Dissertation sur le théâtre comique, par comparaison avec le théâtre tragique, et ce, par le biais de la théorie de Bergson sur Le Rire, à savoir que ce qui nous fait rire est du mécanique plaqué sur du vivant.
[...] Le théâtre lui-même relève de l'imitation, et c'est pour cela que le comique s'y épanouit. Mais ce n'est pas une imitation innocente : le théâtre comique, et terminons là dessus, nous présente avant tout du comique de caractère, qui, certes, nous semble éloigné du principe de mécanique plaqué sur du vivant de Bergson, mais qui répond aussi à cette théorie. Ce sont en effet des caractères, soit des types que nous présentent les comédies, et les personnages perdent leur individualité au profit d'un trait de caractère, raide. [...]
[...] D'autre part, si le comique s'adresse à notre intelligence seule, c'est là une idée qu'il faut préciser : c'est en effet à notre logique qu'elle fait appel ; pas cependant à la logique de la raison, mais à la logique de l'imagination : C'est quelque chose comme la logique du rêve, mais d'un rêve qui ne serait pas abandonné au caprice de la fantaisie individuelle, étant le rêve rêvé par la société entière. [ . ] Cette interprétation des images ne se fait pas au hasard. [...]
[...] Ce principe va à l'encontre de la conscience humaine, qui par définition n'est autre qu'une perpétuelle intentionnalité, et pour nous en convaincre, disons que le personnage comique n'est pas conscient du fait qu'il est ridicule, comme Harpagon n'est pas conscient de son avarice (dans L'Avare de Molière) qu'il chercherait sinon à endiguer, ou du moins à cacher au regard des autres. Et penchons-nous sur quelques-unes des diverses formes de comique que nous pouvons rencontrer au théâtre, pour en extraire la raideur qui nous fait rire, et qui semble taire à l'intérieur du personnage comique tout principe émotionnel, en nous appuyant sur des exemples, dont Ubu Roi d'Alfred Jarry, qui exalte à mon sens une mosaïque d'effets comiques pour un résultat grandiose. [...]
[...] C'est ainsi que Bergson ne se lasse pas de répéter que le rire doit avoir une signification sociale : le rire semble infini puisqu'il appelle un écho (et se répercute de proche en proche) mais il est pourtant bel et bien fini, le cercle dans lequel il évolue est fermé, c'est celui d'une société donnée (et les jeux de mots sont souvent intraduisibles d'une langue à une autre), au contraire de la tragédie dont je crois la portée universelle. Nous venons ainsi de démontrer que le rire nécessite, comme le dit Bergson, une anesthésie du coeur pour opérer sa critique dans le cercle fermé de la société, et nous avons précisé à cette occasion que les personnages devaient être peu précisés dans leur individualité pour faire rire, plus encore, que la critique est sociale et non universelle. Opposons donc pour finir la Comédie à la Tragédie, pour mieux comprendre pourquoi l'une nous doit nous émouvoir, l'autre pas. [...]
[...] Exsiluere oculi disiectisque ossibis oris Acta retro naris medioque est fixa palato. (Les yeux ont jailli hors des orbites ; les os de la face sont fracassés, au point que le nez, repoussé en arrière, est venu se fixer au milieu du palais), écrit Ovide narrant la mort de Céladon, au livre XII de ses Métamorphoses et en plein coeur du combat que se livrent les Lapithes et les Centaures, traité de façon parodique, et c'est un sourire qu'inspire au lecteur l'agonie du pauvre Céladon. [...]
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