Le récit commence par l'exposé des motifs d'une telle décision. Voltaire emploie ici son arme favorite quand il s'agit de dénoncer une pratique dont il veut faire ressortir l'absurdité : l'ironie. Celle-ci consiste à adopter le raisonnement et le langage de ceux qu'il attaque en les poussant à un tel degré d'ineptie que la position de l'adversaire s'écroule d'elle-même (...)
[...] Première lézarde dans l'édifice de ses convictions, le doute ne va pas encore jusqu'à une remise en cause de l'optimisme. La suite du discours est une sorte de complainte sur le sort tragique de ses compagnons : elle s'exprime par une série d'apostrophes oratoires : Ô mon cher Pangloss Ô mon cher anabaptiste Ô Melle Cunégonde Candide évoque avec mélancolie et de manière hyperbolique ce que représentait chacun d'eux pour lui le plus grand des philosophes le meilleur des hommes la perle des filles L'éloge s'achève par l'évocation du sort tragique qui s'est abattu sur eux, ce qui met en relief l'absurdité du destin qui semble s'abattre sur les hommes de manière aveugle et non selon un plan bien déterminé : le meilleur des philosophes a été pendu sans que je sache pourquoi Pourquoi le bon anabaptiste est-il mort alors qu'il cherchait à venir charitablement à l'aide de son prochain? [...]
[...] Voltaire est parfaitement cohérent dans la description de la perception du monde par ses héros, leur optimisme devant logiquement les amener à considérer que leur cachot était le plus agréable des cachots dans le meilleur des mondes possibles. L'autodafé : le spectacle burlesque d'un rituel barbare. Voltaire veut éviter ici que son lecteur ne s'attendrisse trop sur le sort des malheureuses victimes. Certes, la barbarie de la cérémonie réside bien dans le fait que trois d'entre elles brûleront à petit feu; mais il s'agit aussi pour Voltaire de sauver nos deux héros, Candide et Pangloss, car, pour poursuivre le récit, il serait impossible de les faire renaître de leurs cendres. [...]
[...] L'invention par Voltaire de ce second tremblement de terre a donc pour but de faire s'effondrer l'édifice de mensonges et de cruauté qu'a bâti au cours des siècles passés l'Inquisition. De l'effet du tremblement de terre et de l'autodafé sur les convictions de Candide. - C'est d'abord au niveau de son corps que Candide ressent douloureusement les effets de l'autodafé : après le traitement qu'il vient de subir, Voltaire nous le décrit en état de choc, en insistant sur sa souffrance, par une accumulation d'adjectifs (ou de participes à valeur d'adjectifs) avec reprise anaphorique de l'adverbe tout pour les deux derniers : Candide épouvanté, interdit, éperdu, tout sanglant, tout palpitant, se disait à lui-même - puis, pour donner un accent de vérité plus grand à ses méditations, Voltaire le fait s'exprimer au style direct. [...]
[...] VOLTAIRE : Candide Chap : Comment on fit un bel auto-da-fé pour empêcher les tremblements de terre, et comment Candide fut fessé. Introduction : Le chapitre 6 constitue un nouvel épisode dans la découverte du mal : Candide va être confronté non plus à la présence du mal physique, comme dans la tempête et dans le tremblement de terre de Lisbonne, mais a un aspect du mal moral, dont les hommes seuls sont responsables. Circonstance aggravante, ce mal est perpétré par les adeptes de la religion chrétienne, qui est censée prêcher l'amour du prochain, la tolérance et, au siècle des Lumières, une croyance débarrassée de toute superstition. [...]
[...] Des diables, des flammes, décorent ces costumes, en représentant symboliquement, par certains détails, la gravité des fautes : ainsi pour Candide les flammes sont renversées et les diables n'ont ni griffes ni queue. Les flammes de Pangloss sont bien droites et ses diables ont une queue et sont représentés toutes griffes dehors. Notons que Voltaire n'a nullement inventé cette symbolique ridicule : elle était décrite, par exemple, dans l'article Inquisition du Dictionnaire des termes d'art et de sciences (1694); mais il s'est empressé de la reprendre dans sa propre description de l‘autodafé. [...]
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