Le Double ne rencontre pas le succès escompté par Dostoïevski, ce qui pousse ce dernier à pratiquer de nombreuses rectifications, réécritures de ce roman, tout en approfondissant sans cesse ce qui l'obsédait : la problématique du double et du dédoublement de personnalité qui peut conduire jusqu'à la folie. Une scène de 4 pages termine le roman, des pages 273 à 277. Elles en représentent le dénouement. C'est à une fin de roman que nous avons affaire, dénouement qui fonctionne comme un miroir déformé du début du roman par certains aspects. Le personnage du médecin notamment, Krestian Ivanovitch, réapparaît de façon symétrique mais détournée par rapport au début du roman. Cette scène est une « vraie » scène de dénouement : Krestian Ivanovitch est la médiation qui envoie Goliadkine à son destin : il finit à l'asile. Ce dernier dit adieu à son double et à ses « persécuteurs » ou ennemis qui l'obsèdent. Une différence est marquée avec reste du roman : Goliadkine, en cette toute fin du Double, est résigné, accepte son sort, soumis à l'idée d'être fou et que son double devient normal et réel car tout le monde le voit. On pourrait donc déclarer que cette scène de dénouement vaut comme récapitulation, ou même comme clôture. Le roman ne semble cependant pas clos : la menace de la folie pèse, et pas que sur Goliadkine, peut-être sur tout un chacun. Les dernières phrases lient le protagoniste aux lecteurs par « notre héros », comme si la folie et la peur de la duplicité guettaient chacun d'entre nous
[...] Goliadkine, qui fonctionne comme la scène de retrouvailles avec le psychiatre, selon le modèle du miroir déformé. Il renvoie au voyage en carrosse au début du roman, qui était lui, décidé par Goliadkine, la destination étant choisie (le palais), délibérée. Ce dernier voyage là est différent, c'est un voyage forcé (plus de liberté), il va vers une ultime destination (l'asile), plus choisie mais subie. Dostoïevski insiste sur la caractère forcé et subi de l'entreprise : il utilise vocabulaire significatif : geste impérieux (à deux reprises, p.274), le faire asseoir (p.275) Goliadkine montre la différence entre lui, individu unique, et la masse de personnes qui le pousse à partir tout l'escalier ( ) empli de monde de partout tout le monde attendait la foule p.275). [...]
[...] Le sens de cette méthode de nomination est de montrer que cette phrase pourrait se rapporter à chacun d'entre nous : Je poussai un cri et me pris la tête dans mes mains C 'est le moyen d'affirmer que cette folie, cette menace du dédoublement pèsent sur tout un chacun. Les questions et problèmes d'identité, et surtout le mal-être qu'ils procurent, sont le lot de chaque individu. On a là une vision assez pessimiste de Dostoïevski qui n'y voit aucun salut. [...]
[...] Goliadkine p.275). Notons, enfin, un détail intéressant : la souffrance de Goliadkine est ressentie physiquement et moins intériorisée qu'à l'habitude encore un contraste entre présent et passé qui renforce l'idée d'un dénouement. Destin du protagoniste scellé Un autre caractère de cette scène finale comme scène de dénouement est visible : on sait ce qui arrive au protagoniste et sur quelle situation se termine le roman. M. Goliadkine va à l'asile, qui n'est pas nommé mais définie d'une manière encore plus claire et explicite p.277 par le psychiatre : lochement d'Etat, jauffache, licht et service combris M. [...]
[...] -4ème et dernière étape : On assiste à un retour au regard, ce qui renforce l'idée de dénouement (circularité et caractère donc clos de l'adieu car il y a déjà eu un regard déjà dans la 1ère étape). Goliadkine, dans son carrosse, voit son double lui envoyer toutes sortes de petits baisers ( ) en signe d'adieu (p.276). C'est un moyen de rendre ridicule l'adieu et d'enlever tout crédit et toute dignité à Goliadkine. Il est oublié, pas remplacé, car son double ne fait pas que prendre sa place, il l'améliore. [...]
[...] Il ne sera donc jamais en paix. Une scène à valeur de dénouement Séparation d'avec les autres personnages : comme un passage en revue pour un dernier lever de rideau Malgré son caractère déformé cette scène a cependant une fonction initiale : c'est une scène de dénouement. Et, dans une scène de dénouement, comme son nom l'indique, c'est le nœud de l'intrigue qui se défait : et ça passe souvent par une revue des nombreux personnages du roman et le règlement de leurs destins en tout cas de leurs rapports-. [...]
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