Dissertation de Littérature ayant pour sujet : "L'artiste peut-il tout exprimer ?". A la fin du XIXe siècle, Oscar Wilde écrivait dans la préface au Portrait de Dorian Gray : « L'appellation de livre moral ou immoral ne répond à rien. Un livre est bien écrit ou mal écrit. Et c'est tout. [...] L'artiste peut tout exprimer. »
[...] Ronsard est ressuscité par Sainte-Beuve. Dire qu'un livre est bien ou mal écrit relève aussi de données historiques. Oscar Wilde s'inscrit historiquement dans un mouvement en faveur de l'art pour l'art, mais insiste sur une caractéristique importante, la beauté formelle. Elle ne recouvre cependant pas la complexité des rapports entre morale et art, toujours changeants et remis en cause. II reste que les œuvres les plus appréciées d'une époque répondent à ses aspirations profondes, éthiques ou esthétiques, qu'elles soient anciennes ou récentes : relative immortalité d'Homère pour sa peinture de la guerre ou du voyage initiatique, toujours émouvante et riche d'images, mode de l'existentialisme qui s'atténue, essor de Proust jugé d'abord futile et obscur. [...]
[...] L'écart entre une photographie anthropométrique et le portrait qui choisit l'angle de vue, la lumière, la pose ou leurs couleurs saute aussi aux yeux Flaubert dit même il n'y a ni beaux ni vilains sujets et qu'on pourrait presque établir comme axiome, en se plaçant du point de vue de l'art pur, qu'il n'y en a aucun, le style étant à lui seul une manière absolue de voir les choses Madame Bovary, histoire d'adultères et de provinciaux imbéciles, illustre son propos. Comment faire un dialogue trivial qui soit bien écrit ? se demande-t-il en créant son roman. Zola, Céline font une œuvre d'art de la déchéance morale. Dans l'Assommoir, l'alambic, fournisseur odieux de l'alcool qui avilit les personnages, prend une dimension grandiose par la description et les métaphores. En peinture, Toulouse-Lautrec éternise le peuple interlope des cabarets. [...]
[...] Si l'art bénéficie de relatifs privilèges, il est souvent jugé dangereux. Que les intentions de Madame Bovary soient pures n'empêche pas que la débauche tente les âmes faibles, femmes ou jeunes filles. L'auteur, dit le réquisitoire, met le poison à la portée de tous et le remède à la portée d'un bien petit nombre Le même argument peut être employé pour la violence. Pour la facilité de l'identification aux personnages, théâtre puis cinéma ont été particulièrement suspects de favoriser les vices par leur simple représentation. [...]
[...] Bien des films échappent à la catégorie pornographique à cause d'une photographie soignée. Mais qualités formelles et pouvoir sur l'imagination doivent, selon d'autres artistes, se mettre au service des plus hautes valeurs éthiques. Pour George Sand, dans la préface de La Mare au Diable, l'art a une mission de sentiment et d'amour le roman d'aujourd'hui devrait remplacer la parabole et l'apologue des temps naïfs Elle se plaint que la peinture de truands, fréquente dans les romans d'Eugène Sue, dresse les riches contre les pauvres, en instaurant la peur. [...]
[...] Au XXe siècle cette tradition survit avec A. Malraux, A. Camus, J.-P. Sartre. Les artistes accusés d'immoralité se défendent souvent en restant sur ce terrain : Balzac, Baudelaire, Flaubert supplient d'examiner l'ensemble de l'œuvre, non des passages ou la présence d'un personnage. La Comédie humaine présente autant de vertueux que de dépravés, Les Fleurs du Mal opposent l'idéal aux tentations mauvaises, Emma désespérée se suicide après ses adultères. D'autres pensent que le lecteur juge les actes offerts à sa réflexion, que censurer tromperait sur la triste réalité, alors que seule une connaissance complète de la nature humaine permet de se connaître et de se dominer. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture