Aimé Césaire est né en 1913 aux Antilles où il passe son enfance. Après des études à Paris, Aimé Césaire, Martiniquais, opère un « retour au pays natal » en 1939 et revendique son appartenance à ce peuple déraciné. Le Cahier d'un retour au pays natal est un très long poème en prose dont la première section dénonce la misère du peuple tout en refusant l'exotisme : cette partie est rythmée par le refrain « Au bout du petit matin », repris systématiquement. Dans ces deux paragraphes, Aimé Césaire se souvient de sa vie d'enfant dans un milieu miséreux. Mais, parce qu'il s'agit du retour de l'adulte-poète, nous assistons à une transfiguration de cette misère, qui est aussi une dénonciation violente.
[...] Et le lit de planches d'où s'est levée ma race, tout entière ma race de ce lit de planches, avec ses pattes de caisses de Kérosine, comme s'il avait l'éléphantiasis le lit, et sa peau de cabri, et ses feuilles de banane séchées, et ses haillons, une nostalgie de matelas le lit de ma grand-mère. Plan I. Une vie quotidienne misérable La maison La famille Le dégoût essentiel II. La transfiguration par le poète Une évocation symbolique La misère d'un peuple entier Commentaire Aimé Césaire est né en 1913 aux Antilles où il passe son enfance. [...]
[...] En réalité, cette famille sans nom représente la misère d'un peuple entier. Césaire commence par évoquer les enfants pour aboutir à la grand- mère : le temps n'a plus de valeur de succession pure, il est un temps prophétique. Un glissement explicite se fait de la famille au peuple. Et le lit de planches d'où s'est levée ma race, tout entière ma race de ce lit de planches intervient après les points de suspension qui signalent un changement de perspective. [...]
[...] Les bruits eux-mêmes sont rapprochés d'odeurs : «crépitement de friture du vent sur le toit et fumée des brindilles Enfin, l'ensemble croule sous une ancienne odeur de pétrole, celle des bidons qui constituent le toit ou les pieds du lit. Le dégoût tient aussi à un aspect maladif généralisé. Au père fantasque dépressif, répliquent les explosions purulentes de la case gerçant d'ampoules comparée à l'arbre malade de la cloque ; les sonorités en qui encadrent l'image case / cloque illustrent cette calamité. Enfin, le lit souffre d'un éléphantiasis c'est-à-dire d'une monstrueuse difformité. [...]
[...] Dans ces deux paragraphes, Aimé Césaire se souvient de sa vie d'enfant dans un milieu miséreux. Mais, parce qu'il s'agit du retour de l'adulte-poète, nous assistons à une transfiguration de cette misère, qui est aussi une dénonciation violente. La maison, une case en bois se trouve dans la rue Paille très étroite Le mot maison est toujours accompagné d'un qualificatif diminutif : petite et même minuscule Césaire n'en décrit que le toit en morceaux de bidons de pétrole et en pâte grise . [...]
[...] L'étrangeté de ces deux noms, signe de l'industrialisation dans un pays misérable, lance une accusation qui dérange l'ordre, le bouleverse, avec pour mission ultime d'en instaurer un autre, de créer un nouvel univers. Ainsi ce texte du Cahier d'un retour au pays natal a-t-il une signification politique autant que poétique et prophétique. Car donner sa voix de poète au pays déshérité, c'est lui redonner sa dignité. Césaire, dans son Discours à André Malraux (1966), résumait ainsi sa situation de poète : La poésie est cette démarche qui par le mot, l'image, le mythe, l'amour et l'humour m'installe au cœur vivant de moi-même et du monde. [...]
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