Arthur Rimbaud, poète français du XIXe siècle se penche, comme beaucoup d'artistes sur les énigmes du moi. Il écrit ainsi, dans une lettre révélant son mal-être : "Je est un autre". Ceci révèle une dualité au sein même du moi entre ce que l'on est vraiment et ce que l'on peut (ou ce que l'on pense) maîtriser au sein même de sa personne. Peut-on être le maître de la totalité de son moi ?
Afin de répondre à cette problématique, nous confronterons trois œuvres littéraires de genres, d'auteurs et d'époques différentes. Nous utiliserons l'œuvre dramatique "Lorenzaccio" d'Alfred Musset, l'autobiographie de Michel Leiris, auteur du XXe siècle, "L'Age d'homme" et enfin, le livre X des "Confessions" d'Augustin, théologien du IVe siècle après Jésus Christ.
« Le moi n'est pas maître dans sa propre maison ». C'est ce que Freud explique : le moi est soumis à la fois à la conscience du sujet, mais également à son inconscient. Ceci crée inévitablement une dualité dans le moi. Cette scission est d'autant plus importante que l'inconscient, par définition, n'apparaît pas directement à la conscience. Le sujet pensant, n'ayant pas alors conscience de cette dualité ne peut maîtriser son moi totalement et ainsi laisse sans contrôle l'« autre » tel que Rimbaud semble le baptiser.
[...] Le moi peut donc être divisé de plusieurs manières différentes. Cependant, nous allons voir que cette dualité est en quelque sorte une symbiose. En effet ces parties du moi sont étroitement liées. D'une part l'une ne peut exister sans l'autre. D'autre part la partie non maîtrisée, ou l' autre de Rimbaud, agit sur le je Enfin nous verrons que finalement, l' autre est également conditionné. Une dualité s'exprime au sein du moi. Cependant, bien qu'on ne sache pas quelle partie est la plus forte ou la plus puissante, le sujet pensant ne semble pas pouvoir se passer de l'une ou de l'autre . [...]
[...] La seule issue semble être alors la mort du Duc. De façon à peu près similaire bien que moins tragique, Michel Leiris explique dans L'Age d'homme qu'il est à la fois Holopherne, Lucrèce et Judith mais ces trois personnalités se complètent. Il existe apparemment une symbiose dans la dualité du moi. Au sein même de cette dualité du moi qu'exprime Arthur Rimbaud, l'« Autre semble agir sur le Je En effet, l'inconscient, caractérisé par le surmoi et le ça agissent sur le moi conscient par, d'une part, la censure, et d'autre part des actes manqués ou des rêves. [...]
[...] Cependant cet appel reste sans succès. En effet, celui-ci n'a pas réussi sa conversion, à la différence d'Augustin. Etre maître de la totalité de son moi présuppose la connaissance de la totalité de son moi. Cependant, elle est rendue difficile par une certaine dualité. Bien qu'elle ne peut être obtenue seule, on ne peut l'approcher grâce à une tierce personne, que ce soit un ami ou grâce à la psychanalyse, ou grâce à une entité transcendante nous dévoilant notre âme. [...]
[...] On peut ainsi solliciter un ami, dans la limite de son objectivité. C'est ce que fait Lorenzo avec Philippe dans l'acte III, scène de Lorenzaccio, pièce de théâtre de Musset. Celui-ci se confesse littéralement à lui et lui dévoile ses plans au risque de se faire découvrir. Malheureusement cela ne le débarrasse pas de son vice. L'autre possibilité revient à faire appel à un psychanalyste puisque celui-ci est objectif. C'est la solution que choisit Michel Leiris, comme il l'explique dans le Radeau de la Méduse, dans L'Age d'homme. [...]
[...] Lorenzo, personnage principal de Lorenzaccio, pièce de théâtre de Musset, s'identifie à un être bon par nature mais ayant revêtu un déguisement de vice, pour approcher le duc Alexandre, dont il ne pourrait s'en débarrasser : Ma jeunesse a été pure comme l'or (III, Le vice, comme une robe de Déjanire 5). De façon moins violente, Michel Leiris se qualifie comme ayant plusieurs personnalités en se rapprochant tantôt d'Holopherne, tantôt de Judith, tantôt de Lucrèce. La dualité du moi peut ainsi s'exprimer par la dualité de la personnalité. Le moi peut également s'exprimer dans une autre dualité. On peut ainsi savoir ce que l'on maîtrise de soi et attribuer ce que l'on ne maîtrise pas, ou ce que l'on ne connaît pas, à une entité transcendante. [...]
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