Chef d'oeuvre, passé, actuel, Antonin Artaud, Un Coeur simple, besoin, société, contexte historique, artiste, France, Révolution française, contenu, La Littérature en péril, Le Père Goriot, Zola, Gargantua, L'Assommoir, utilité historique, La Princesse de Montpensier, Gustave Flaubert, Shakespeare, Le Tartuffe, Molière, Louis XIV, forme, originalité, roman, classiques, amour, adultère, Robbe-Grillet, caractère intemporel, Les Fables de La Fontaine, lecteur
L'artiste peintre Pierre Soulages est connu pour son utilisation de la couleur noire, de ses nuances et reflets. En effet, ses oeuvres sont « simplement » une toile peinte en noir. Nous, contemporains, pouvons déceler le sens de ses oeuvres, comprendre que celui-ci souhaite représenter la noirceur de notre monde et de notre société, par exemple après les horreurs de la Seconde Guerre mondiale. En revanche, un homme du Moyen Âge jugerait probablement que ce n'est pas de l'art, que l'oeuvre n'a pas de sens. Il en va de même pour la littérature, selon Antonin Artaud. Il affirme que « Les chefs d'oeuvre du passé sont bons pour le passé. Nous avons le droit de dire ce qui a été dit et même ce qui n'a pas été dit d'une façon qui nous appartienne, qui soit immédiate, directe, qui réponde aux façons de sentir actuelles, et que tout le monde comprendra ». Il est nécessaire d'insister sur le fait qu'Artaud ne définit pas la notion de chef-d'oeuvre car son propos n'indique en aucun cas qu'une oeuvre est un chef-d'oeuvre parce qu'il est actuel. Il reconnait que des chefs-d'oeuvre ont été écrits par le passé, mais spécifie qu'ils ne sont pas utiles aux publics des siècles suivants.
[...] Un chef-d'œuvre écrit il y a plusieurs siècles s'avère-t-il complètement vide de sens, vide de tout enseignement pour les générations suivantes ? Une première partie soutient les propos d'Artaud et nous permet de montrer que la forme et le contenu du chef-d'œuvre doivent être adaptés à l'ère du temps, permettant d'éclairer les contemporains de l'auteur sur le monde qui les entoure, sur leur société. Une seconde partie s'attèlera à démontrer que les chefs-d'œuvre du passé nous sont tous aussi utiles que des chefs-d'œuvre récents. [...]
[...] Le chef-d'œuvre ancien ne s'avère pas inutile aux publics des siècles suivants. Bien que le réel décrit diffère de celui du lecteur « moderne », il lui permet d'accroitre ses connaissances tout en lui permettant de s'évader de son propre réel, d'en repousser les limites. De plus, le chef d'œuvre n'acquiert pas toujours ce statut immédiatement : le caractère novateur de l'œuvre peut dérouter le public, qui ne comprend donc pas le sens l'œuvre. On constate alors que ce n'est pas tant parce qu'elle est récente ou ancienne qu'une œuvre est utile au lecteur : c'est bel et bien sa forme et son contenu qui priment. [...]
[...] Si le chef-d'œuvre intéresse d'autres publics, c'est qu'il ne vise en réalité personne. Selon Michel Butor dans Répertoire II, une œuvre acquiert de la valeur lorsqu'elle constitue une véritable recherche de soi pour l'auteur et le lecteur, ils se révèlent dans l'écriture, tandis que l'œuvre commerciale est étroitement adaptée à un public (texte 8). La lecture d'une grande œuvre, ancienne comme récente, est utile au lecteur puisqu'il doit être actif et chercher, connaitre, se reconnaitre. Les Fables de La Fontaine illustrent parfaitement ce principe. [...]
[...] De même, les questions posées autour de la notion de justice, de savoir ce qui est juste dans Iphigénie et Médée, respectivement paru au XVIIe et au IVe siècle av. J.-C. prouve que la notion de justice est intemporelle et le chef-d'œuvre, même ancien, reste utile à tout lecteur. Si l'œuvre est un chef-d'œuvre récent, c'est que son contenu et sa forme constituent une nouveauté pour le public contemporain. Par exemple, dans La Jalousie de Robbe-Grillet appartenant au Nouveau Roman, la forme n'est plus simplement support du contenu : elle donne le contenu. [...]
[...] De plus, on sait que le propre du chef-d'œuvre est d'avoir résisté ou d'être destiné à résister au temps : son utilité n'est donc pas une question de temporalité, mais une question de qualité. Le contenu et la forme doivent à la fois être « intemporel » c'est-à-dire qu'ils doivent être compris par tous et à n'importe quelle époque, autrement il ne doit pas viser de public, mais doit chercher à inclure le lecteur dans la création. Celui-ci doit être actif, participe à la recherche du sens, à la recherche de lui-même afin d'enrichir l'œuvre grâce à sa lecture. [...]
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