N'est-ce pas le désir, lié au manque de l'objet désiré, qui donne à celui-ci plus de charme, en le parant des prestiges de l'imagination et qui donne naissance à une forme de bonheur à l'être qui désire ? Rousseau, dans cet extrait tiré de Julie ou la Nouvelle Héloïse, s'intéresse à la relation entre le désir et le bonheur. Il défend la thèse selon laquelle le bonheur provient du désir et de l'univers qu'il se crée, plus que sa réalisation qui est rendue décevante par la sublimation de l'objet désiré. Ainsi, Rousseau montre le désir comme une alternative au bonheur et à la réalité, qu'il se suffit à lui-même et que le désir est l'essence de l'Homme.
[...] Cet extrait commence par une phrase annonciatrice de l'argumentation de l'auteur. En effet, il dit que si le désir n'est pas satisfait, et donc que nous ne sommes pas dans un état de jouissance et de plaisir d'obtenir l'objet désiré, l'illusion nous fait, en attendant, prendre nos désirs pour des réalités Le désir permet de trouver une alternative au bonheur et à la réalité Tant qu'on désire [ ] que la passion qui le cause Et ainsi, le désir nous permet d'imaginer notre futur bonheur. [...]
[...] En effet, l'homme, avide et borné, fait pour tout vouloir et peu obtenir, a reçu du ciel [de Dieu] une force consolante qui rapproche de lui tout ce qu'il désire, qui le soumet à son imagination, qui le lui rend présent et sensible, qui le lui livre en quelque sorte, et, pour lui rendre cette imaginaire propriété plus douce, le modifie au gré de sa passion. Mais tout ce prestige disparaît devant l'objet même ; rien n'embellit plus cet objet aux yeux du possesseur ; on ne se figure point ce qu'on voit ; l'imagination ne pare plus rien de ce qu'on possède, l'illusion cesse où commence la jouissance. [...]
[...] De plus, nous pouvons reprendre le début de l'extrait où l'auteur explicite clairement l'autosuffisance du désir Ainsi, cet état se suffit à lui-même puisque si on peut être heureux simplement dans le désir, à quoi bon vouloir les assouvir au risque d'être déçu et en souffrir ? Rousseau continue en disant que finalement la vie se réduit à ce qui n'existe pas dans sa réalité, une réalité où le désir se suffit à lui-même. Quoi de plus beau que de vivre avec ce qui n'est pas et imaginer ce que cela pourrait être Il n'y a rien de beau que ce qui n'est pas puisque l'humanité n'est pas, selon l'étymologie de néant, qui veut dire non-étant et tel est le néant des choses humaines que seul est Dieu l'Être existant par lui-même Dans ce dernier paragraphe, l'auteur modère quelque peu ces propos. [...]
[...] Mais est-ce que le bonheur ne peut être que dans la souffrance de l'insatisfaction et le manque ? Tout d'abord, on peut reprocher à l'auteur la vision qu'il a du désir, le fait que le désir suffise à nous rendre heureux. Pourtant, Rousseau utilise à 3 reprises le mot passion (L.3,L.12,L.19) qui étymologiquement veut dire souffrance Le désir insatisfait est source de souffrance même si l'Homme est un être qui sera à jamais insatisfait et dont le désir est un moyen de combler ce qui manque à son existence. [...]
[...] Et là se trouverait le vrai bonheur, la tentative de combler un vide. Pourtant, ne vivre le bonheur que dans le désir serait priver l'Homme de vivre sa vie pleinement avec toutes les joies, plaisirs, peines et souffrances qu'elle comporte. L'Homme doit plus qu'imaginer combler ce vide, tenter de le combler de manière concrète quitte à en souffrir. Finalement, le bonheur est-il vraiment possible ? Le bonheur est une aspiration commune à tous les individus, la recherche d'un état constant et durable de satisfaction. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture