Les hommes ne vivent pas conformément à leurs principes. Bayle le prouve dans ce texte avec l'exemple des chrétiens. Ce constat lui servira à combattre l'idée selon laquelle la connaissance de Dieu porterait les hommes au Bien, alors que les athées, ignorant Dieu, seraient mauvais. Au contraire, les athées peuvent être vertueux. A qui en douterait, Bayle objecte qu'« il n'est pas plus étrange qu'un athée vive vertueusement qu'il est étrange qu'un chrétien se porte à toutes sortes de crimes. Si nous voyons tous les jours cette dernière espèce de monstres, pourquoi croirons-nous que l'autre soit impossible ? »
La méthode de raisonnement critique qui distingue l'esprit « moderne » s'appuie souvent sur l'observation. En observant les fortes oppositions qui existent entre les principes des croyants et la manière dont ils vivent que Bayle nourrit sa réflexion sur l'athée vertueux. Dans ce texte, il bâtit tout un système de suppositions en faisant intervenir un regard étranger. Il met cet étranger en situation d'imaginer la conduite de gens croyants, et cela en fonction de leurs caractères de croyants et du contenu de leurs croyances. Il lui est facile ensuite de démentir les conclusions élogieuses des observateurs étrangers en faisant allusion à la réalité.
La démonstration est construite en deux paragraphes : dans le premier le mode conditionnel domine ; il s'agit en effet d'hypothèses. Le second donne la conclusion, qui est le constat bien réel d'un décalage entre les principes avoués et le comportement réel. Le tableau qui est présenté n'est pas l'éloge des chrétiens. Le constat peut, d'après Bayle, s'appliquer à tous les croyants. Lui-même en tire la conclusion selon laquelle la religion ne garantit pas une conduite exemplaire chez celui qui croit. C'est même souvent exactement le contraire.
[...] Si le premier paragraphe reste dans le domaine de l'hypothèse. Le second, lui, se situe dans la réalité comme le souligne l'emploi de l'indicatif. La phrase par laquelle il commence ne laisse aucun doute : il s'agit de montrer la réalité des faits. Bayle tire la leçon des hypothèses précédentes et se place sur un plan général. On note en effet qu'il n'est plus question des chrétiens mais d'un homme qui a une religion L'emploi de l'article indéfini est significatif. Le constat est général et vaut pour toute religion. [...]
[...] Cette justification est exprimée avec force deux fois dans le texte. Bayle y fait formellement allusion à la croyance religieuse, accompagnée de la certitude qu'il existe un Paradis et un Enfer ; ce qui infère normalement un comportement honnête et généreux. La réalité est différente comme le soulignent un certain nombre de remarques. On remarque d'abord l'étonnement provoqué par l'idée d'un jugement si avantageux Mais d'où viendrait qu'ils feraient ce jugement si avantageux ? Cet étonnement s'inscrit dans la formulation interrogative et dans l'opposition exprimée par Mais Cette opposition est ensuite mise en relief par une série d'expressions pointant le changement d'opinion et la différence de comportement ils rabattraient on ne se conduit pas aucune conformité il fait tout le contraire L'idée de réalité opposée à la théorie est elle-même soulignée par plusieurs tournures. [...]
[...] Lui-même en tire la conclusion selon laquelle la religion ne garantit pas une conduite exemplaire chez celui qui croit. C'est même souvent exactement le contraire. L'étude du texte sera centrée sur la structure de la démonstration, puis sur le jeu d'oppositions qui met en relief les contradictions. On pourra ensuite s'intéresser au rôle privilégié que l'auteur fait jouer aux gens d'un autre monde Le premier paragraphe est construit sur un double jeu d'hypothèses : Si on donnait . et s'ils les considéraient en détail . Les deux hypothèses sont séparées par une interrogation Mais d'où viendrait . [...]
[...] Quand on compare les mœurs d'un homme qui a une Religion avec l'idée générale que l'on se forme des mœurs de cet homme, on est tout surpris de ne trouver aucune conformité entre ces deux choses. L'idée générale veut qu'un homme qui croit un Dieu, un Paradis et un Enfer fasse tout ce qu'il connaît être agréable à Dieu et ne fasse rien de ce qu'il sait lui être désagréable. Mais la vie de cet homme nous montre qu'il fait tout le contraire. Bayle, Pensées diverses sur la comète. [...]
[...] Le Mais marque l'objection. La question posée par l'auteur Mais d'où viendrait qu'ils feraient ce jugement si avantageux ? encore au conditionnel, ce qui souligne que l'on est toujours dans le domaine de l'hypothèse, suggère que le jugement émis par des gens d'un autre monde a quelque chose d'inattendu. La question est aussitôt agrémentée d'une réponse qui souligne une confusion faite par les étrangers entre la théorie et la réalité. L'explication de cette erreur est donnée dans le deuxième système hypothétique. [...]
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