Un autobiographe doit-il nécessairement évoquer le récit de son enfance ?

Résumé du document

L'autobiographie est un genre qui invite l'écrivain à se découvrir lui-même en élaborant le récit de sa vie. Ainsi, il peut rédiger dans un journal ses rencontres, idées ou réflexions, rapporter dans un mémoire les évènements historiques qu'il a vécus, en répondant toutefois aux caractéristiques de l'autobiographie définies par Philippe Lejeune. L'écrivain doit, en effet, "respecter les contraintes d'un récit rétrospectif en prose qu'une personne réelle fait de sa propre existence lorsqu'elle met l'accent sur sa vie individuelle, en particulier sur l'histoire de sa personnalité". Ecrire sa vie exige donc de se projeter en arrière, cependant le point de départ est à situer. Ainsi, en vue de déterminer l'importance du récit de l'enfance dans l'autobiographie, nous verrons tout d'abord qu'il s'agit d'un moment primordial de notre évolution, puis nous nous demanderons si, pour autant, il est obligatoire de l'évoquer.

Extraits

[...] Cela peut lui permettre également de prendre du recul afin d'analyser son ressenti. Ainsi, dans La Place, Annie Ernaux réalise qu'enfant, elle avait l'impression de se jeter dans le vide Le regard neuf de l'écrivain peut donc lui offrir la possibilité de mieux se comprendre, mais cela peut également s'expliquer par l'envie de se replonger dans une enfance tendre et douce, par nostalgie, afin de revivre d'heureux moments, comme le suggère cette citation de l'Amant : elle crie, elle rit de son gloussement miraculeux Enfin, relater son enfance peut être un moyen de justifier des erreurs, de mauvaises actions et de s'en alléger le cœur. [...]

[...] Finalement, dans l'écriture de son autobiographie, l'écrivain est libre de raconter ce qu'il estime le caractériser le plus fidèlement, ce qu'il juge avoir été le plus déterminant dans sa vie, et ce sans nécessairement replonger dans son enfance. La période de l'enfance est, en effet, assimilée aux grands apprentissages d'une vie, le moment où l'enfant passe du rêve à la réalité s'avère décisif dans son évolution et sa construction, mais l'évoquer dans une œuvre relève du choix de l'auteur, pas d'une obligation. [...]

[...] Georges Perec, dans W ou le souvenir d'enfance, explique lui aussi son trouble de mémoire lorsqu'il écrit : Je n'ai pas de souvenirs d'enfance. Jusqu'à ma douzième année à peu près, mon enfance tient en quelques lignes Dans ce cas, faire le récit de son enfance peut, en effet, s'avérer difficile. Dans un second temps, l'incapacité de restituer cette période peut se traduire par une volonté de ne pas se dévoiler. Cela peut être en raison d'une intimité, d'un jardin secret que l'on veut protéger, mais aussi en raison d'une enfance douloureuse sur laquelle on ne souhaite pas s'attarder. [...]

[...] Un autobiographe doit-il nécessairement évoquer le récit de son enfance ? L'autobiographie est un genre qui invite l'écrivain à se découvrir lui-même en élaborant le récit de sa vie. Ainsi, il peut rédiger dans un journal ses rencontres, idées ou réflexions, rapporter dans un mémoire les évènements historiques qu'il a vécus, en répondant toutefois aux caractéristiques de l'autobiographie définies par Philippe Lejeune. L'écrivain doit, en effet, respecter les contraintes d'un récit rétrospectif en prose qu'une personne réelle fait de sa propre existence lorsqu'elle met l'accent sur sa vie individuelle, en particulier sur l'histoire de sa personnalité Écrire sa vie exige donc de se projeter en arrière, cependant le point de départ est à situer. [...]

[...] Ainsi, dans les Essais ou dans Les Cahiers, Montaigne et Montesquieu n'évoquent pas leur enfance, mais utilisent la description de leur caractère afin de faire l'éloge de certaines considérations morales. Dans Les Cahiers, Montesquieu affirme : Je m'éveille le matin avec une joie secrète ; je vois la lumière avec une espèce de ravissement. Tout le reste du jour je suis content témoignant que la simplicité d'esprit rend heureux. Ensuite, il se peut que l'auteur soit dans l'incapacité de conter son enfance, et ce, en raison de souvenirs vagues voire inexistants, dans un premier temps. [...]