L'existentialisme défend l'idée que chaque être humain crée sa propre nature à travers ses expériences, ses choix et la découverte de sa propre et unique vocation. Pour un existentialiste tel que Jean-Paul Sartre, quoi de plus évident que d'écrire son autobiographie pour parvenir à ressaisir sa propre préhistoire ? Pourtant, ce n'est qu'en 1964 (vers 60 ans) qu'il publie Les Mots, une autobiographie partagée en deux thèmes « Lire » et « Ecrire », dans laquelle il raconte son enfance de quatre à onze ans ; une enfance précoce, vouée à sa jeune mère et à la littérature. Dans cet extrait de la fin de la partie « Lire », Sartre se souvient des promenades avec sa mère dans les jardins du Luxembourg. Il met en scène le traumatisme de l'exclusion mais aussi, en tant qu'auteur adulte, un facteur déterminant pour sa vocation littéraire.
[...] Conclusion Sartre évoque donc une scène d'exclusion comme une épreuve traumatisante mais aussi comme une expérience qui l'a fortifié et mené à suivre sa vocation littéraire. Deux points de vus sont par conséquent intimement mêlés dans cet extrait : celui de l'enfant et celui de l'adulte. D'un côté, Sartre se remet dans la peau de l'enfant qu'il a été pour évoquer sa souffrance, d'un autre côté, il porte sur cette scène, sur sa mère et sur son physique, un regard d'adulte. [...]
[...] L'enfant semble dominer les autres qui l'ont rejeté du haut de son perchoir De plus, cet imaginaire permet à l'enfant de se venger : je me vengeais de mes déconvenues Cette vengeance, bien qu'imaginaire, lui permet de ne pas sombrer dans le désespoir et de retrouver sa dignité. L'imaginaire est donc pour lui un refuge, un exutoire qui le sauve ; mais l'extrait montre bien que l'auteur se détachait du reste des enfants pas une supériorité d'esprit. De là vient peut-être son exclusion. [...]
[...] Dans cet extrait, l'auteur est donc présent et porte sur la scène, un jugement et une lucidité d'adulte. De plus, Sartre monter que l'exclusion l'a conduit à se réfugier dans l'imaginaire et donc, dans la littérature. En effet, vers la fin de l'extrait, le vocabulaire de l'imaginaire reparaît : mes songes massacre de cent reîtres Ce retour de l'imaginaire est confirmé par l'emploi du verbe retrouvais dont le préfixe d'itération montre clairement l'idée que l'auteur est parti de l'imaginaire et y retourne après avoir été exclu du monde réel. [...]
[...] A partir de là, sa réaction diffère de celle de son fils : elle cachait mal son indignation Sartre s'abaisse alors qu'elle sait que les autres ont tort. Elle tente donc de le lui montrer et de dédramatiser la situation : Pour me sauver du désespoir, elle feignait l'impatience ; voyant qu'elle ne peut l'aider, elle s'associe à son exclusion : elle prenait ma main nous allions d'arbre en arbre toujours implorants, toujours exclus Sartre montre par là que sa mère a toujours cru en lui et l'a aidé comme elle a pu à surmonter cette épreuve. [...]
[...] Ce traumatisme montre donc pour l'auteur, au moment où il écrit, l'ironie du sort. Tout d'abord, l'auteur adulte est présent dans le texte et apporte un jugement et des remarques d'adultes sur la scène. L'extrait est lancé par un présentatif qui introduit une remarque que seul l'auteur adulte peut faire : il y avait une autre vérité Cette remarque est à mettre en corrélation avec une autre qui émane elle aussi de l'auteur en tant qu'adulte : mes vrais juges L'auteur insiste sur le fait qu'il y avait un vrai donc un faux. [...]
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