DISSERTATION DE LITTERATURE
Sujet : Un balcon en forêt, roman historique ?
Ecrivain français du XX° siècle, c'est sous un pseudonyme que Louis Poirier, écrivain
discret, signe ses œuvres. Julien Gracq se fait surtout remarquer par le refus du prix Goncourt
pour Le Rivage des Syrtes en 1951. Son œuvre originale n'entre dans aucune catégorie et son
roman Un balcon en forêt publié en 1958 situe l'action dans les Ardennes, au beau milieu de
la seconde guerre mondiale, dans un cadre spatio-temporel qui s'éloigne peu à peu de la
réalité. Son héros Grange erre entre la forêt, son lieu d'affectation et la maison de son amante,
alors que la guerre semble lointaine.
[...] Ce balcon sur la forêt est la vue qu'a Grange depuis la maison forte. Ce lieu est un lieu d'attente, entre le réel et l'imaginaire, un moment imparfait, entre deux, que les Surréalistes affectionnaient particulièrement. Breton disait que « l'imaginaire, c'est ce qui tente à devenir réel. » L'attente est à la fois un moment de joie, un moment en devenir où la déception n'a pas encore de place. Pour Gracq, ce lieu symbolise une attente personnelle, celle d'un événement qui va faire basculer le monde dans une autre dimension, celle de l'inconscient. [...]
[...] Mona symbolise alors la paix. Son personnage fait penser à une fée ou une femme-enfant : « une espèce fabuleuse, comme les licornes. » Elle incarne la fraîcheur, l'insouciance et l'innocence. L'auteur use de différentes comparaisons pour la décrire : femme-enfant, fée, licorne, fadette, sorcière ; il la compare également à des éléments de la nature comme une prairie, un cours d'eau, une cascade, une averse ou un rayon de lumière. Elle est symbole de la vie et de la nature, élément magique dans ce monde imaginaire elle devient aussi symbole de la muse. [...]
[...] D'ailleurs l'intellectuel qu'est Julien Gracq ne fait aucune analyse historique. Les personnages ne sont pas saisis dans leur dimension historique ou sociale ; on ne sait rien de la vie de Grange avant son arrivée dans les Ardennes, si ce n'est son statut d'aspirant. La forêt devient donc le lieu de la rêverie, un endroit où le sacré, le magique et le merveilleux se mêlent. La forêt devient le lieu des contes, une sorte de forêt de Brocéliande, dans laquelle chaque jour notre héros peut errer, voyager, rêver. [...]
[...] Ce balcon devient un lieu rassérénant où il se sent libre et en sécurité. De plus ce balcon est un lieu de guet, c'est de là qu'on pourra voir l'arrivée des Allemands ; mais c'est aussi un lieu d'attente et d'espoir comme si le temps y était suspendu. Ce balcon symbolise une porte ouverte entre la réalité et l'imaginaire, la guerre et la paix et symbolise ainsi un espace poétique. La dimension poétique du roman est majeure. L'auteur a le souci de l'écriture, du style, de la puissance des métaphores. [...]
[...] La temporalité du roman devient alors celle d'une tragédie. Ainsi Un balcon en forêt revêt quelques caractéristiques du roman historique, avec son objectivité froide, mais une objectivité qui cherche à en tirer une signification. Dès l'oxymore évoqué par le titre, s'opposent l'objet civilisé que représente le « balcon », symbole de la réalité de la guerre, et la nature sauvage exprimée par la « forêt », lieu de rêverie. Le héros va ainsi naviguer entre ancrage historique dans la « drôle de guerre » et la mythologie liée à sa relation amoureuse vécue dans la nature. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture