux références intertextuelles et au travail de la forme (richesse lexicale, recherche des sonorités, rimes soignées qui en expriment le caractère parodique. [...]
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