Dix ans après la Défense et Illustration, cinq ans après son départ pour Rome, Du Bellay, âgé de trente-six ans, publie ses œuvres les plus célèbres et les plus personnelles : les Antiquités et les Regrets. Cette publication précède de deux ans sa mort. Ces dates et ces données biographiques permettent de comprendre la déception et la poignante inspiration qui s'expriment dans le sonnet élégiaque : Las ! Où est maintenant...
[...] Ce désir de gloire caractérise l'âme honnête c'est-à-dire éprise d'honneur, de grandeur. L'ardeur poétique, l'enthousiasme platonicien embrasaient le poète de leur honnête flamme et le plaçaient au-dessus du vulgaire; Du Bellay se fait de la poésie une conception noble, aristocratique : Odi profanum vulgus, écrivait Horace. Et Baudelaire dira : Je sais que vous gardez une place au Poète Dans les rangs bienheureux des saintes Légions. Tout ce premier quatrain se recommande par la fermeté du vers qui ne contient qu'une phrase, par la force du rythme, les allitérations exprimant le mépris. [...]
[...] Où est maintenant . Las! Où est . Ce début est tout poétique : alors que le vulgaire se satisfait pleinement du temps présent, sans jamais douter de soi, le poète a le sentiment de la fuite du temps, de sa propre transformation, la nostalgie du bonheur perdu, le désir de ce qu'il n'a plus. Jadis, Du Bellay, nourri de l'idéal antique des stoïciens, méprisait noblement les événements fortuits qui échappent à la volonté généreuse. Comme un tranquille héros, il triomphait du destin grâce à son cœur altier; comme Pindare, Horace, Virgile, il aspirait à l'immortalité que confère la poésie, sans se soucier des accidents de la vie. [...]
[...] L'idéal antique des stoïciens. Un héros qui triomphe du destin. Une conception noble de la poésie. II. La perte de l'inspiration. Les doux plaisirs. Une description impressionniste. Une délicate douceur. III. Retour à la réalité. La déchéance morale. [...]
[...] L'inversion et la césure du vers 13 expriment cette vaine recherche de l'enthousiasme envolé. Le dernier vers est très frappant, suggestif, mystérieux et rappelle bien le tableau de la deuxième strophe. Les coupes supplémentaires aux quatrième et huitième pieds qui donnent le même rythme + à chaque hémistiche, la voyelle non accentuée es aux quatrième et huitième pieds, donc avant la coupe, la répétition des expriment cette distance, cette inimitié qui séparent maintenant le poète et ses inspiratrices. Et les Muses / de comme étranges,// s'enfuient. [...]
[...] Le vers 10 répond au deuxième le poète a perdu sa fermeté de caractère, sa maîtrise de soi, sa volonté. Alors qu'au début il se sentait supérieur à la masse, il se trouve maintenant esclave des petits événements contingents qui ne devraient pas toucher un stoïcien. Il regrette son pays natal, il s'en veut de n'être pas resté en France, à la Cour, où Ronsard, et même certains poètes sans mérite jouissent de leurs succès, de la gloire, sont richement pensionnés et sont à l'abri de tout souci. [...]
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