Le texte livien fournit trois grandes interventions d'oiseaux dans l'histoire des premiers siècles de Rome. Les deux premières, à savoir les vautours apparaissant à Romulus au moment de la fondation de la ville et l'aigle décoiffant et recoiffant tour à tour Lucumon, s'inscrivent dans le schéma de la divination romaine . Les vautours répondent à l'acte d'inauspicatio de Romulus : ils rendent manifeste la volonté des dieux interrogés rituellement par le héros fondateur. Il s'agit d'auspicia impetratiua, c'est-à-dire d'auspices sollicités pour savoir si les dieux sont favorables ou non à l'action qu'est sur le point de réaliser une personne. L'aigle, quant à lui, apparaît à l'improviste. Lucumon n'a rien demandé, mais la sanction divine lui est ouvertement accordée : nous sommes en présence d'auspicia oblatiua. L'auspice, correctement interprété par Tanaquil, son épouse, lui prédit un avenir royal. L'accent est mis ici sur l'interprétation donnée à l'omen divin. Le signe n'est pas entièrement signifiant par lui-même, car sinon il serait par trop contraignant. C'est pourquoi les Romains se sont octroyés des champs d'action et de liberté en établissant la possibilité de refuser (refutare ou repudiare) des signes défavorables. Ici, bien sûr, la divinité donne son approbation et les personnes s'empressent de l'accepter.
Le troisième oiseau est le corbeau qui vient aider activement le soldat Marcus Valérius Corvinus. Nous ne sommes plus ici dans le cadre de la divination ni même de la religion romaine. L'interprétation de cet épisode hautement épique et tout à fait unique dans l'histoire de la ville est donc à chercher du côté des croyances d'un autre peuple, les Gaulois, comme nous allons le voir.
[...] Cette prédiction de grandeur et de pérennité a son revers : elle annonce implicitement et suppose une fin, démentant ainsi le concept d'imperium sine fine qui domine l'histoire impériale[16]. Il est incontestable qu'elle a suspendu une épée de Damoclès au dessus de l'Empire romain et que chaque défaite était rapprochée de ce terme fatal. De fait, Tite-Live, plus de sept cents ans après la fondation de Rome, ressent déjà ce déclin annoncé. C'est en partie pourquoi il s'attache à la naissance de la ville et à son développement avant de s'attaquer à sa décadence. [...]
[...] La trahison des dieux 3. Le casque et le nom 4. Un récit à couleur d'épopée Le texte livien fournit trois grandes interventions d'oiseaux dans l'histoire des premiers siècles de Rome. Les deux premières, à savoir les vautours apparaissant à Romulus au moment de la fondation de la ville et l'aigle décoiffant et recoiffant tour à tour Lucumon, s'inscrivent dans le schéma de la divination romaine[1]. Les vautours répondent à l'acte d'inauspicatio de Romulus : ils rendent manifeste la volonté des dieux interrogés rituellement par le héros fondateur. [...]
[...] Hubaux, Romulus et l'horoscope de Rome et le premier terme assigné à Rome est franchi dans Les Grands Mythes de Rome, Paris, Presses Universitaires de France (Mythes et Religions), pp. 1-16 et pp. 17-26. S. Reinach, Une prédiction accomplie dans Cultes, Mythes et Religions, pp. 621-627. Id., ibid., p J. Hubaux, Les Grands Mythes de Rome, pp. 151-155. Prieur, Les Animaux sacrés dans l'Antiquité, pp. [...]
[...] Bloch, Tradition étrusque et tradition celtique dans l'histoire des Premiers Siècles de Rome p et p ; Tite-Live et les Premiers Siècles de Rome, p R. Bloch, Tradition étrusque et tradition celtique dans l'histoire des Premiers Siècles de Rome p Aulu-Gelle, Nuits Attiques, IX : Auguste le divin prit soin de dresser sur son forum une statue à ce Corvinus. Sur la tête de la statue est représenté un corbeau, souvenir de l'affaire et de la bataille dont nous avons parlé. [...]
[...] Son cri est rapproché du mot cras signifiant demain Il rappelle ainsi que la vie s'achève un jour, et que ce jour se rapproche un peu plus à chaque instant. Il est donc tout à fait étonnant de voir un corbeau venir au secours d'un Romain dans une légende connue et parfaitement admise des origines de Rome. Ici, il n'y a nul doute possible sur l'espèce de l'oiseau : le surnom même de Corvus ou Corvinus en est la preuve et grave à jamais le corbeau dans l'esprit des hommes sur le casque de Marcus Valérius. [...]
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