Le thème de la « Bête humaine » ne concerne pas qu'une œuvre de Zola, d'autres l'ont traité, chacun avec une originalité, une approche qui lui est propre : Balzac (« Un passion dans le désert »), Flaubert (« La légende de Saint Julien l'Hospitalier »), et Mérimée dont nous nous intéressons ici à l'apport au thème. Prosper Mérimée est un écrivain, historien, archéologue français du XIXème siècle. Ethnologue à ses heures, il s'intéresse de près au folklore et aux légendes, c'est ainsi qu'il écrit en 1869 « Lokis », nouvelle inspirée d'une légende lithuanienne, reprenant de nombreux écrits dont ceux de Mickiewicz (son texte sur le paradis originel animal, d'où l'ours s'est par mégarde échappé). « Lokis » raconte l'histoire d'un homme, le comte Szémioth, dont la mère a été enlevée par un ours avant de lui donner naissance. De nombreux indices laissés par Mérimée dans le texte laissent à penser que le comte est un être mi-homme mi-ours, mais jamais Mérimée ne le dit explicitement, il laisse le lecteur interpréter. Le comte et le professeur Wittembach, qui raconte l'histoire, se sont rendus au château de Dowghielly, ils passent la soirée avec Iulka (presque fiancée au comte) et restent dormir là bas, tous deux dans la même chambre. C'est là que commence l'extrait que nous allons étudier : le comte range ses armes dans une armoire et confie faire cela car il a failli tuer un homme dans un accès de somnambulisme, puis il s'endort et parle dans son sommeil, prononce des paroles inquiétantes, incohérentes, et se réveille après avoir mordu son coussin. Il précède un dialogue sur la dualité de l'homme et les origines du comte (sa mère est folle) : ce discours est amorcé par notre extrait, qui en oriente la lecture. L'enjeu de cette étude est de trouver les procédés auxquels recourt Mérimée afin de suggérer la bestialité du comte, sans toutefois trancher. Comment le point de vue du professeur joue-t-il avec la subjectivité afin de semer des indices ? En quoi le comportement du comte est une révélation de sa nature et une préfiguration de la fin tragique de la nouvelle ? Enfin, en quoi les données mythologiques, folkloriques et religieuses nourrissent-t-elle cette ambiguïté, orientent-elles la lecture ?
[...] La lecture sera donc moins orientée pour le reste des lecteurs, même si le fond de la nouvelle est facilement compris avec les deux points précédents quant à l'orientation de la lecture, à savoir la narration subjective du professeur et le comportement ambigu du comte. Pour conclure, notre lecture de ce texte et de toute la nouvelle est orientée par la narration du professeur, qui dissémine des indices, interprétations (parfois erronées afin de nuancer l'hypothèse). Il nous rapporte le comportement du comte, insistant sur son étrangeté, faisant de lui un être différent, aliéné par un animal. [...]
[...] Cette narration, l'énonciation, les références relevant d'une culture personnelle et tout ce réseau relèvent de la subjectivité de ce qui nous est raconté. On trouve ainsi de nombreuses formules relevant de la perception, du ressenti : à ma grande surprise me troubla un peu je ne pouvais m'empêcher il parut j'attribuais une heure peut-être Ces expressions révèlent des hypothèses que fait le professeur, qui interprète le comportement et les paroles du comte : il pense que le comte pourrait l'étrangler de par sa carrure imposante, mais il n'en a pas manifesté la moindre intention ou le moindre indice avant- coureur, ce n'est qu'une pure spéculation, qui nous induit cependant sur la piste de la dualité du comte. [...]
[...] Cependant les références les plus nombreuses sont aux données antiques : carrure herculéenne Horace et la citation. La comparaison entre la carrure du comte et Hercule/Heracles est d'autant plus forte qu'Hercule est lui même un être hybride, fils d'un dieu et d'une mortelle, un être demi-dieu/demi homme, dont la double nature se manifeste par sa force prodigieuse. La référence à Horace sert à montrer l'érudition du personnage, mais également à relier mythologie et folklore, qui sont mêlés dans cette nouvelle. [...]
[...] Commentaire composé Lokis Mérimée pp. 210-211 Il prit son fusil [ ] si fort qu'il se réveilla Le thème de la Bête humaine ne concerne pas qu'une œuvre de Zola, d'autres l'ont traité, chacun avec une originalité, une approche qui lui est propre : Balzac Un passion dans le désert Flaubert La légende de Saint Julien l'Hospitalier et Mérimée dont nous nous intéressons ici à l'apport au thème. Prosper Mérimée est un écrivain, historien, archéologue français du XIXème siècle. Ethnologue à ses heures, il s'intéresse de près au folklore et aux légendes, c'est ainsi qu'il écrit en 1869 Lokis nouvelle inspirée d'une légende lithuanienne, reprenant de nombreux écrits dont ceux de Mickiewicz (son texte sur le paradis originel animal, d'où l'ours s'est par mégarde échappé). [...]
[...] Comment le point de vue du professeur joue-t-il avec la subjectivité afin de semer des indices ? En quoi le comportement du comte est une révélation de sa nature et une préfiguration de la fin tragique de la nouvelle ? Enfin, en quoi les données mythologiques, folkloriques et religieuses nourrissent-t-elle cette ambiguïté, orientent-elles la lecture ? Le premier élément qui guide notre lecture est la narration : le narrateur peut sélectionner les informations à nous transmettre, nous les communique sous son point de vue et influence notre perception par divers procédés. [...]
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