Robert Desnos (1900-1945) appartient au groupe des Surréalistes. Ce mouvement de pensée et d'art se révolta contre les valeurs de la société d'avant 1914, qui ne put éviter la Grande Guerre. Ils renouvelèrent la littérature par l'utilisation des phénomènes inconscients, la liberté des rythmes et des images. Parmi les œuvres du poète Robert Desnos, on citera Corps et biens (1930), Fortunes (1942). Le recueil dont il s'agit ici fut publié après son décès en déportation. Malgré leur audace et leur désir de faire table rase du passé, les Surréalistes ont souvent repris, pour les renouveler, des thèmes anciens et universels. « La prairie du revenez-y » évoque la ronde du temps et des générations, et plus particulièrement le vieillissement des femmes.
Le temps qui passe, la mort qui saisit l'être humain, et particulièrement les femmes, symboles de la jeunesse et de la beauté, ont inspiré de tout temps les artistes. Dans le recueil Destinée arbitraire, le poète Robert Desnos, membre du mouvement surréaliste, reprend dans «La prairie du revenez-y» ce thème séculaire, mais le renouvelle par une versification et un rythme plus libres.
[...] n'est pas vrai, ce n'est pas vrai» ressemble à une exclamation d'enfant (vers 20). A la fin du poème, Desnos nie non seulement la mort de l'amour, mais aussi celle de toute chose. La tristesse devant la course du temps et la vieillesse s'efface devant la volonté de briser la ronde des générations. Cette affirmation se fait en deux temps. La quatrième strophe célèbre la pérennité de l'amour comme sentiment : «Jamais l'amour ne mourra au cœur des jeunes» (vers 16). [...]
[...] C'est chez elles que les atteintes de l'âge paraissent les plus spectaculaires et les plus tristes. Desnos évoque trois éléments particuliers : la texture et la couleur des joues, les beaux yeux, les larmes. Les «joues d'abricots» (vers 7 et se flétriront. La douceur de pêche des peaux féminines a souvent été célébrée, comme leur couleur rose. Malheureusement, comme le fruit, elles se rident et perdent leur couleur, comme chez Ronsard, «Mignonne, allons voir si la rose . où l'image de la fleur joue le même rôle que l'abricot. [...]
[...] Mais l'image des arbres qui «grandissent jusqu'à la lune» (vers est plus surprenante. Les comparaisons et métaphores se suivent apparemment sans lien, mais elles entretiennent parfois des relations secrètes. A la 3e strophe, l'évocation des yeux et des larmes fait naître la double image de la bougie qui s'éteint et de sa cire qui coule. C'est l'idée commune de «l'éclair qui s'éteint qui fait le lien entre l'être et l'objet. L'éclair des beaux yeux amène ensuite la métaphore de l'éclair de l'orage, qui prolonge l'image de la flamme. [...]
[...] On assiste à un renouvellement poétique par une versification et un ton plus libres. La métrique respecte peu les règles : irrégularité des strophes vers sauf pour la première) et du nombre de syllabes dans les vers (vers pairs ou impairs, allant de 6 à 13 syllabes). Les rimes sont fantasques : elles ne sont vraiment régulières que dans le dernier quintil b a b c'est-à-dire des rimes croisées). On note la quasi-absence de la ponctuation et la fantaisie des majuscules en début de vers. [...]
[...] Mais le texte reste moins clair pour la persistance de l'identité des individus. Sans doute est-ce pourquoi les affirmations de Desnos sont si insistantes : l'espoir se raccroche à une croyance viscérale, répétée pour se donner confiance et défier la mort. L'anaphore des adverbes «jamais» et «toujours» dans les deux dernières strophes est là pour contrebalancer le fatalisme de l'anaphore ainsi» dans les deux précédentes. La répétition de n'est pas vrai au vers 20 est poursuivie avec la mort comme sujet au dernier vers mort n'est pas vraie»). [...]
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