Les romans médiévaux sont souvent la somme d'influences diverses. Les auteurs tentent souvent de se reposer sur le prestige d'une tradition, orale ou littéraire. L'étude génétique du mythe de Tristan et Iseut permet de lui attester des origines diverses : on retrouve des traces d'un récit irlandais, Diarmaid et Grainne, de même que d'un roman iranien, Wîs et Râmin. Le roman breton est un véritable palimpseste, ainsi, il présente une intertextualité avouée avec le Roman de Renart. À la page 221, vers 4285, Béroul écrit que Tristan connaît bien Malpertuis. Or, de Malpertuis à Maupertuis, il n'y a qu'un pas… Maupertuis étant le château où se réfugie le fripon Renart lorsque les événements tournent à son désavantage. Tristan, comme Renart, possède un sens presque magique du déguisement et une ruse intelligente liée à l'art de la belle parole.
La société médiévale était très marquée par le catholicisme, les auteurs étaient le plus souvent des clercs, ils avaient donc une formation ecclésiastique. Dans ces conditions, on peut se demander de quelle manière les auteurs cautionnaient-ils la ruse et les vices des différents personnages. Pour tenter de répondre à cette question, il conviendra d'analyser tout d'abord la dimension philosophique du mythe, puis d'analyser les deux déguisements de Tristan, pour finir par les mises en scène des antagonistes.
[...] Le nain Frocin, par cette énième dénonciation, met donc en péril l'ordre social, car il prive le pouvoir du roi des qualités guerrières de son neveu. Conclusion En conclusion, les utilisations de mensonge, de ruse et de tromperie sont avalisées dans le roman médiéval lorsqu'elles sont le fait des amants. En effet, ils sont affranchis de toute culpabilité, car ils ne sont pas considérés comme responsables de leur état. Le philtre a agi en eux comme un poison, comme une drogue les rendant inconscients de la faute qu'ils commettaient. Cette faute pose la question de la responsabilité, une interrogation centrale dans l'idéologie chrétienne. [...]
[...] Il ne veut pas qu'on le prenne pour un être normal un sage en ancien français] : il déchire ses habits, se gratte la tête et roue de coups les personnes qu'il rencontre. Il fait tondre sa chevelure blonde. Tout le monde sur la côte le croit enragé, mais ne connaît pas ses sentiments profonds. Dans sa main, il tient une massue. Il a la démarche d'un fou : chacun le hue et lui jette des cailloux à la tête.» On peut voir ici que Tristan joue à la perfection le rôle du fou, même s'il n'y a personne à duper (il est encore loin de la cour du roi Marc). [...]
[...] Peut-il y avoir faute si les personnages sont victimes? Il faut aussi noter qu'en invitant les lecteurs à ne pas se laisser berner par le monde des apparences, à dépasser celui-ci pour accéder au domaine de la senefiance, les auteurs médiévaux tentaient sans doute d'inciter le lectorat à procéder à une lecture herméneutique du récit mythique. [...]
[...] Il portait un habit de laine, sans chemise; sa tunique était en bure grossière et ses bottes étaient rapiécées. Il s'était fait tailler un manteau de bure grossière, tout noirci de fumée. Il s'était fort bien déguisé et ressemblait parfaitement à un lépreux.» La société médiévale était fortement hiérarchisée et, par ce déguisement, il faut bien voir que Tristan change de statut social. Jean Charles Payen, dans Le moyen âge, p.78-79, explique la façon dont on percevait le lépreux : ladre n'est pas seulement un malade, c'est aussi, dans la croyance populaire, un puni qui expie une souillure (telle que la copulation de ses parents pendant une phase menstruelle). [...]
[...] Jamais il ne l'aurait désirée, quelle que fût sa beauté, si elle n'avait pas porté le nom d'Yseut ou si elle avait porté le nom d'Yseut sans être belle.» On se souvient que c'est la jalousie de celle-ci qui sera la cause du décès de Tristan. Ainsi, en laissant aux apparences prendre le dessus sur la signifiance, il signe son arrêt de mort Les deux principaux déguisements de Tristan : Le lépreux et le fou a. Le lépreux Iseut se révèle un fin stratège dans le Tristan de Béroul. On se souvient qu'elle demande à Tristan de se déguiser en lépreux pour que, après avoir traversé le Gué Aventureux à califourchon sur son dos, elle puisse prononcer son ordalie (v. [...]
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