En choisissant la satire comme point de départ à la critique des vices de son temps, Boileau a renouvelé une forme laissée à l'abandon, qui, d'un genre jugé bas et calomnieux, est parvenu à lui redonner un attrait esthétique qu'elle ne possédait pas auparavant. Naviguant ainsi entre le moralisme et l'esthétisme, notre auteur a atteint une popularité qui en a fait un auteur classique par excellence. Cependant, est-il justifié de dire de Boileau qu'il n'atteint jamais les frontières de ces deux genres ?
[...] Effectivement, si le Sublime permet d'allier vérité et justesse de la pensée, il suffirait de pouvoir démontrer que Boileau est un auteur sublime pour pouvoir dire que celui-ci n'a pas à choisir entre Morale et Esthétique, et que ces deux finalités se retrouvent de manière complète dans son œuvre. Il va falloir pour cela étudier comment le Sublime est évoqué dans la littérature, et en quoi il est mis à profit si l'on peut dire, dans la poétique de Boileau. [...]
[...] Pour finir, le texte de Boileau incorpore un discours métatextuel qui intègre à la Satire un passage durant le repas où la discussion porte sur les auteurs contemporains. Par cette épuration du texte, son élévation, on peut donc constater que Boileau va chercher à sortir la satire de sa bassesse. Le travail du texte dans sa forme va permettre de donner un véhicule à la morale plus apte à toucher le lecteur. Ainsi, nous pouvons d'ores et déjà supposer que chez Boileau le discours moral et l'esthétique du vers ont un rapport très ténu. [...]
[...] L'esthétisme serait alors plus un moyen efficace pour toucher le lecteur qu'une propre fin en soi. Ceci explique alors pourquoi, dans son Art poétique, Boileau énonce que la rime n'est qu'une esclave et ne doit qu'obéir : l'esthétisme ne serait alors pas le but à atteindre, mais simplement un outil de travail employé de manière incomplète, même si elle fait l'objet d'un travail important de la part de l'auteur. Ainsi, nous pouvons constater que les deux tendances d'esthétisme et de moralisme sont employées par l'auteur, mais ne paraissent pas atteintes dans leur totalité. [...]
[...] En conclusion, dire que Boileau parcourt librement le champ qui s'étend entre moralisme et esthétisme sans jamais atteindre une de ces deux frontières» est à la fois assez vrai si l'on n'envisage cette affirmation que dans son sens métapoétique, c'est à dire, comme le dit l'énoncé, que ce voyage constitue une histoire qui est elle-même un long poème Cependant, si l'on cherche à creuser dans ce sens, on conviendra rapidement que ce serait limiter l'œuvre de Boileau que de vouloir le réduire à cette oscillation métatextuelle : effectivement, ce voyage entre moralisme et esthétisme est plus une heureuse conjonction allant dans le sens du Sublime, où l'esthétisme se met au service de la morale dans la construction du Beau. [...]
[...] Cette volonté de travailler le texte est en opposition avec l'idée d'un style bas comme il a été dit quelques lignes plus haut. Effectivement, Boileau va énormément travailler son texte, le purifier, dans la volonté de donner à la morale une plus grande efficacité : on est bien loin de certaines traductions obscures de Juvénal. Pour ne donner qu'un exemple, comparons la Satire V de Juvénal, et la Satire III de Boileau, qui traitent toutes deux d'un mauvais repas, mais dont la morale diffère. La première, de vocabulaire généralement bas et surtout très obscur, nous raconte un repas chez un grand maître. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture